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Les seniors et la lecture
Ressi — 19 juillet 2009
Séverine Dick, Bibliothèque cantonale jurassienne
Résumé
Aujourd’hui, le vieillissement de la population conduit à s’interroger sur la présence des personnes âgées en bibliothèque. La Bibliothèque de la Ville de Delémont a souhaité mener une réflexion autour de la personne âgée et de ses relations avec la lecture et la Bibliothèque. Cela, en vue d’explorer les meilleurs moyens de mettre en contact cette tranche d’âge avec la lecture et d’améliorer ses services envers ce public. Elle voulait aussi découvrir quelles sont les particularités des seniors en ce qui concerne la demande sociale, culturelle, documentaire, en quoi diffèrent leurs usages de la bibliothèque et quelles sont leurs pratiques et motivations de lecture.
Les objectifs du travail de bachelor réalisé par l’auteur furent de définir le public cible, de connaître les attentes et satisfactions des utilisateurs, d’analyser l’existant, de recueillir des informations d’autres services existant en Europe et dans les pays anglo-saxons, de réaliser des entretiens avec des institutions menant des actions auprès des seniors, de trouver des améliorations originales pour mettre en valeur la lecture avec ce type de public, de rédiger un catalogue de propositions adapté à l’environnement de la Bibliothèque et de mettre en oeuvre quelques propositions. Le catalogue est l’aboutissement des différentes phases du projet, qui sera suivi par une phase concrète de réalisation des propositions.
Les seniors et la lecture
Février 2008, lors de la réalisation de mon travail de Bachelor en information documentaire à la Haute École de Gestion de Genève, je suis partie à la découverte des personnes âgées en bibliothèque. Souhaitant créer de nouveaux services adaptés aux besoins des seniors, la Bibliothèque de la Ville de Delémont (1) m’a mandatée, afin de mener une réflexion sur cette tranche d’âge, son rapport avec la lecture et la bibliothèque mais également sur les meilleurs moyens de se mettre en contact avec ce public. Le résultat : une étude, une exposition et un catalogue contenant douze propositions concrètes. Présenté sous le titre « Les seniors et la lecture à Delémont », le travail a été couronné par le prix décerné par le Groupe romand de la Communauté de travail des bibliothèques suisses de lecture publique à un travail de Bachelor.
La première difficulté de mon travail a été de parvenir à clarifier la notion de « personnes âgées ». Cette expression est employée si fréquemment qu’elle ne fait pas l’objet d’un questionnement spécifique. Pourtant, la définition précise de cette notion soulève bien des ambiguïtés par la difficulté de lui attribuer des contours clairs et par les représentations et les idées préconçues qui l’accompagnent.
Comment définir le terme « personne âgée » ? A quel âge correspond cette catégorie ? Quelques définitions de grandes institutions m’ont aidée à répondre à ces questions.
Par exemple, selon l’Organisation mondiale de la santé, le troisième âge correspond à l’âge de la retraite, soit 64 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes en Suisse. Le quatrième âge, quant à lui, coïncide avec l’apparition d’un handicap.
Senior Strategic, réseau international d’experts du marché des Seniors (2), définit également plusieurs catégories de personnes âgées ; les papy-boomers, âgés de 47 à 57 ans, puis, les jeunes seniors, de 57 à 67 ans, ensuite, les seniors, de 68 à 79 ans et pour terminer les grands seniors âgés de plus de 80 ans. Les jeunes seniors correspondent aux personnes qui entrent dans l’âge de la préretraite – retraite. La catégorie des seniors marque l’entrée dans la vieillesse. Les grands seniors représentent les personnes qui ont de plus en plus de difficultés à se déplacer et des problèmes de santé.
D’autre part, en Suisse, selon l’Office fédéral de la statistique, les personnes âgées sont les personnes de 65 ans et plus. L'OFS différencie les personnes de 65 ans à 79 ans et celles de 80 ans et plus.
Il est donc difficile de définir un âge auquel commence la vieillesse. L’âge légal d’entrée à la retraite ne peut pas être comparé à l’entrée dans la vieillesse. D’ailleurs, comme le dit Vincent Caradec (3) : « On est socialement vieux de plus en plus jeune et biologiquement vieux de plus en plus tard ; on peut être vieux à 30 ans et actif à 90 ans».
Pour analyser le public des utilisateurs seniors de la Bibliothèque de la Ville de Delémont (ci-après : BVD), j’ai décidé de retenir les classes d’âge suivantes : les 60-69 ans, représentant les personnes en âge de préretraite - retraite, qui sont encore très actives, ont des contacts avec leur profession et des pratiques culturelles variées et importantes ; les 70-79 ans sont les personnes à la retraite qui commencent à avoir des problèmes pour se déplacer, et les 80 ans et plus qui correspondent aux personnes du quatrième âge.
Ce choix de classes d’âge peut paraître arbitraire, mais pour le besoin de mon travail, j’ai dû définir précisément l’objet de mon étude. Il est vrai que ces catégories d’âge ne constituent pas un groupe de personnes homogènes. Elles n’ont sûrement pas les mêmes pratiques, ni les même hobbies, ni les mêmes attentes.
Un des buts de mon travail était de comprendre comment les personnes âgées sont perçues dans les bibliothèques. J’ai donc cherché les activités existantes dans les bibliothèques et homes du Jura et Jura bernois (partie francophone du canton de Berne). Pour réaliser au mieux cette recherche, j’ai privilégié différentes approches et outils : entretiens, enquêtes, recherches, visites et analyses. Cette étape m’a permis aussi d’avoir une approche pratique des services existant ailleurs qu’à Delémont et m’a inspirée pour choisir les propositions du catalogue.
A Delémont, en 2000, une exposition a été réalisée sur les personnes âgées, suite à « l’Année de la personne âgée » organisée en 1999. Les locaux de la Bibliothèque de la Ville ont été animés par le « regard » des jeunes générations sur le troisième âge, qui ont écrit des textes sur leur perception des seniors. De plus, une lettre était envoyée à tous les nouveaux retraités chaque année, pour leur rappeler que la Bibliothèque est à leur disposition et leur offrir ses services. Cet envoi a cessé en 2002 lorsque l’inscription à la Bibliothèque est devenue gratuite pour les retraités de Delémont. La gratuité de l’inscription a été étendue en 2005 aux seniors des autres communes.
Quelques activités ont été menées ces dernières années en collaboration avec les seniors à la Bibliothèque des Jeunes de Delémont. A l’occasion de l’année de la personne âgée en 1999, un atelier d’écriture entre les grands-parents et leurs petits-enfants a débouché sur la création d’un conte. La Bibliothèque des Jeunes participe aussi au prix Chronos de Pro Senectute (4) par la mise à disposition des livres sélectionnés.
Il y a également des activités en relation avec la lecture dans les homes du Jura et du Jura bernois. A la Fondation Clair-Logis à Delémont, un atelier de lecture a lieu deux fois par mois et est réalisé depuis quelques années. Pendant environ une heure, l’animatrice lit des contes, des poèmes et des fables. Le but est que les gens puissent vivre un moment d’échanges, de partage et parler de leur vie, de leurs souvenirs.
L’animatrice du Foyer Les Planchettes à Porrentruy m’a dit, lors d’un entretien, avoir développé l'animation « Moment de Lecture » depuis maintenant environ quatre ans. Cet atelier se déroule une fois par mois avec une quinzaine de résidants, elle leur lit des textes, des contes, des chroniques d'époque et des poèmes. En parallèle, elle met à disposition des personnes âgées « Les livres en ballade », en se rendant auprès des résidants dans leur chambre avec un chariot de livres.
Suite aux informations recueillies sur les institutions du Jura et du Jura bernois offrant des activités pour les personnes âgées, j’ai cherché des pratiques originales qui existent en Suisse et dans le monde. J’ai orienté mes recherches surtout du côté de la France, des pays d’Amérique du Nord, et vers l’Australie, dont les services en bibliothèque sont très développés. Elles ne sont pas toujours de prime abord destinées aux personnes âgées, mais sont utilisées par de nombreux seniors.
La Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel propose depuis 1999 un service de prêt à domicile en collaboration avec la « Croix-Rouge ». La bibliothécaire et les bénévoles assurent un service de prêt chez les personnes qui ne peuvent plus se déplacer, ainsi que dans les homes de la région qui en font la demande. Elle organise une animation lecture, une ronde autour des livres qu’elle apporte et effectue un prêt de longue durée sur 6 mois.
Il existe également un service de prêt à domicile créé en 1975 par les Bibliothèques municipales de Genève. Ce service s’adresse à toutes les personnes qui ne peuvent plus ou pas se déplacer et qui ne peuvent plus porter les documents. Le service est réservé exclusivement aux habitants de la Ville de Genève. Il touche environ 50 à 60 personnes. Une bibliothécaire s’occupe du service à domicile, cela représente environ 16 heures de travail par semaine.
La Bibliothèque-Médiathèque de Sierre (canton du Valais) a mis en place un service à domicile avec l’aide de bénévoles, cependant l’action n’a pas remporté le succès attendu. Aujourd’hui, le service fonctionne encore, mais seulement pour deux ou trois personnes. Les bibliothécaires travaillent également en collaboration avec le centre médico-social de la Ville de Sierre. Les infirmiers viennent chercher des livres pour certaines personnes vivant à domicile et qui ne peuvent pas se déplacer. La Bibliothèque a développé une large collection de livres en grands caractères, suite à l’exposition qu’elle avait réalisée sur les moyens auxiliaires de lecture.
Les bibliothèques en France ont développé de nombreuses actions en faveur des personnes âgées dans les dix dernières années.
La Bibliothèque départementale de l’Ardèche propose un service très intéressant à destination des personnes âgées : « Culture bleue ». Le projet, lancé en 1998, a pour but de fournir des prestations adaptées aux besoins des personnes âgées, qu’elles vivent à domicile ou dans les institutions d’hébergement.
« Culture Bleue installe dans les établissements de personnes âgées, des dessertes de bibliothèques spécialisées (350 documents env.) constituées de livres en gros caractères, de livres-cassettes, de beaux-livres, de vidéos, de disques-compacts... Qui plus est, le service apporte aussi une aide technique à la lecture, puisque le bibliobus mis à disposition est équipé de télé agrandisseurs (grossisseurs de caractères), et de casque audio permettant une lecture assistée en cas de perte de vue. A chaque passage dans un établissement, le bus s’installe pour la journée : la matinée est réservée à l'échange des ouvrages et à la manipulation des grossisseurs de caractères, l'après-midi quant à elle est consacrée à des ateliers autour de la lecture, de mise en valeur du fonds. » (5)
En Savoie, à la Bibliothèque départementale de prêt de Savoie et de Haute-Savoie, les bibliothécaires ont publié un fascicule s’intitulant : « Lecture & personnes âgées ». C’est un guide pratique destiné aux équipes des bibliothèques qui souhaitent mettre en place des actions pour les seniors. Ce fascicule parle de la présentation des livres et de l’accueil des personnes âgées à la bibliothèque. La Bibliothèque départementale de prêt de Savoie et de Haute-Savoie propose également pour les bibliothécaires de son réseau des cours pour apprendre à lire à voix haute auprès des personnes âgées.
Le Pôle mobile de la Bibliothèque municipale de Lyon se compose de trois bibliobus. Ils desservent 32 résidences pour personnes âgées (6). Les objectifs du Pôle sont d’aller vers les lecteurs ne disposant pas d’une Bibliothèque d’arrondissement, ainsi que vers les lecteurs dits « empêchés » ou « éloignés » de la lecture. Le Pôle mobile travaille en partenariat avec l’Education nationale, les services scolaires et sociaux de la Ville, le SPIP (Service pénitentiaire d’insertion et de probation) et l’ARALD (Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation).
La Médiathèque Boris Vian de Port-de-Bouc a réalisé une expérience intergénérationnelle en partenariat avec la maison de retraite « La Presqu’île » et les adolescents des centres sociaux Nelson Mandela et Fabien Menot. Ce projet se nomme « Portraits d’anciens ». Cette activité a permis aux adolescents des centres sociaux d’être en contact avec les personnes âgées de la maison de retraite « La Presqu'île » et d’apprendre beaucoup sur leur vie passée. La Bibliothèque a mis en ligne les photos, ainsi que les résumés des entretiens (7).
La Médiathèque Jean-Jacques-Rousseau de Chambéry propose aux personnes déficientes visuelles un service d’accès à la lecture. Il s’agit de l’atelier « Médiavue » qui propose des outils adaptés, logiciels de lecture à haute voix, imprimante braille, loupe électronique. De plus, le personnel est formé pour que chaque personne puisse accéder à tous les services de la Médiathèque (8). Les éclairages et les mobiliers sont étudiés et les collections sont disposées de manière à être très visibles. Le public utilisant cet atelier vient d’horizons différents, les personnes âgées sont les plus nombreuses.
L’Association « FOLA » (Friends of Libraries Australia) a mené une enquête en 2005 auprès de toutes les bibliothèques publiques d’Australie (9). Le but de cette enquête était de déterminer l’offre actuelle pour les seniors et de connaître leurs expériences. Cette enquête a montré que la majorité des bibliothèques n’ont pas défini de standards ni de politique de développement de services spécifiques pour les seniors. Toutefois, 93% des bibliothèques interrogées proposent des services de prêt à domicile. Les services à domicile en Australie sont tout autant évolués que dans les pays d’Amérique du Nord.
Au Canada, les services pour les personnes âgées en bibliothèque sont fortement développés. L’Association canadienne des bibliothèques a rédigé sept lignes directrices pour aider les bibliothèques canadiennes à servir un public qui augmentent d’années en années (10).
Les résidants de la Ville d’Halifax au Canada (11) ont la possibilité, s’ils se trouvent dans l’incapacité de se rendre eux-mêmes à la Bibliothèque ou qu’ils ne peuvent pas porter leurs livres, de se faire livrer les documents à la maison.
La Bibliothèque publique d’Ottawa possède de nombreux services pour personnes handicapées : technologie d’aide ; livres à gros caractères ; livres parlés ; livres et revues au sujet de la vie avec un handicap ; aide à la lecture pour les clients de livres parlés ; livres Daisy ; cassettes audio ; équipement spécialisé, Zoom Text (appareil d’agrandissement de texte) ; postes de travail accessibles par chaise roulante. Un service à domicile est également disponible pour tous les résidants d’Ottawa qui sont incapables de se rendre à une succursale de la Bibliothèque. Elle offre aussi une collection mobile pour les résidences et logements pour personnes âgées (12).
Les Etats-Unis ont des services aussi développés que leur voisin le Canada. L’Association des bibliothèques américaines (The American Library Association, ALA) a également écrit sept lignes directrices, semblables à celles du Canada, que les bibliothèques devraient suivre afin d’offrir les meilleures conditions aux personnes âgées (13). L’ALA soutient les bibliothèques qui développent leurs services envers les personnes âgées et offre un prix de 1'000 dollars à l’institution qui aura mis en place un service original.
Une partie du site de la Bibliothèque publique de Cuyahoga County (14) est destinée aux personnes âgées. Il y a un lien vers la liste d’acquisitions des documents en grands caractères. De plus, des articles qui intéresseraient les seniors sont mis à disposition. On trouve également un service « Ask a librarian for seniors ». Ils ont la possibilité de s’inscrire à un fil RSS pour avoir les dernières informations figurant sur le site par courrier électronique. Aux Etats-Unis, les bibliothécaires ont trouvé un moyen original de réaliser des rencontres intergénérationnelles. La « Old Bridge Public Library » a instauré un programme où les adolescents apprennent aux personnes âgées à jouer à des jeux électroniques (15). On retrouve aussi les services de portage à domicile par la poste dans tous les coins du pays.
Suite aux recherches menées pour découvrir les pratiques existantes dans le monde à l’intention des personnes âgées, je me suis intéressée plus particulièrement aux seniors fréquentant la BVD, à leurs attentes et à leurs suggestions.
J’ai en outre décidé de réaliser un questionnaire, afin de mieux connaître les personnes âgées inscrites à la BVD. Il avait pour but de définir ce public, d’aller à sa rencontre et d’évaluer ses pratiques. Cela m’a permis aussi de mesurer son usage de la Bibliothèque, de connaître son intensité de fréquentation de la BVD et d’établir son degré de satisfaction et ses attentes.
Le questionnaire a été partagé en quatre parties. La première concerne le profil des utilisateurs (sexe, année de naissance, lieu de résidence). Ce premier point m’a permis de comparer les résultats d’autres questions, telles que l’utilisation d’Internet avec l’âge des lecteurs.
La deuxième partie s’intitule « Vous et la Bibliothèque ». Elle regroupe les questions sur les années de fréquentation : est-ce que les seniors se rendent à la BVD depuis longtemps ? À quelle fréquence ? Ont-ils du temps seulement depuis leur retraite ? Pourquoi se rendent-ils à la Bibliothèque ? Une question concerne également la fréquentation d’autres bibliothèques. Je voulais savoir, par cette question, si les personnes âgées habitant en dehors de la Ville de Delémont utilisent d'autres bibliothèques, comme par exemple le Bibliobus.
La troisième partie concerne l’avis des seniors sur la Bibliothèque, notamment sur l'accessibilité, les horaires et l'aménagement intérieur.
Le point quatre se nomme « Vos habitudes de lecture ». Les seniors devaient citer leurs genres de livres préférés. Les autres questions de ce point concernaient l’utilisation d’Internet : ont-ils une adresse e-mail ? La Bibliothèque aimerait mettre en place un système de réservation en ligne, ainsi que la gestion du compte pour les prolongations. La dernière question concerne le téléchargement de documents écrits ou audiovisuels par Internet lors de difficultés de lecture, afin de prendre en compte les nouvelles technologies disponibles pour améliorer la lecture.
J’ai reçu un total de 146 questionnaires valables. Les 146 réponses représentent un peu plus de 41% des personnes interrogées. Le taux de réponses à ce questionnaire constitue donc un réel succès.
Age, sexe et lieu de résidence des seniors
J’ai recensé 87 enregistrements féminins contre 58 masculins. Cela montre que mon échantillon est représentatif de la vie réelle. Cela correspond aux chiffres de l’Office fédéral de la statistique selon lesquels les femmes sont plus nombreuses chez les personnes âgées et ont une espérance de vie plus longue. La plupart des réponses proviennent de personnes qui habitent à Delémont (98 personnes), soit 67,1%. Cela explique peut-être le succès de mon questionnaire.
Fréquentation de la BVD
Les seniors fréquentant la Bibliothèque dans la classe d’âge des 60 à 69 ans forment un groupe de 74 personnes. Cela correspond aux années des « Baby boomers », époque où les personnes ont eu une meilleure éducation et ont pu plus facilement continuer des études. On trouve aussi 50 personnes entre 70 et 79 ans. Toutefois, seules 9 personnes sur les 40 interrogées se situent dans la tranche d’âge des 80 et plus, soit 22% (trois personnes n’ont pas cité leur date de naissance dans le questionnaire).
Accès à la BVD
La question suivante s’intéressait à l’accessibilité de la Bibliothèque. 140 personnes ont répondu avoir facilement accès à la BVD, une seule personne a dit avoir des difficultés à se déplacer, car elle habite à Courroux et serait favorable à un service à domicile. 12 autres personnes, même si elles ont dit n’avoir pas de problèmes pour se déplacer à la BVD, seraient intéressées par un service à domicile, et 3 personnes souhaiteraient éventuellement bénéficier d’un tel service. 5 personnes disent aussi avoir des problèmes de parcage.
Jours et horaires d’ouverture
Les personnes âgées se sont aussi exprimées sur les horaires. Pour la majorité (132 personnes), les horaires conviennent tout à fait. Seules 10 personnes éprouvent d’autres besoins par rapport aux heures d’ouverture actuelles (ouverture entre midi et 13h, samedi après-midi, etc).
Aménagement intérieur
L’aménagement intérieur est très satisfaisant pour les seniors, seules 3 personnes le trouvent peu satisfaisant. Un monsieur dit avoir « des problèmes avec les livres en position basse, car je ne peux lire ni les titres ni les auteurs ». Une dame a du mal à s’y retrouver, car elle doit tirer les livres pour en voir la couverture. Six seniors se sont aussi plaints de l’emplacement des livres trop bas. Une personne aimerait un plan d’accès à l’entrée de la Bibliothèque, pour situer les genres de documents. Deux personnes âgées souhaiteraient une meilleure lumière pour lire. Une autre aimerait plus de places assises et plus d’espace entre les étagères et un monsieur aimerait disposer d'un service d’information pour consulter les livres disponibles au rayon et voir leur emplacement sans avoir recours au personnel. Il ne connaît donc pas le catalogue et son utilité. Ces remarques, qui ne reflètent pas l’avis général, peuvent être précieuses pour la réflexion autour d’un aménagement « idéal » de la Bibliothèque.
Attentes générales
130 seniors estiment que la BVD répond de manière adéquate à leurs attentes, soit plus de 88%. Globalement, peu de remarques négatives ont donc été émises, les seniors ont, à de nombreuses reprises, mentionné leur plaisir de venir à la BVD.
Suite à l’analyse des attentes des seniors, leurs suggestions sur les rencontres intergénérationnelles, l’atelier de lecture, le groupe bénévole de lecture, l’offre plus variée de documents à grands caractères et la présentation du futur catalogue sont des idées à retenir pour le catalogue de propositions.
Habitudes de lecture
On remarque lors de l’analyse de la fréquence des emprunts par genres de livres que les témoignages sont très appréciés par les seniors en général. Puis on retrouve la même proportion de réponses entre les romans historiques, les romans du terroir, les policiers et la littérature classique. Les livres pratiques (cuisine, jardinage, guides de voyage) ont aussi été désignés par 33% des sondés.
En fin de classement arrivent les livres audio, très peu demandés. Il est intéressant de constater que, contrairement à la situation qui prévaut en Suisse romande, les livres audio connaissent un réel succès en Suisse alémanique. Pour terminer, 11% des seniors lisent des livres à grands caractères.
Usage d’Internet
Suite à la question « Utilisez-vous Internet à la maison ?», 72 seniors ont répondu avoir accès à Internet, soit 49,3%, dont 48 personnes se situent dans la catégorie des 60-69 ans, 20 dans celle des 70-79 ans et une seule personne pour les 80 ans et plus. Trois personnes n’ont pas cité leur date de naissance. Ces résultats sont réjouissants. On remarque qu’il y a une réelle envie des seniors d’utiliser les nouvelles technologies.
L’avant-dernière question portait sur l’usage d’un courriel. 72 personnes y ont répondu positivement. C’est le même nombre que ceux qui utilisent Internet. Ils emploient cette technologie comme moyen de contact et pas seulement pour surfer et chercher des informations. La dernière question, quant à elle, concerne le téléchargement de documents audiovisuels et écrits par Internet, en cas de difficultés de lecture. 41 personnes y sont intéressées contre 79. Toutefois, 26 personnes n’ont pas répondu à cette question, sans doute par manque de compréhension du sujet.
Les précédentes phases de mon travail (état des lieux, questionnaire) m’ont permis de définir des propositions en relation avec l’environnement de la Bibliothèque de Delémont (16). J’ai retenu douze propositions, qui touchent différents domaines. Deux projets concernent l’amélioration de l’accès extérieur et intérieur. Il est important que les personnes âgées n’aient aucune difficulté à se rendre à la Bibliothèque, mais aussi qu’elles aient un accès facilité aux collections (rayonnages accessibles et espaces suffisants entre les travées). Les objectifs sont d’attirer le public qui ne vient pas à la BVD par manque de places de parcs et par l’insécurité due aux pavés menant à la BVD, particulièrement glissants en hiver ; d’élargir l’offre des places de parc à tous les usagers ; de mettre à disposition une place de parc pour les personnes à mobilité réduite et aussi d’optimiser l’espace intérieur pour une meilleure organisation des rayonnages.
Afin de promouvoir les collections de la BVD, deux projets ont été réalisés autour de la mise en valeur d’ouvrages. Il s’agit du projet « développement de livres en grands caractères » et du projet « mise en valeur d’ouvrages à l’intention des personnes âgées ». Ces deux projets intéresseront aussi les résidants des homes et les animateurs socioculturels. La BVD a une réelle envie d’améliorer ses services auprès des personnes atteintes de déficience visuelle. La collection des grands caractères disponibles à la BVD n’a pas été renouvelée depuis 2000. Il faut donc procurer davantage de documents facilitant la lecture. De plus, la modernisation de l’offre par les maisons d’édition rendent les collections en grands caractères accessibles à tous et sont souvent demandées par le tout public. On pourrait aussi développer la collection par un prêt d’ouvrages à Bibliomedia (17). Une demande de subvention est aussi à envisager auprès d’institutions spécialisées.
Comme les seniors de la BVD utilisent Internet, ont des ordinateurs à la maison et afin d’adapter la collection aux nouvelles technologies, le projet « Accès au contenu numérisé » a été développé. Son but est de fournir des accès aux documents électroniques à domicile pour donner une alternative à la lecture traditionnelle et d’inviter les personnes âgées à se familiariser aux nouvelles technologies. Les personnes âgées auront donc ainsi la possibilité de télécharger des documents sur leur ordinateur et d’agrandir la police, mais aussi d’écouter des livres audio numérisés. Il sera nécessaire de définir une politique (contrat, budget, acquisition de documents, politique de prêt), de rechercher et choisir un fournisseur (créer un partenariat avec un agrégateur de contenu), puis de former le personnel de la bibliothèque.
Un autre projet, quant à lui, permettra d’initier les seniors aux futurs services en ligne de la Bibliothèque dans l’objectif d’innover et d’offrir des services originaux, mais aussi d’amener les personnes âgées à gérer leur compte personnel. Une des perspectives de développement à long terme serait d’initier les personnes âgées à partager leurs lectures sur un blog et à mettre à disposition des utilisateurs des « podcast » d’émissions culturelles.
Les seniors aiment être en contact avec des personnes de leur génération, mais aussi avec des gens de tous âges. Pour cela, deux projets ont été développés. Il s’agit des projets « atelier de lecture » et « activités intergénérationnelles », afin de favoriser un moment de partage et de rencontre avec des personnes de différentes générations. Un des objectifs serait aussi d’organiser une semaine dédiée aux personnes âgées afin de concevoir différentes activités avec cette tranche d’âge et de valoriser les services qui auront été développés.
De plus, certaines personnes ne peuvent plus se déplacer. Il est important qu’elles ne se retrouvent pas exclues de la bibliothèque et de la lecture. Le rôle des bibliothécaires est d’aller vers ce public empêché, afin de lui offrir des services de portage à domicile et de lecture à domicile. Aucun service de ce type n’existe dans la région. Il serait également possible de collaborer avec des structures existantes (par exemple, avec la « Croix-Rouge, section de Delémont »). L’objectif est d’atteindre aussi de nouveaux lecteurs qui ne fréquentent pas la BVD.
L’avant-dernier projet permettra d’élargir les horaires de la Bibliothèque. L’impact de cette proposition est d’attirer plus de personnes et de satisfaire leurs demandes.
Pour terminer, le dernier projet consiste à concevoir un plan marketing, afin de réaliser de la publicité hors les murs des services qu’offre la Bibliothèque.
Les douze projets sont présentés dans une grille identique (18). Elle permet de décrire en quelques phrases précises le but de chaque projet, son impact, ses avantages et ses obstacles, mais aussi sa mise en œuvre. La rubrique « ressources » contient des pistes sur le coût probable du projet, ainsi que des estimations en heures de travail.
Suite à l’élaboration des douze propositions, une phase pratique a eu lieu. Elle a permis l’achat de nouveaux documents en grands caractères, ainsi que la mise en valeur d’ouvrages sur la vieillesse par le biais d’une bibliographie intitulée « Regards sur la vieillesse ».
En cours de travail, nous avons décidé de réaliser une exposition sur la lecture et les seniors, afin de créer une dynamique autour de mon travail et de remercier les seniors d’y avoir participé. Pour la réaliser, j’ai choisi des personnes de plus de 70 ans et fréquentant régulièrement la Bibliothèque. Quatorze personnes y ont participé et ont répondu à quelques questions concernant leurs pratiques de lecture, leurs coups de cœur et leur première rencontre avec la BVD. Cette exposition a rencontré un énorme succès auprès de la population jurassienne.
Ce travail a permis de constater que les personnes âgées, inscrites dans des bibliothèques, les fréquentent souvent. Depuis le début de leur retraite, elles disposent de plus de temps pour vaquer à leurs occupations, se rendre dans les bibliothèques et lire. Les seniors qui auront lu toute leur vie continueront à lire après la retraite, sauf en cas de problèmes de santé. Les pratiques culturelles sont en grande partie le fruit d’un héritage transgénérationnel transmis au sein des familles et des groupes sociaux. Les personnes âgées développent de plus en plus l’habitude d’utiliser les bibliothèques, de les considérer comme un élément constitutif de leur environnement culturel et, donc de les fréquenter.
Le travail a également permis de remarquer un usage croissant des nouvelles technologies (Internet, par exemple). En effet, la tranche d’âge des 60–69 ans pratique assidûment l’usage de l’informatique et d’Internet.
De plus, les usages et attentes des personnes âgées sont tout aussi divers et variés que ceux des autres usagers. Ce public apparaît donc disparate et non catégorisable.
Il est donc important de se pencher sur ce public, tout en gardant à l’esprit qu’il est aussi complexe à analyser que les autres usagers. Le nombre de personnes âgées augmentera sensiblement au fil des années. Les bibliothèques se doivent donc d’adapter leur environnement à leurs attentes.
(1) Capitale du Canton du Jura, 11 198 habitants (1er janvier 2007)
(2) RESEAU SENIOR STRATEGIC. Le marketing générationnel : pour comprendre les plus de 50 ans [en ligne]. 2005. P. 5. http://www.lemarchedesseniors.com/Strategie_Marketing/documents/marketing_generationnel.pdf (consulté le 15.02.2009)
(3) CARADEC, Vincent. Sociologie de la vieillesse et du vieillissement. Paris : Nathan, 2001. P. 47
(4) Le « Prix Chronos » de littérature a été créé en 1996 par la Fondation nationale de Gérontologie et repris en Suisse romande par « Pro Senectute Suisse ». Ce projet propose aux participants de lire des ouvrages ayant pour thème les relations entre les générations, la transmission du savoir, le parcours de vie, la vieillesse et la mort. Les objectifs de ce prix sont de permettre à des personnes de tous les âges de réfléchir sur la valeur des étapes du parcours de vie, de primer les meilleurs albums et romans traitant des relations entre les générations, de la vieillesse, et de développer le goût de la lecture chez les jeunes.
(5) BOUISSET, Hélène. Culture bleue : une offre de lecture pour les personnes âgées en Ardèche. In : Site de l’Association des directeurs de Bibliothèques départementales de prêt [en ligne]. Publié le 15 août 2005. http://www.adbdp.asso.fr/spip.php?article525 (consulté le 15.02.2009)
(6) LUCIDO EL HARRAG, Aurélia. L’offre de services en direction des personnes âgées «empêchées» : l’exemple de la bibliothèque municipale de Lyon [en ligne]. Mémoire d’étude : Diplôme de conservateur de bibliothèques : ENSSIB : 2006. P. 5. http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/document-554 (consulté le 15.02.2009)
(7) Portraits d’anciens, rencontres inter-générations à Port-de-Bouc. In : Site de la médiathèque Boris-Vian, Port-de-Bouc [en ligne]. Modifié le 22 mai 2007. http://mediathequeborisvian.mabulle.com/index.php/Portraits-d-anciens/ (consulté le 15.02.2009)
(8) CRABIERES, Yasmina. Chambéry adapte ses outils. Bibliothèques (s) : revue de l’Association des bibliothécaires français ABF. 2004, n°16. P. 34-35
(9) BUNDY, Alan. Community critical : Australian public libraries serving seniors : a report to the nation by Friends of Libraries Australia (FOLA) [en ligne]. Melbourne, 2005. 17 p. http://www.thefreelibrary.com/Community+critical:+Australian+public+libraries+serving+seniors-a0140410662 (consulté le 15.02.2009)
(10) CANADIAN LIBRARY ASSOCIATION. Canadian Guidelines on Library and Information Services for Older Adults [en ligne]. 2002. http://www.cla.ca/AM/Template.cfm?Section=Position_Statements&Template=/CM/ContentDisplay.cfm&ContentID=3029 (consulté le 15.02.2009)
(11) Halifax public library. Website of the Halifax Public Library [en ligne]. 2008. http://www.halifaxpubliclibraries.ca/infodesk/ca_seniors.html (consulté le 15.02.2009)
(12) Services spéciaux. In : Site de la Bibliothèque publique d’Ottowa [en ligne]. http://www.biblioottawalibrary.ca/experience/specialized/special_f.html (consulté le 15.02.2009)
(13) ALA (American Library Association). Guidelines for Library Services to Older Adults [en ligne]. 1999. 4 p. http://www.ala.org/ala/aboutala/offices/olos/outreachresource/docs/elderly.pdf (consulté le 15.02.2009)
(14) Senior spaces. In: Cuyahoga County Public Library [en ligne]. Modifié le 5 juin 2008. http://www.cuyahogalibrary.org/SeniorSpace.aspx (consulté le 15.02.2009)
(15) OLD BRIDGE PUBLIC LIBRARY. Senior spaces. [en ligne]. http://infolink.org/seniorspaces/index.htm (consulté le 15.02.2009)
(16) DICK, Séverine. Les seniors et la lecture à Delémont : travail de Bachelor réalisé en vue de l’obtention du Bachelor HES [en ligne]. Genève, 2008, p. 51-65 (consulté le 15.02.2009) http://doc.rero.ch/lm.php?url=1000,41,9,20090119144830-EK/Seniors_Lecture_Dick_Severine_0908.pdf
(17) Bibliomedia Suisse est une fondation de droit public active dans le développement des bibliothèques et la promotion de la lecture. Elle est en quelque sorte la « bibliothèque des bibliothèques ». Les trois bibliocentres de Lausanne, Soleure et Biasca proposent un large fonds de livres actuels pour tous les âges, dans toutes les langues nationales et dans plusieurs langues étrangères et un fonds d'autres médias (CD musicaux, DVD, livres audio). Définition tirée du site www.bibliomedia.ch.
(18) Librement inspiré de FORNEROD, Elisabeth ; RAIS HUGI, Aline ; RERAT-OEUVRAY, Géraldine. Regards croisés sur les bibliothèques jurassiennes : propositions pour un espace des savoirs partagés. Certificat de formation continue universitaire : Université de Fribourg, 2007. P. 29.
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PMB à la Bibliothèque municipale de Morges
Ressi — 18 juillet 2009
Luc Jolidon, responsable de la Bibliothèque municipale de Morges
Résumé
Depuis janvier 2008, la Bibliothèque municipale de Morges utilise le logiciel PMB (logiciel open source). Nous avons pu transférer toutes nos données depuis notre ancien logiciel (OPSYS version 8.21). Le prix très avantageux de l'offre PMB, ainsi que la bonne qualité du logiciel, ont été des éléments déterminants dans notre choix. La société PMB Services s'est occupée de l'installation, du transfert des données et de la formation. Le "noyau" du logiciel (prêt, catalogage, recherche) fontionne bien. Nous avons par contre encore quelques petits problèmes avec les éditions et statistiques (nous sommes pour cela entièrement dépendants de PMB Services, qui n'a malheureusement que peu de temps à nous consacrer). Mais nous espérons que ces problèmes pourront être résolus à l'avenir, et, après seize mois d'utilisation, nous devons constater que la solution PMB répond assez bien à nos besoins.
PMB à la Bibliothèque municipale de Morges
1. Les raisons de notre choix
1.1. Présentation de la bibliothèque et contexte du projet
A fin 2006 notre bibliothèque comprend environ 30'000 documents: livres et revues, CD et DVD. Ces collections sont réparties sur deux étages (Section adultes et Section jeunesse). Il y a environ 2'600 usagers actifs qui empruntent chaque année un peu plus de 100'000 documents. Nous disposons de 10 PC, dont 2 réservés à la consultation du catalogue en ligne par le public. Le serveur est installé au Service informatique communal. En cas de forte affluence, nous enregistrons jusqu'à 150 prêts par heure et par PC.
La première automatisation a eu lieu en 1993. Le choix s'était alors porté sur le logiciel OPSYS, dont la dernière mise à jour a été effectuée en 1999 (version 8.21). Ce logiciel fonctionnait correctement, mais:
- il était installé sur un vieux serveur Windows NT 4.0 qui nous a posé quelques problèmes;
- il ne permettait pas la consultation du catalogue via Internet, une fonction que nous souhaitions offrir à notre public.
Ce logiciel n'était plus développé par la société OPSYS, qui propose à ses clients de migrer sur son nouveau logiciel Aloès. Mais cette migration a un coût (installation, formation) non négligeable. Après l'acceptation du crédit de ré-informatisation par le Conseil communal, nous avons lancé un appel d'offre public sur invitation; en y incluant une offre "open source".
1.2. Préparation de l'appel d'offres
Le responsable du projet était Monsieur Philippe Broccard, Chef du Service informatique de la ville de Morges. Le soussigné, responsable de la Bibliothèque, a pu participer à toutes les étapes du projet. Nous avons notamment défini des critères d'évaluation avec pondérations:
# | Critère | Pondération en % |
---|---|---|
1 | Montant et crédibilité du prix | 20 |
2 | Récupération des données existantes | 17 |
3 | Capacité du logiciel à répondre aux exigences techniques | 19 |
4 | Evaluation du logiciel | 11 |
5 | Compétence de la société dans le domaine | 13 |
6 | Qualité des prestations du service après-vente | 9 |
7 | Délais d'installation et de configuration | 6 |
8 | Organisation mise en place par le soumissionnaire pour l'exécution du marché | 4 |
9 | Présentation et qualité de l'appel d'offre et de la documentation technique | 1 |
100% |
Chaque point, et en particulier le point 3 (exigences techniques), a été développé en une série de questions. L'ensemble de ces critères a été envoyé avec l'appel d'offres aux cinq fournisseurs suivants:
- AGATE (logiciel Agate): cette société s'est retirée en cours de procédure par manque de disponibilité
- ALCODA (logiciel Netbiblio)
- ELSA (logiciel BiblioMaker)
- EPSILON (représentant en Suisse la société OPSYS, logiciel Aloès)
- PMB Services (logiciel open source PMB)
Il faut relever que c'est grâce à un article paru dans la revue RESSI ("Le pingouin bibliothécaire", RESSI no 2, août 2005) que notre pré-choix d'un logiciel libre s'est porté sur la société PMB.
1.3. Examen des offres reçues
Nous avons examiné en détail les 4 offres, sur la base des documents reçus. Chaque fournisseur est venu présenter une démonstration à Morges. Nous avons également pris contact avec d'autres utilisateurs de ces logiciels. M. Broccard a préparé un tableau comparatif très détaillé avec les différents critères et questions.
Le logiciel PMB est ressorti au premier rang du tableau comparatif. En effet:
- D'un point de vue financier, ce logiciel est très nettement moins cher que les autres, puisqu'il n'y a aucune licence à payer. Les coûts ne concernent donc que des prestations de service (migration des données, installation et configuration du système, formation des utilisateurs).
- La migration de la base de données comportait un risque plus élevé qu'avec la solution Aloès. Nous avons toutefois jugé que ce risque était acceptable du fait qu'une ancienne collaboratrice (formatrice) d'OPSYS travaille pour PMB; en outre ce logiciel utilise à la base le même format de données qu'OPSYS (norme UNIMARC).
- Concernant les exigences techniques, nous avons jugé que PMB satisfaisait nos besoins, bien qu'il soit légèrement inférieur à la solution Aloès.
- Lors de la démonstration, nous avons été séduits par la simplicité d'utilisation, l'aspect graphique très logique et convivial de la solution PMB. Nous ne sommes pas parvenus à "piéger" les représentants de cette société malgré nos questions très pointues sur certains aspects (notamment la structure notices/exemplaires et les cas de réservations avec plusieurs exemplaires et plusieurs réservants).
- Le logiciel PMB est implanté dans environ 150 sites connus de PMB Services (donc non-compris les téléchargements libres), mais il n'y a que très peu d'utilisateurs en Suisse, et aucun comparable à notre bibliothèque: nous avons donc pris le risque d'être la première bibliothèque publique de cette importance à utiliser toutes les fonctions du logiciel. Nous avons pris contact notamment avec les bibliothèques suivantes (toutes en France):
- Montereau-Fault-Yonne (Seine et Marne): environ 45'000 titres, sur deux sites, mais ils n'utilisaient pas encore les fonctions de prêt (1ère informatisation).
- Eckbolsheim (banlieue de Strasbourg), commune de 5'900 habitants. La bibliothèque possédait à cette époque environ 28'000 titres, mais ne faisait pas autant de prêts que Morges.
- Communauté de communes de Cognac (Charente): environ 10'000 documents répartis sur trois sites (Ars, Louzac et St-Brice).
- Le CNL (Centre national du livre, à Paris), qui a réalisé avec succès une migration depuis OPSYS 8.21 (mais ce n'est pas une bibliothèque publique).
2. Mise en route du nouveau logiciel
2.1. Migration de la base de données et formation des utilisateurs
Le choix de PMB a été accepté par la Municipalité en octobre 2007. Dès cette date nous avons été en contact avec PMB pour la mise au point de la migration. Nous avons eu la chance de pouvoir tester le système sur un nouveau serveur, tout en gardant en exploitation OPSYS 8.21 sur l'ancien serveur (qui a été mis hors service plus tard).
La Bibliothèque a été fermée pendant une semaine, du 17 au 21 décembre 2007. Pendant ces cinq jours nous avons accueilli M. Didier Bellamy de PMB Services pour:
- la formation de l'ensemble du personnel (sur une base de données de test);
- le paramétrage détaillé (et la formation du soussigné à l'administration du système);
- la préparation de la migration: plusieurs essais ont été effectués, et il s'agissait chaque fois pour nous de tester la qualité des données migrées et d'indiquer les corrections à apporter.
Après plusieurs tests suivis de corrections et adaptations, le système a été mis en exploitation le vendredi 11 janvier 2008.
Avec le recul, je pense que nous aurions dû consacrer plus de temps à cette phase délicate, et la séparer en deux phases distinctes:
- premièrement le paramétrage et la préparation de la migration (pendant 3 à 5 jours; comme cette phase ne concerne pas l'ensemble du personnel, on aurait pu pendant ce temps garder la bibliothèque ouverte);
- ensuite la formation du personnel pendant 3 à 5 jours (qui aurait été plus efficace sur une base de données provisoire mais avec nos données et "nos" paramètres).
2.2. Correction des problèmes créés par la migration
Pour différents problèmes "mineurs", nous avons estimé que les corrections pouvaient être apportées après la migration définitive. On trouvera ci-après la description des problèmes les plus importants.
Articles rejetés
Dans le système OPSYS, les articles rejetés étaient saisis entre parenthèses à la fin du sous-champ (titre propre, collection, etc.), et le logiciel les replaçait en tête dans les éditions ISBD. PMB fonctionne simplement avec une liste de mots-stop. PMB Services a pu adapter la base en remettant tous ces articles en tête des sous-champs. Quelques cas spéciaux ont dû être traités à la main, et nous avons dû renoncer à la subtile distinction entre "De" article ou préposition, mais il n'y a pas eu de réclamations ni du public ni des catalogueurs à ce sujet...
Plusieurs titres d'auteurs différents
Ce genre de cas, peu fréquent et utilisé surtout dans les documents sonores (différentes œuvres de différents compositeurs), était traité avec la fonction "tableau d'affectation" d'OPSYS, qui permettait de saisir en vrac tous les titres puis tous les auteurs, et de relier ensuite les bons auteurs aux bons titres dans les éditions ISBD. Ces cas n'ont pas pu être traités de manière 100% satisfaisante par PMB, qui prévoit dans ce genre de situation la création de notices filles. Nous devrons donc reprendre "à la main" 217 notices et les transformer en créant des notices filles.
Fonctions des auteurs secondaires
Les fonctions ("éd.", "réal.", "dir.", etc.) sont définies dans un fichier d'autorité avec un code UNIMARC et le libellé de la fonction. La migration a bien repris les codes UNIMARC (codes de 3 chiffres), mais nous n'avions pas les mêmes codes que PMB. Les codes PMB sont corrects, ce sont ceux qui continuent à être mis à jour par la Bibliothèque de France, gardienne de cette norme. Il s'est avéré que nous les avions un peu trop "bricolés"; d'autres codes manquent dans la liste UNIMARC, notamment pour les non-livres (instruments de musique, tessitures, fonctions du cinéma: réalisateur, etc.). Nous avons donc dû reprendre à la base cette liste de fonctions et PMB a pu adapter nos données selon nos souhaits; nous avons opté autant que possible pour les codes UNIMARC "officiels" et n'avons ajouté des codes personnalisés que si c'était impossible de faire autrement.
Vedettes matières et indexation décimale
Notre système de vedettes-matières ne rentrait pas dans le cadre standard de PMB, qui prévoit plutôt d'une part un système de mots-clés (non structurés et non contrôlés), et d'autre part des "catégories" et une indexation décimale structurées de manière hiérarchique. Nos vedettes-matières (de type Blanc-Montmayeur) n'étaient, pour des raisons historiques, que partiellement structurées en sous-champs (tête de vedette / sous-vedette). Nous avons finalement décidé de tout remettre "à plat" (sur un seul niveau), et nous avons perdu dans cette aventure quelques renvois "voir" ou "voir aussi".
Nous n'utilisons donc pas le champ des mots-clés. Nous avons créé trois "thésaurus" dans le champ des catégories, soit: les sujets, les centres d'intérêt et les genres (correspondant aux anciens champs 610, 901 et 902 d'OPSYS), sans utiliser la possibilité de créer des hiérarchies. Nous utilisons également le champ "Indexation décimale", également sans hiérarchie.
L'idéal serait bien entendu de verser toutes nos vedettes matières dans les mots-clés et de renoncer complètement au contrôle du vocabulaire. Mais pour cela il faudrait avoir une indexation décimale mieux structurée: nos indices n'ont jamais été définis dans le but d'être utilisés pour une recherche publique (indices différents d'une section à l'autre, pas de structure arborescente formalisée, pas d'index alphabétique). On s'y mettra peut-être le jour où nous n'aurons plus rien d'autre à faire...
2.3. Mise en route de l'OPAC
L'accès public au catalogue par Internet n'a pu être ouvert qu'en février 2009, plus d'une année après la migration. Ce retard est dû en partie aux difficultés rencontrées pour définir des règles d'accès au niveau du pare-feu communal. L'OPAC fonctionne bien et permet également aux usagers de consulter leur compte (liste des documents en prêt, etc.) et d'effectuer des réservations ou prolongations.
2.4. Adaptations demandées pour répondre à nos besoins
Plusieurs petits problèmes ont pu être réglés très rapidement. D'autres nous ont donné plus de fil à retordre mais sont maintenant résolus de manière satisfaisante.
Il faut relever que, de manière générale, nous devons toujours énormément insister et patienter pour obtenir du "sur-mesure". Nous n'avons pas le personnel disponible pour écrire nous-mêmes les requêtes SQL qui nous permettraient d'extraire des données selon des critères personnalisés: il faudrait pour cela maîtriser le langage SQL et surtout connaître toutes les tables de données, leur contenu et leurs liens.
Toutefois, étant donné les tarifs de maintenance très bas (moins de 1000 fr. par année), nous ne pouvons en aucun cas en vouloir à la société PMB Services. Ce serait vouloir le beurre et l'argent du beurre !
Confusion entre section et localisation
Au début de 2007, nous avons paramétré la base en ne créant que deux sections (adultes et jeunesse) et deux localisations (idem). Afin d'obtenir des statistiques détaillées de prêt et d'acquisition, nous avons constaté que ce n'était pas la bonne solution. PMB nous a écrit les requêtes nécessaires pour créer des sections plus détaillées en fonction du 1er caractère de la cote. Nous avons donc maintenant la situation suivante:
- La "localisation" PMB correspond en fait à nos sections: adultes (1er étage) et jeunesse (2e étage).
- La "section" PMB correspond à un "rayon" au sens large, un groupe de documents identifiés en gros par le début de la cote: les 9 classes de la CDU, les romans / romans policiers / romans fantastiques et de science-fiction, les documents sonores / audio-visuels, etc.
En partie à cause de cette confusion, nous avons eu beaucoup de peine à obtenir de PMB les requêtes nécessaires pour effectuer nos statistiques: ce n'est qu'après moult rapports, méls et téléphones que nous avons pu finalement (à fin décembre 2008 !) recevoir ce que nous voulions.
Cette structure localisation/section permet également d'utiliser la recherche arborescente de l'OPAC (on clique d'abord sur la localisation, puis sur la section).
Alertes sonores au prêt
OPSYS 8.21 n'émettait une alerte sonore qu'en cas de problème (exemplaires avec message, retours en retard, abonnements échus). Nous avons finalement renoncé à ces alertes sonores pour deux raisons:
- PMB ne pouvait activer l'alerte sonore que dans certains cas: nous avions donc le choix entre une alerte sonore systématique pour chaque prêt ou retour (avec des sons différents selon la gravité des cas), ou alors le silence total... D'autre part, il semble que ces alertes ralentissaient un peu les temps de réponse. Nous avons donc préféré le silence !
- Par contre le système affiche les messages d'alerte en gros et en rouge sur les écrans, et nous nous sommes plus ou moins habitués à ce système (mais il y a un risque d'erreur, par exemple pour les documents prêtés et qui comportent un message du type "annexe" ou "2 CD", etc.: dans ce genre de cas, si la personne au prêt ne regarde pas son écran et oublie de valider le message, le prêt n'est tout simplement pas enregistré).
Problèmes non résolus, adaptations non obtenues
Plusieurs problèmes ou adaptations demandés ne sont pas encore résolus à fin 2008:
- Lenteur des temps de réponse: par rapport à OPSYS, nous constatons que les temps de réponse sont légèrement plus lents. Ceci est dû semble-t-il au fait que PMB ne peut pas accorder de priorité aux transactions de prêts (ce qui était possible avec OPSYS). Le problème des temps de réponse a peut-être été sous-estimé au moment de la comparaison des logiciels; il est cependant difficile à évaluer lors d'une simple démonstration.
- Affichage de la localisation des exemplaires: dans les produits imprimés (lettres de rappel et de réservation), la localisation a pu être ajoutée suite à notre demande. Sur les écrans, elle est affichée aussi bien dans le catalogue (interne) que dans l'OPAC. Par contre elle n'apparaît pas dans la liste des prêts en cours (il faut cliquer sur le no d'exemplaire ou ouvrir une liste de prêts PDF pour la voir), ce qui est un peu gênant.
- Nous n'avons pas encore pu obtenir toutes les éditions souhaitées. Nous souhaitions par exemple pouvoir extraire des données d'exemplaires et les exporter sous forme de tableaux Excel, avec des données qui ne sont actuellement pas accessibles par les instruments de recherche standards de PMB, notamment (pour les exemplaires): la date de création, la disponibilité (disponible / en prêt), la date du dernier prêt, le nombre de prêts. Ces extractions ne fonctionnent pas encore correctement.
3. Conclusion
De manière générale, on peut dire que le "noyau" du système (prêt, catalogage, recherche) fonctionne bien. Le personnel s'est très vite adapté au nouveau logiciel. Je pense que ce produit convient bien à notre type de bibliothèque: il répond parfaitement aux besoins d'une bibliothèque de lecture publique, et il faut relever son aspect convivial et sa simplicité d'utilisation.
Mais la mise en œuvre a été ardue: il a fallu (et il faudra encore) être persévérant et patient pour obtenir les indispensables adaptations (statistiques, produits imprimés, extraction et exportation de données). Nous regrettons donc (bien que nous le comprenions) le manque de disponibilité de la société PMB Services.
Par rapport à l'ancien logiciel OPSYS 8.21, il y a une réelle amélioration; le problème des temps de réponse, un peu plus lents, nous pose toutefois des problèmes en cas de forte affluence.
Par rapport au logiciel Aloès, PMB est certainement un peu moins complet, moins paramétrable. Mais la différence de prix est si importante que, même si ce critère ne comptait que pour 20% dans notre évaluation, elle a été rédhibitoire pour OPSYS. Et, après seize mois d'utilisation, nous ne pouvons que constater que le logiciel PMB répond assez bien à nos besoins.
4. Adresses
Ville de Morges - Case postale 272 - 1110 Morges 1 - http://www.morges.ch/
M. Philippe Broccard, responsable du Service informatique - philippe.broccard@morges.ch
Bibliothèque municipale de Morges - Place du Casino 1 - 1110 Morges
- informations générales: http://www.morges.ch/biblio
- catalogue en ligne (OPAC): http://biblio.morges.ch/
M. Luc Jolidon, responsable de la Bibliothèque - luc.jolidon@morges.ch
PMB Services - 24 & 26, place des Halles - F 72500 Château du Loir - http://www.sigb.net/
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Exemple de sommaire
Ressi — 29 juin 2009
<p class="titre1">Sommaire - N°1, Janvier 2005
</p>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">Editorial no.1 </a>
</li>
</ul>
<p class="important">Etudes et recherches :
</p>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">Etude et recherche 1</a> - Jacqueline Deschamps
</li>
</ul>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">Etude et recherche 2</a> - Jean-Philippe Accart
</li>
</ul>
<p class="important">Comptes-rendus d'expériences :
</p>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">Le compte-rendu d'expérience 1</a> - Michel Gorin
</li>
</ul>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">Le compte-rendu d'expérience 2</a> - Michel Gorin
</li>
</ul>
<p class="important">Evénements :
</p>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">L' événement 1 </a> - Michel Gorin
</li>
</ul>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">L' événement 2</a> - Thomas Mandl
</li>
</ul>
<p class="important">Ouvrages parus en science de l'information :
</p>
<ul>
<li><a href="http://www.ressi.ch/node/">L' ouvrage 1</a> - Stephan Hollander
</li>
</ul>
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N°4 octobre 2006
Ressi — 17 juin 2009
Sommaire - N°4, Octobre 2006
Etudes et recherches :
- L'intérêt d'évaluer tout système de Records management: enseignement de la pratique dans un département de l'Etat de Genève - Céline Tissot
- Musique en ligne : la discothèque publique face à la médiathèque universelle? - Florent Dufaux
Comptes-rendus d'expériences :
-
Stratégie de veille technologique :l’Institut marocain de l’information scientifique et technique au service de l’industrie marocaine- Hanan Erhif et Lamyaa Belmekki
Evénements :
- « L’information au service de l’innovation » - François Courvoisier, Jacqueline Deschamps et Françoise Simonot
Ouvrages parus en Science de l'information :
N°6 octobre 2007
Ressi — 17 juin 2009
Sommaire - N°6, Octobre 2007
Etudes et recherches :
- « Fontaines de connaissance » ou « musées du livre » ?... Les bibliothèques municipales selon leurs non-usagers - Olivier Moeschler
Comptes-rendus d'expériences :
- Une enquête qualitative auprès des publics de BiblioSciences à l’Université de Genève - Florence Muet
Evénements :
- Veille et marketing : mieux maîtriser les paramètres de son marché. Compte-rendu de la 4ème journée franco-suisse en Intelligence économique et veille stratégique - Jacqueline Deschamps
Ouvrages parus en science de l'information :
Editorial no.9
Ressi — 2 juin 2009
Editorial no.9
Vous avez sous les yeux le numéro 9 de la Revue électronique suisse de science de l’information.
Dans ce numéro, vous pouvez lire un article proposé par Luc Jolidon, responsable de la Bibliothèque municipale de Morges : PMB à la Bibliothèque municipale de Morges. L’auteur nous fait part de son expérience d’implantation d’un nouveau logiciel Open source pour la gestion d’une bibliothèque comprenant 30’000 documents environ et 100’000 documents prêtés chaque année. Dans un article très complet, l’auteur nous relate les différentes phases qui ont présidé au choix du logiciel, les problèmes rencontrés et comment ils ont été surmontés. Séverine Dick nous propose ensuite un article sur Les seniors et la lecture. Il s’agit d’une réflexion menée à la Bibliothèque de la Ville de Delémont dans le cadre d’un travail de Bachelor pour la Haute école de gestion de Genève. Dans son article, l’auteur s’est attachée à définir son public cible, a connaître ses attentes et ses besoins mais a également cherché des informations sur des services existant en Europe et dans les pays anglo-saxons. L’article se termine par un catalogue de réalisations possibles. Aymon Othenin-Girard et Karine Pasquier, respectivement étudiant et assistante d’enseignement à la Haute école de gestion de Genève relatent un Voyage d’études à Londres des étudiants de deuxième année. Les étudiants ont pu visiter la British Library et l’Idea Store de Whitechapel avant de suivre les travaux du Congrès Online Information 2008. Les commentaires de ces jeunes gens, bientôt professionnels, nous montrent leur enthousiasme et leur intérêt à la fois pour des institutions prestigieuses et parfois centenaires et pour les nouvelles technologies et les dernières tendances en la matière. Les photos d’Estelle Beck apportent à cet article un intérêt supplémentaire.
En ces temps de transformations technologiques, sociales et culturelles, il est plus que jamais important que les chercheurs en science de l’information, ceux qui sont engagés dans l’éducation des futurs professionnels, mais aussi les professionnels actifs dans les services d’information documentaires, fassent part de leurs réflexions et montrent le dynamisme des institutions. La revue suisse de science de l’information s’efforce de promouvoir les travaux de recherche menés en Suisse tout en restant toujours ouverte aux travaux de collègues étrangers.
Nous remercions les auteurs qui ont contribué à ce numéro et nous comptons sur vous, lecteurs et auteurs, pour continuer à assurer la publication de RESSI.
Le Comité de rédaction
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La Théorie sur la "voie verte" de l’Open Access
Ressi — 9 décembre 2008
Jocelyne Jerdelet, CERN, Genève
Sandrine Reyes, CERN, Genève
Résumé
Le domaine de la physique des particules a toujours œuvré pour la mise à disposition des résultats de recherche par la diffusion des pré-tirages. Ceux-ci étaient déjà distribués sous forme de document papier bien avant l’ère d’Internet. Depuis la Convention du CERN en 1953, les pré-tirages ou prépublications rédigés par les physiciens théoriciens ont été conservés, classés puis catalogués dans la base de données du Service d’Information Scientifique (SIS) et, par la suite, numérisés. Etudiée de façon rétrospective, cette littérature grise aujourd’hui stockée sur le serveur du CERN, est mise en ligne et devient ainsi librement accessible à toute la communauté scientifique. On parle de « voie verte » de l’Open Access.
La theorie sur la «voie verte» de l'Open Access
1. Le libre accès – Open Access (OA)
Le mouvement du libre accès désigne l’ensemble des initiatives prises pour une mise à disposition des résultats de la recherche au plus grand nombre, sans restriction d’accès (libre et gratuit) pour les lecteurs, que ce soit par l’auto-archivage ou par la création de revues en libre accès.
- L’auto-archivage sur un serveur institutionnel ou sur une page personnelle, communément appelé “la voie verte”, consiste à déposer par les auteurs une copie de leur article publié dans des archives électroniques en libre accès, avec l’accord de l’éditeur.
- La publication dans des revues scientifiques en libre accès communément appelée “la voie or”, doit satisfaire à des exigences qualité, garanties par un comité de lecture. Son mode de financement permet une diffusion sans restriction d’accès et d’utilisation.
Le développement d’Internet, l’arrivée du World Wide Web (WWW), l’explosion des documents électroniques, l’augmentation du prix des abonnements des périodiques et le besoin d’accéder plus facilement et plus rapidement à l’information, sont les principaux facteurs qui ont contribué au développement de l’Open Access (OA).
Ce mouvement prend son essor en décembre 2001 à Budapest, lors d’une rencontre restreinte parrainée par l’Institut pour la Société Ouverte (Open Society Institute, OSI) [1], qui vise à harmoniser les différentes initiatives jusque là disparates.
Par la suite d’autres rencontres ont eu lieu, donnant naissance à trois textes fondateurs appelés "3B".
- « Budapest Open Access Initiative (BOAI) » [2] - Février 2002 L’initiative de Budapest recommande deux stratégies pour le libre accès : La « voie verte » et la « voie or ».
- « Bethesda Statement on Open Access Publishing (OAP) » [3] – avril 2003 La déclaration de Bethesda définit provisoirement la publication en libre accès.
- « Berlin Declaration Open Access to knowledge in the Sciences and Humanities » [4] – octobre 2003 La déclaration de Berlin sur le libre accès à la connaissance en sciences exactes, en sciences de la vie, sciences humaines et sociales s’engage à promouvoir et à soutenir la diffusion gratuite de la connaissance via Internet. Cette déclaration est alors signée par le CERN.
2. Open Access au CERN (1)
Depuis sa création, le CERN a toujours activement soutenu les principes de l'Open Access. Sa Convention, adoptée le 1er juillet 1953 par 12 Etats Membres (2) , stipule que « les résultats de ses travaux expérimentaux et théoriques [de l’Organisation] sont publiés ou de toute autre façon rendus généralement accessibles » [5].
En 1989, Tim-Berners Lee, scientifique au CERN, invente le World Wide Web [6] qui popularise l’Internet et ouvre la voie verte de l’Open Access.
En 1991, Paul Ginsparg, physicien à Los Alamos, met en place le premier serveur de documents électroniques, nommé hep-th (High-Energy Physics – Theory), première archive en libre accès connue aujourd’hui sous le nom d’arXiv (3) ou encore le serveur de Cornell car maintenu par l’Université de Cornell.
En 1993, suivant le même exemple, le CERN ouvre son propre serveur de documents électroniques en libre accès (CDS (4) - dépôt institutionnel) adapté aux besoins des chercheurs et des documentalistes. Les notices bibliographiques sont consultables via Internet sur ce catalogue en ligne, ainsi que le document accessible grâce à un lien hypertexte.
En 2005, le Comité de Direction du CERN adopte une nouvelle politique de libre accès concernant tous les résultats du Laboratoire, définie dans le document « Continuing CERN action on Open Access » [7]. Les auteurs sont encouragés à publier leurs travaux dans des revues scientifiques en libre accès.
En novembre 2006, les représentants des principales agences de financement européennes pour la Physique des Particules, de consortiums de bibliothèques et de la communauté scientifique se réunissent au CERN pour le lancement du projet SCOAP3 (5) (Sponsoring Consortium for Open Access Publishing in Particle Physics). Son but est de changer le mode de financement des futures publications en Physique des Particules. L’accès libre à ces futurs articles serait financé, non plus par les abonnements aux journaux souscrits annuellement par chaque bibliothèque mais par un fond commun constitué grâce au transfert de ces fonds. Déjà soutenu par plusieurs bibliothèques et agences de financement européennes, SCOAP3 s’organise maintenant à un niveau mondial.
3. Le Service d’Information Scientifique (SIS) du CERN et l’Open Access
Le Service d’Information Scientifique du CERN, créé en 1955, a pour mission principale d’acquérir et de gérer l’information concernant les travaux du CERN et de la diffuser à la communauté scientifique, selon la « Circulaire Opérationnelle N°6 » [8].
En 1982, le SIS informatise son catalogue par la mise en place d’un système de gestion des données bibliographiques appelé ISIS (6) fourni par l’UNESCO (7) .
En 1989, ISIS est remplacé par le logiciel ALEPH (8) [ExLibris, Israel]. Ce système intégré, plus adapté aux besoins de la bibliothèque du CERN, propose différents modules utiles pour traiter tous types de documents (Catalogage, Gestion des copies, Prêt, Circulation, Acquisition, ...).
L’arrivée du Web, la démocratisation d’Internet et les avancées technologiques telles que la numérisation de documents et la mise en place de serveurs de documents électroniques en libre accès ont bouleversé les milieux scientifiques et bibliothéconomiques.
Le SIS reçoit régulièrement, via des listes de diffusion, des documents papier, rédigés par des scientifiques du CERN et d’autres Instituts de recherches. Ces pré-tirages sont catalogués puis numérisés. Plus tard, la soumission électronique par l’auteur se substitue au catalogage de la bibliothèque. Très vite, le support papier disparaît au profit d’un document électronique. C’est alors que débute l’ère de la bibliothèque numérique.
Le SIS s’adapte et développe un programme d’importation de notices bibliographiques provenant de bases de données des Instituts collaborant avec le CERN (SLAC (9) , DESY (10) ...), de serveurs de pré-tirages (arXiv) et de pages Web (autres instituts) pour remplacer les listes de diffusions et pour offrir aux chercheurs un accès quasi unique à l’information. Ainsi les résultats de recherche du CERN et d’autres instituts sont mis à la disposition de la communauté scientifique sur l’interface CDS à travers de nombreuses notices bibliographiques accompagnées de leurs fichiers électroniques.
En 2006, le Service d’Information Scientifique s’investit d’avantage dans la “voie verte de l’Open Access” en mettant en ligne la série complète des documents consacrés à la physique théorique (TH) du Laboratoire.
4. Choix de la Série Théorie
Le choix s’est porté sur les pré-tirages de la division Théorie car cette collection est la plus ancienne (juillet 1953 à décembre 2006) et la plus prolifique du CERN, avec un total d’environ 12000 documents.
Début 2006, à la demande de la Section Gestion des Documents du SIS, ces pré-tirages sont versés par le Secrétariat de la Théorie aux Archives Historiques et Scientifiques.
Depuis 1958, cette documentation fut répertoriée manuellement par liste dans des registres tenus par le Secrétariat TH et identifiée par un numéro de rapport unique.
5. Historique du catalogage de la série TH
Ces pré-tirages sous forme papier ne furent catalogués qu’à partir de 1982. Les données furent ensuite converties en format ISBD(M) (11) dans le système de gestion informatique de données ALEPH. La numérisation, quant à elle, débute en 1990 pour les nouveaux documents.
Dès 1991, les auteurs de la théorie prennent l’habitude de soumettre leurs documents sur le serveur arXiv. A partir de 1994, pour rendre disponible cette documentation à travers le serveur du CERN, le SIS importe les métadonnées d’arXiv. Simultanément, l’institut KEK (12) au Japon réalise un travail considérable de numérisation de pré-tirages en physique dont certains du CERN. Le SIS obtient alors l’autorisation de KEK de lier leurs numérisations aux notices bibliographiques du Serveur de Documents du CERN (CDS).
6. L’objectif du projet « voie verte de l’Open Access »
Après l’analyse historique du catalogage de la collection TH, les objectifs du projet sont définis selon les critères de la voie verte de l’Open Access, et aussi selon les besoins des services du SIS et des Archives Historiques et Scientifiques :
- Pré-tirage catalogué
- Recherche de la référence de publication et mise à jour de la notice bibliographique
- Texte intégral en accès libre sur CDS
- Copie papier conservée aux Archives
7. Tâches et difficultés rencontrées
- Catalogage : après une première analyse de la collection, 9457 notices sont déjà répertoriées dans la base de données du SIS mais beaucoup restent à traiter, notamment les 2000 premiers documents. La perte de certaines données (telles que les numéros de rapports) suite aux diverses conversions informatiques, implique, avant tout catalogage de nouvelle notice, une recherche bibliographique par titre pour tous les numéros de rapports manquants. De plus avec l’évolution des normes bibliographiques (depuis ISBD(M) jusqu’au format MARC21 (13) ), l’homogénéité et la qualité du catalogage restent à vérifier sur l’ensemble des notices. Le système manuel de numérotation jusqu’en 2004 a rendu le travail du SIS plus fastidieux, car dépendant d’une recherche également manuelle.
- Numérisation : après la finalisation du catalogage des nouvelles notices, une analyse met en évidence qu’environ 50% de la collection possède un lien vers un texte intégral provenant du CERN, du serveur d’ArXiv, de KEK ou autres... Avant toute numérisation de document, une recherche dans la base de données de KEK permet une nouvelle fois l’importation de documents numérisés. Cette tache achevée, 2527 documents restants doivent être équipés d’un code-barres, code unique d’identification sur le serveur du CERN, en vue d’être scannés.
- Standardisation et extraction de données : pour plus d’efficacité, les liens vers les fichiers des documents à numériser par le SIS sont ajoutés globalement dans les notices grâce à une extraction de données.
- Vérification des liens URL : une fois la numérisation terminée, un contrôle final de tous les liens URL est effectué sur l’ensemble de la collection pour détecter d’éventuels fichiers corrompus.
- Recherche de Références de Publication : afin d’enrichir le catalogue, des recherches sont entreprises dans différentes sources, bases de données ou moteurs de recherche tels que INSPEC (14) , SPIRES (15) , GOOGLE (16) pour enrichir au maximum les notices bibliographiques avec les références de publication (journaux, comptes-rendus de conférences).
- Enquête auprès des auteurs : à la fin de l’exercice, 267 références de pré-tirages ne sont pas disponibles en Open Access car ces documents n’ont jamais été versés au Secrétariat TH. Une enquête auprès des auteurs est menée en vue d’obtenir un exemplaire papier, un fichier électronique ou une référence de publication. Sur 167 courriers électroniques envoyés, 29 auteurs ont répondu positivement.
La difficulté résulte essentiellement au fait que beaucoup de ces pré-tirages datent des premières années du CERN et qu’il n’est pas aisé de rentrer en contact avec ces auteurs.
8. Evaluation finale de l’analyse
Depuis le début du CERN, la production de pré-tirages de la division Théorie a été en constante augmentation. Aujourd’hui, cette collection représente 11780 notices disponibles sur CDS, parmi lesquelles :
- 9457 Notices initialement existantes et vérifiées
- 928 Nouvelles notices cataloguées
- 1395 Notices recherchées et identifiées comme série TH
Une grande majorité de ces documents, soit 10145, sont des articles publiés dans des journaux scientifiques ou dans des comptes-rendus de conférences, 1579 n’ont jamais été publiés et le reste étant des documents tels que des rapports, des livres, des comptes-rendus de conférences et des thèses.
Actuellement, suite aux différentes recherches, enquêtes et numérisations effectuées, 98% de la collection Théorie est disponible sur CDS en Open Access : http://cdsweb.cern.ch/collection/CERN-TH
L’analyse complète de la collection Théorie a nécessité 3520 heures de temps d’étude, soit 2 Equivalents Plein Temps (EPT) et 250 heures de numérisation (2527 documents), soit 0.15 Equivalent Plein Temps (EPT).
9. Conclusion
La diffusion des résultats de recherche scientifique, d’abord effectuée par des Sociétés Savantes, est aujourd’hui diffusée, généralement, par des journaux à la publication parfois tardive et aux abonnements onéreux. Elle reste donc réservée à un ensemble de chercheurs privilégiés. Le choix du SIS, de favoriser l’accès libre aux prépublications scientifiques, résulte d’une volonté de transmettre par un moyen efficace et économique la connaissance et l’évolution des progrès de la science. Cette mise à disposition gratuite et plusieurs mois avant la publication de ces pré-tirages, représente un intérêt particulier, notamment en Physique des Particules.
Commencé en 2006, ce projet de mise en ligne dans CDS et de conservation des documents aux Archives Historiques et Scientifiques du CERN doit s’appliquer à la totalité des collections de pré-tirages du CERN (rétrospectives et courantes). Ainsi ces prépublications pourront être réutilisées, copiées, téléchargées, imprimées, archivées, consultées à distance, offrant aux utilisateurs rapidité, fiabilité, facilité d’utilisation et gratuité de l’information.
Le développement et la généralisation de la voie verte de l’Open Access au sein des dépôts institutionnels permettraient d’assurer, préserver et pérenniser l’accès à la totalité des résultats scientifiques, sans limitation d’utilisation, sous l’unique contrôle des instituts et ceci dans un esprit d’économie non négligeable.
10. Notes
(1) CERN : Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire - http://cern.ch
(2) 12 Etats Membres en 1953 : Belgique, Danemark, France, Grèce, Italie, Norvège, Pays-Bas, République Fédérale Allemande, Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord, Suède, Suisse, Yougoslavie.
(3) Serveur arXiv - http://arxiv.org/
(4) CDS : CERN Document Server - http://cdsweb.cern.ch/
(5) SCOAP3 - http://www.scoap3.org/
(6) ISIS : "Integrated Set for Information" est un système de gestion de catalogage.
(7) UNESCO : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization - Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture.
(8) ALEPH : "Automated Library Expandable Program" est un logiciel de gestion intégré des bibliothèques, développé par l’université de Jérusalem et produit par la société Ex-libris.
(9) SLAC : Stanford Linear Accelerator Center, Université de Stanford, Californie, USA.
(10) DESY : Deutsches Elektronen-Synchrotron, Hamburg, Allemagne.
(11) ISBD(M) : International Standard Bibliographic Description (description bibliographique internationale normalisée). (Il s'agit d'un ensemble de normes internationales de description de catalogage définies par l'IFLA, Fédération Internationale des Associations de Bibliothécaires et d'Institutions).
(12) KEK : High Energy Accelerator Research Organization, Tsukuba, Japan.
(13) MARC21 : « Machine – Readable Cataloguing » Format standard pour le stockage et l’échange de notices bibliographiques maintenu par « The Library of Congress » - Washington DC.
(14) INSPEC - http://www.theiet.org/publishing/inspec/
(15) SPIRES - http://www.slac.stanford.edu/spires/
(16) GOOGLE - http://www.google.ch/
11. Bibliographie
[1] Open Society Institue (OSI) & Soros Foundation Network - http://www.soros.org/about
[2] Budapest Open Access Initiative (BOAI), février 2002 - http://www.soros.org/openaccess/fr/read.shtml
[3] Bethesda Statement on Open Access Publishing (OAP), avril 2003 - http://www.earlham.edu/~peters/fos/bethesda.htm
[4] Berlin Declaration Open Access to knowledge in the Sciences and Humanities - http://oa.mpg.de/openaccess-berlin/berlindeclaration.html
[5] La Convention pour l’établissement d’une Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire (CERN), adoptée le 1er juillet 1953 par 12 Etats Membres - http://cdsweb.cern.ch/record/330625
[6] Histoire du World Wide Web - http://info.cern.ch/default-fr.html
[7] « Continuing CERN action on Open Access » CERN-OPEN-2005-006 – Altarelli, Guido - http://cdsweb.cern.ch/record/828991
[8] Circulaire Opérationnelle N°6 - http://open-access.web.cern.ch/Open-Access/oc-06.pdf
Un exemple de coopération et de solidarité: les 10 ans d’« Archivistes sans Frontières »
Ressi — 9 décembre 2008
Alfred Garcia i Puig, Vice-Président d’Archivistes sans Frontières
Résumé
Conférence donnée par Alfred Garcia i Puig, dans le cadre d’une séance organisée par le Forum des Archivistes – Genève, le 26 novembre 2007, autour du thème « Archives solidaires ». Texte revu et adapté par Giovanni Gregoletto et Didier Grange
ace à cette situation, la communauté archivistique a commencé à entreprendre de timides actions. Au début, essentiellement par le biais de déclarations des conférences générales de l'Unesco (1972, 1978, 1980, 2003), des réunions du Congrès International des Archives (2004) ou encore de la Conférence Internationale de la Table Ronde des Archives (CITRA) (Abu Dhabi, 2005). Le Conseil International des Archives participe également au programme « Mémoire du Monde » de l'Unesco, coopère avec le Comité international du Bouclier Bleu (ICBS) et collabore à un projet baptisé « Archivistes Solidaires », mené par la Section d'Associations Professionnelles de Records Managers et d'Archivistes (ICA/SPA). Par ailleurs, moins connues mais non moins importantes, une multitude de collaborations entre archivistes de différents pays ont été réalisées. Il s'agit le plus souvent d'actions ponctuelles menées à titre individuel, en profitant de contacts ou d'amitiés, et reposant davantage sur la volonté que sur les moyens.
Dans ce but, le 1er mai 1998, s'est constituée à Barcelone, l'organisation non gouvernementale d'intérêt général « Archivistes sans frontières » (ci-après ASF). Il s'agit d'une organisation internationale de volontaires, à but non lucratif. Elle est orientée en priorité vers les pays qui conservent un patrimoine en danger, ainsi que vers des pays en situation de guerre ou de violence généralisée, affectés par des catastrophes naturelles ou d'autres natures. Ces priorités sont soulignées dans l'article 1 des statuts d'ASF.
Selon l'article 3 des statuts, les objectifs d'ASF sont de :
- Protéger, conserver, organiser et défendre le patrimoine documentaire en danger de disparition ou de dommage irréversible, par le moyen de coordination, de développement et de diffusion de plans, de programmes et de projets, incluant ces actions dans la sauvegarde et la récupération du patrimoine documentaire lié à la garantie des droits humains, individuels et collectifs des citoyens.
- Sensibiliser la société quant à l'intérêt de la conservation de ses archives afin de garantir le respect de ses droits et le contrôle de ses administrations.
- Offrir une aide aux projets de récupération, d'organisation, de divulgation de la fonction archivistique en accord avec les politiques archivistiques de chaque pays, tenant en compte tous les types de supports documentaires.
- Etudier, définir et diffuser les techniques de restauration les plus adéquates par rapport à chaque type de support documentaire.
- Promouvoir la culture archivistique au moyen de la formation technique dans le domaine des archives afin de pouvoir donner des conseils dans ce domaine.
- Renforcer les relations sociales, humaines et de solidarité entre les archivistes de différents pays, en vue de la protection et le respect des droits humains et des droits des peuples.
- Promouvoir une vision et un travail interdisciplinaires dans l'intervention et l'étude du patrimoine documentaire, en collaboration avec des professions propres au champ d'intervention d'ASF.
- Proposer et mener à terme toutes les actions qui sont considérées comme opportunes, similaires à celles qui avaient été menées jusque-là.
Les lignes de travail d'ASF sont:
- Promouvoir les actions au sein des archives lors des transitions politiques. Favoriser la restitution des droits collectifs et individuels, plus spécialement dans les pays qui protègent les droits des peuples et des nations, et dans ceux qui cherchent leur propre transition politique, élément qui est conditionné par l'existence de documents et de leur libre accès. En ce sens, le but est de donner ou de préserver le droit à l'intégrité de la mémoire écrite des peuples, le droit à la vérité et le droit à connaître les responsables des crimes contre l'humanité.
- Protéger les droits humains suivants: droit des familles de disparus pendant des périodes de répression, droit à la connaissance des données existantes relatives à n'importe quelle personne ; droit à l'investigation historique et scientifique ; droit à l'amnistie pour les prisonniers et les opposants politiques ; droit à la compensation et à la réparation des dommages endurés par les victimes de la répression et, enfin, droit à la restitution des biens confisqués.
- Proposer l'élaboration et l'exécution de projets de coopération internationale en matière de gestion d'archives et collaborer avec d'autres entités qui ont des compétences dans le domaine des archives, afin de trouver des solutions pour une protection adéquate des archives et du patrimoine.
- Etablir des mesures de prévention et de conservation du conditionnement physique des différents supports documentaires et proposer toutes les actions qui sont considérées comme nécessaires pour apporter à terme une amélioration dans la prévention, la reproduction, la restauration et la préservation de tous les types de supports documentaires (documentation graphique, audiovisuelle...), ceci afin d'assurer la conservation et garantir les systèmes de sécurité des bâtiments d'archives.
La première action a été l'organisation de cinq centres d'archives municipales en République de Guinée Equatoriale, ancienne colonie espagnole: Baney, Luba, Malabo, Rebola et Rabia (1998-2001). Dans un deuxième temps, ont été créées deux salles informatiques dans les villes de Malabo et Bata (2003-2004).
Puis, toujours en profitant des contacts de la Municipalité de Barcelone, un séminaire de formation archivistique basique, destiné à des personnes de quelques centres d'archives de Sarajevo, a eu lieu en 2001, dans le but de former un personnel qualifié dans les centres d'archives que la guerre avait mis à mal.
Un des projets les plus importants a été pour nous, en tant que catalans, le microfilmage et la numérisation des fonds documentaires produits par l'Evêque de São Felix de Araguaia, dans la région du Mato Grosso (Brésil), le père catalan Casaldaliga. L'évêque est une personnalité qui s'est beaucoup impliquée pour la cause des pauvres et des indigènes, et qui a gardé des relations avec des personnalités très influentes de la théologie de la Libération, des mouvements sociaux et révolutionnaires d'Amérique Latine (Fidel Castro, Monseigneur Romero, le mouvement sandiniste du Nicaragua)...
Cette documentation était menacée de disparaître, et c'est pour cette raison que l'Evêque s'est mis en contact avec ASF. Ce projet a été l'un des plus ambitieux; il a coûté 100'000 Euros, financés par la propre prélature ainsi que par la Generalitat de Catalogne. Durant deux ans, ont ainsi été numérisés et microfilmés plus de 250'000 documents, qui ont été convertis en 18 DVD et 65 bobines de microfilms. Au mois d'octobre 2006, une donation d'un jeu de copies a été faite aux Archives nationales de Catalogne.
Mentionnons également qu'en 2005 un cours d'archivistique de base a été organisé à Quito (Equateur) et l'année suivante, une étude de prospection d'archives a été menée sur l'île d'Ibo, au Mozambique.
Des projets sont actuellement en cours ; parmi ceux-ci, mentionnons les suivants:
- Le projet d'organisation des archives municipales de la Commune urbaine de Fès (Maroc, 2004-2010), qui est mené par un groupe de 24 coopérants, archivistes professionnels et étudiants du Diplôme Supérieur d'Archivistique et de Gestion des documents de l'Université Autonome de Barcelone (ESAGED). Ceux-ci ont déjà traité plus de 3,5 kml de documentation qui se trouvaient dans de mauvaises conditions de conservation, sans organisation.
- Le projet de récupération des fonds documentaires et des archives des dictatures militaires latino-américaines (2005-2008), constitue lui aussi un projet très ambitieux. L'objectif est de localiser, identifier et organiser la documentation produite par les gouvernements impliqués dans l'Opération Condor et par les entités liées à la lutte pour la connaissance de la vérité. En facilitant la localisation de documents, il devrait permettre d'identifier et de localiser les disparus et les victimes de ces régimes répressifs. Le projet vise enfin à faciliter la formation du personnel impliqué, afin de garantir la description et l'accès à cette documentation.
- Parallèlement à cette vaste entreprise, Archivistes sans frontières a convoqué à Montevideo (Uruguay) en novembre 2006, une rencontre de tous les responsables du projet de récupération du fonds documentaire et archivistique des dictatures latino-américaines. Ceci a permis d'organiser une journée consacrée aux archives et aux droits humains, organisée par ASF et les Archives de la Nation, les 4 et 5 décembre 2006, en présence de plus de 100 personnes.
- Un autre projet mené par ASF est celui de la récupération de l'histoire catalane en exil, comprenant la numérisation et l'organisation des archives des communautés catalanes à l'étranger (2006-2010). Une première étude de prospection a été faite dans cinq centres culturels catalans (Montevideo, Buenos Aires, Rosario, Mexico et La Havane), où l'on présume qu'existait préalablement une documentation plus ancienne, conséquence de l'exil provoqué par la Guerre civile espagnole.
- ASF a également participé à l'organisation des Archives nationales du peuple sahraoui (2006-2008) et donné un cours de théorie et de pratique dans les campements sahraouis de Tindouf (Algérie), avec la participation de 4 archivistes coopérants.
- Notre association a également participé au Conseil Consultatif International de support au projet de Récupération des archives historiques de la Police Nationale du Guatemala (2007). Tous ceux qui travaillent sur ce projet sont considérés par les militaires retraités comme des ennemis. De plus, il faut tenir compte que lors des dernières élections, cet été, plus de 50 personnes ont été tuées parmi les politiques et les parents d'hommes politiques. Ces documents ont une grande valeur. Ce projet est financé actuellement par: le gouvernement suisse, le gouvernement catalan et, plus récemment, le gouvernement basque. Une copie numérisée devrait être conservée à terme aux Archives fédérales suisses.
- Enfin, mentionnons encore le projet de catalogage, numérisation et restauration de 750 affiches de la fondation Salvador Allende, en collaboration avec le Ministère espagnol de la Culture.
La première étape consiste à envoyer le plus souvent un ou deux coopérants pour réaliser une étude de prospection de la qualité des installations et de la valeur que peut contenir le fonds. Habituellement, l'ONG paie le voyage des coopérants et les hôtes se chargent des frais de logement et de réception.
L'étude de prospection est complétée d'une proposition d'action qui évalue si le projet est viable ou non, notamment en ce qui concerne son financement. Actuellement, celui-ci est à la charge de la Municipalité de Barcelone, (auprès de son bureau « Barcelone Solidaire »), du gouvernement autonome de Catalogne, (auprès des ministères de la Présidence ou de la Culture- Sous-direction générale des archives-, ainsi qu'auprès de l'Agence catalane de coopération au développement) et du Gouvernement espagnol, dont la propre Sous-direction générale des archives de l'Etat dispose d'un programme d'aide spécifique pour les archives. Enfin, l'action est également financée par l'Agence espagnole de coopération internationale.
Ces trois grands fonds de financement de projets (étatique, autonome et municipal), sont complétés par d'autres fonds plus modestes, grâce à des participations de mairies plus petites, des collaborations avec d'autres ONG ou encore des contributions d'entreprises.
Comme on l'a souligné plus haut, les deux grands champs d'action sont l'aide à l'organisation des archives des pays du tiers-monde (classification, tri, numérisation, microfilmage) et la formation de professionnels, à travers l'organisation de cours destinés aux archivistes. Ces deux activités constituent l'axe majeur des activités qui jusqu'à présent ont été menées à terme.Les autres types d'activité qui sont menées sont :
- La diffusion des activités de l'ONG dans les rencontres d'archivistes ;
- La coopération avec d'autres ONG lors des salons et d'autres événements publics (« foires de rue ») ;
- La participation à des journées organisées par d'autres organisations ;
- L'accueil de collègues en formation ;
- de matériel didactique, plus spécialement pour la formation à distance.
Naturellement, il serait injuste d'oublier qu'une grande partie de l'action est due au travail des coopérants. De ceux qui paient simplement leur cotisation à ceux qui dédient une part de leurs vacances à la coopération internationale, il existe un éventail de professionnels qui travaillent d'une façon désintéressée pour d'autres collègues, moins favorisés, qui doivent parcourir de grandes distances pour pouvoir assister à un cours. Tout cela encourage à poursuivre dans cette direction.
Dans ces actions, est impliqué un nombre important d'archivistes, que ce soit des professionnels reconnus, qui vont suivre des formations ou des étudiants, comme par exemple ceux du diplôme supérieur d'archivistique et de gestion des documents (ESAGED/Barcelone), qui ont travaillé sur le fonds des archives d'urbanisme de la commune urbaine de Fès, comme déjà mentionné plus haut.
es sections plus ou moins importantes ont été établies en Argentine, en France, en Bolivie, en Colombie, en Equateur, au Mexique, au Pérou et en Uruguay. Avec des moyens divers, ces sections ont développé leurs propres activités. Cette structure a dû cependant être réorganisée en sections pour des questions de droit international. Outre la révision des statuts, lors de l'Assemblée générale extraordinaire célébrée en juin 2007, ASF s'est constituée comme une organisation uniquement espagnole. Sa vocation est cependant internationale, l'objectif étant de créer une fédération d'ASF des différents pays qui partagent les mêmes principes communs.
Durant ces dernières années, l'organisation a publié 14 bulletins (en espagnol et en catalan) et a organisé 4 rencontres internationales.
La première, dédiée à « La protection du patrimoine documentaire dans le domaine de la coopération internationale », a eu lieu les 26 et 27 octobre 2001, dans la salle de réunion du Musée maritime de Barcelone. Tous les deux ans, ces journées sont organisées avec la vocation de devenir un lieu de rencontres de professionnels des archives sensibilisés au monde de la coopération et un espace de dialogue et de participation, afin d'examiner la problématique et la situation actuelle de la coopération internationale, dans le cadre du patrimoine documentaire (1).
Les 22 et 23 février 2003, ont été célébrées au Musée Historique de Catalogne, les deuxièmes journées, dédiées, à cette occasion, à la relation entre « Archives et droits démocratiques ».
Les journées ont été un succès, tant par le nombre de participants, presque une centaine, que par l'intérêt des interventions présentées. Celles-ci ont traité des enfants et des femmes victimes de représailles sous le Franquisme, après la Guerre Civile, travail qui a servi à la réalisation d'un reportage documentaire à la télévision catalane. On a également abordé, lors de ces journées, les actions et méthodologies du travail d'Amnesty International, de même qu'une réflexion a été portée sur le travail de documentation et de recherche d'information, étape cruciale pour initier n'importe quelle action. Une explication de la politique d'accès aux fonds documentaires (2) a suivi, ainsi qu'un exposé sur les origines et le développement de l'actuel conflit palestinien, illustré par des preuves concrètes (des documents, photographies et cartes) qui témoignent de l'importance de la mémoire et de la documentation, afin de maintenir vive l'espérance de liberté du peuple palestinien. Des questions concernant le délai juridique de l'accès à la documentation, avec en complément les exemples d'accès à quelques procès de la Guerre Civile, ont également été abordées. Enfin, deux membres d'ASF ont offert une vision des archives de la répression organisée par divers régimes militaires sud-américains contre ses opposants de gauche, connu sous le nom de « Plan Condor ».
Les troisièmes journées internationales d' « Archivistes sans frontières », consacrées au thème « Archives et développement », se sont déroulées à Madrid, les 25 et 26 février 2005.
Il a été question de l'importance que tiennent les archives, comme institution publique, dans la configuration de notre Etat de droit, posant l'existence des archives comme essentielle pour construire un réseau nécessaire pour un développement durable dans les pays du tiers-monde. Ainsi, nous prétendons apporter aux diverses initiatives menées par des organismes internationaux, par les nations elles-mêmes et par des organisations non gouvernementales, comme la nôtre, une impulsion pour le développement des archives publiques dans divers pays d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie avec la prétention de les valoriser avec un esprit critique. Aussi, une session a été consacrée à l'étude des archives produites par les institutions d'aide au développement, principalement la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.
Conjointement et parallèlement à ces journées avait lieu une conférence internationale sur le thème « Israël et Palestine : archives pour une coexistence », réalisée à partir de la présentation de fonds documentaires, d'archives et autres témoignages d'une histoire commune, ceci pour pouvoir aborder, dans la perspective d'une mémoire historique différente pour chacun de ces deux peuples, un futur de coexistence pacifique.
Plus récemment, les 9 et 10 novembre 2007, les IVèmes journées d'ASF, qui se sont déroulées encore une fois à Barcelone, ont été consacrées cette fois-ci à la fonction du coopérant dans la coopération. Le titre était « Les coopérants : l'axe de la coopération ».
Les interventions, menées par un membre de « Juristes sans frontières », ont porté sur le point de vue juridique du nouveau statut de coopérant ainsi que sur le projet de récupération des Archives nationales de la Police Nationale du Guatemala. Elles ont été suivies d'une table ronde sur la figure du coopérant avec des membres d'Intermonde-Oxfam, d'Education sans frontières, du collège officiel des médecins de Gérone et d'Archivistes sans frontières. Enfin, un juriste a présenté une intervention sur les fonds publics et la transparence des ONG.
Archivistes sans frontières est également membre du Conseil International des Archives (catégorie B) et participe au groupe des droits humains et au groupe de travail d'Archivistes solidaires (Archival Solidarity) mené par la Section des associations professionnelles de Records Management et d'archivistes du Conseil International des Archives (ICA/SPA). Il faut ajouter qu'Archivistes sans frontières a participé activement à la constitution de ce groupe de travail. La première réunion, d'où sont issus le nom et les principes directeurs, s'est tenue à Barcelone en 2001 et a été formée par Margaret Turner, présidente du CIA/SPA, Benny Haspel, qui avait mené à terme des activités de formation dans le projet « Rücksack », Nancy Marelli, comme coordinatrice, Mariona Corominas et moi-même, comme représentants d'ASF.
Ayant partagé nos propres expériences, nous avons décidé, d'un commun accord que l'objectif devait être de faciliter les contacts et de recueillir des informations sur les actions qui sont menées au niveau international, afin de les partager entre les archivistes.
L'expérience acquise par ASF a également permis d'élaborer des documents de travail tels que : le Modèle de questionnaire de prospection d'un fonds, le Formulaire du coopérant, le Manuel de gestion de projets de coopération et le Plan d'action Global 2004-2007. Ceux-ci s'avèrent nécessaires pour une meilleure coordination des personnes qui participent aux projets.
En ce qui concerne le coopérant, celui-ci est soumis à un certain nombre d'obligations :
- Le coopérant doit respecter les buts pour lesquels a été créée l'ONG.
- Le coopérant doit mener à bien le travail pour lequel il a été engagé.
- Le coopérant doit communiquer au comité de direction sur toute action ou initiative qu'il a menée à terme.
- Le coopérant doit respecter la culture, les idées politiques et religieuses et les coutumes des autochtones, même s'il ne les partage pas.
- Le coopérant doit informer de sa présence l'ambassade ou le consulat du pays où il se trouve.
- Le coopérant doit élaborer un rapport écrit sur le développement du projet mené à terme. De plus, il doit remettre ce rapport à l'institution qui a financé le projet avec le bilan économique et le matériel qui ont été générés.
ASF doit prendre à sa charge les frais de voyage, les frais sur place et l'assurance du coopérant, ainsi que s'occuper de la documentation nécessaire avant le départ de celui-ci (visa, gestion de l'hébergement....).
L'expérience est fondamentale pour corriger les erreurs, et il est certain que nous en avons commises, notamment lors des actions menées sur le terrain.
Aujourd'hui, grâce à ces enseignements, ASF peut poursuivre son action avec plus de sérénité et de sagesse, en gardant à l'esprit cette pensée de Winston Churchill : « une nation qui oublie son passé n'a pas de futur ».
Pour plus d'informations, vous pouvez consulter le site web de l'association : www.arxivers.org
(2) Les archives d'Amnesty International sont remarquables tant par la diversité de thématiques que par la rigueur et la fiabilité des données recueillies, l'objectif étant qu'une multitude de personnes et d'institutions puisse les consulter.
Intelligence économique et gestion des risques : mieux maîtriser l’incertitude.
Ressi — 9 décembre 2008
Jacqueline Deschamps, Haute Ecole de Gestion, Genève
François Courvoisier, Professeur, Haute école de gestion Arc, Neuchâtel
Françoise Simonot, Chef du département Information-Communication, IUT de Besançon
Résumé
Devant une assemblée d’une septantaine de personnes, dont une majorité de cadres d’entreprises privées et publiques, la Journée est ouverte par François Courvoisier, coorganisateur. Olivier Kubli, directeur de la Haute école de gestion de Neuchâtel, prononce des mots de bienvenue sur le thème business intelligence, ainsi qu’Alain Ribaux, conseiller communal, responsable du dicastère de l’économie et des finances, qui apporte les salutations de la Ville de Neuchâtel, par ailleurs jumelée avec la Municipalité de Besançon depuis 1971.
Intelligence économique et gestion des risques : mieux maîtriser l’incertitude.
L’intelligence des risques, par Bernard Besson
Chargé de mission auprès du haut Responsable à l’Intelligence économique à Paris, co-auteur avec Jean-Claude Possin de l’ouvrage L’intelligence des risques, Bernard Besson présente la notion de risque sous ses différents aspects. Le risque, à ne pas confondre avec une menace, est à concevoir comme une information que l’on a ou que l’on n’a pas. L’intelligence des risques fait parler des risques différents et cela a même donné lieu à un métier, le risk manager. Le risque n’est pas que statistique, il est aussi lié à des émotions.
Selon Bernard Besson, nous sommes dans le temps des risques : Bhopal, Seveso, le tsunami, la grippe aviaire, la crise des subprimes, etc., qui génèrent des angoisses pour l’avenir et des activités de prévention. On observe une évolution des mentalités : aujourd’hui on désigne les coupables. Il y a une pression forte avec le principe de précaution, l’opinion publique est solidaire des victimes. Il y a une évolution du droit et de la jurisprudence. Le risque est une réalité quotidienne. Par exemple, tout propriétaire doit produire plusieurs diagnostics pour la vente d’une maison. Le citoyen est amené à faire de « l’intelligence des risques ». Aucune petite entreprise ne peut assurer seule son intelligence des risques, mais elle peut compter sur le soutien de réseaux.
L’apport de l’intelligence économique dans la prévention des risques consiste à proposer une nouvelle conception du risque. Le danger incite à regarder différemment. L’inquiétude est un aiguillon de ce que l’on ne voit plus. La valeur d’une entreprise, c’est aussi son image, son aspect immatériel. Il y a aussi la maîtrise de la peur : les USA ont été traumatisés par le 11 septembre 2001. Depuis, il y a la norme ISO 28000 pour se préoccuper de la logistique et de la sécurité : c’est devenu un marché, avec un risque d’inflation législative.
Le risque est ce qui altère la performance de l’entreprise. Si on parle de risque, on a résolu 50% de la peur. La prévention du risque n’est pas une lourdeur supplémentaire. Il existe donc une nouvelle vision globale de l’intelligence des risques, qui se compose de quatre éléments interdépendants : la sécurité (safety), relative aux accidents et défaillances techniques ; la sûreté (security), qui relève de la malveillance ; l’environnement, englobant la pollution, les inondations, etc. ; le management, lié aux attitudes et comportements dysfonctionnels, comme par exemple une rupture d’approvisionnement.
D’après Bernard Besson, c’est l’ignorance qui est moteur de l’intelligence économique, ce n’est pas l’information. En France, il y a des associations professionnelles comme AMRAE qui a fait le référentiel pour les risk managers et leur indique en quoi l’intelligence économique les aide à pratiquer leur métier.
Pour commencer une démarche d’intelligence économique, il faut se poser les questions suivantes : « quels dangers courons-nous ? » ; « quels sont nos moyens de protection ? » ; « disposons-nous des meilleurs systèmes ? » ; « quelle est la fiabilité de nos partenariats ? ». Une entreprise qui protège ses membres, ses clients et ses partenaires renforce sa cohésion, son image et augmente sa capacité d’influence. L’intelligence des risques permet de devancer des concurrents moins avancés en la matière.
Pour bien commencer un processus d’intelligence des risques, il faut recenser et analyser tous les incidents et accidents rattachables à la sécurité, à la sûreté, à l’environnement et au management, évaluer les coûts humains et économiques liés à l’occurrence de ces risques et mettre en rapport les budgets dédiés à la protection et les préjudices subis ou évités. Il faut ensuite organiser une réunion de tous les cadres et personnels concernés à un titre ou à un autre. L’intelligence des risques passe par la prévention ou l’occurrence des risques recensés et évalués.
La France et la Suisse, notamment, sont des pays d’ingénieurs de grande qualité cindynique (science du danger). Les travaux de cindynique de l’Ecole polytechnique de Paris ont mis en évidence un processus : avant la catastrophe, il y a une chaîne de l’information et toute catastrophe s’explique par une rupture dans le traitement et l’utilisation de l’information. Les ruptures récurrentes que l’on peut identifier sont dues aux quatre types de problèmes évoqués plus haut : la sécurité, la malveillance, l’environnement ou le management. Toute catastrophe s’explique par ces quatre regards et le risque sécuritaire global est constitué par la somme de ces quatre regards.
Lors d’une catastrophe, on constate souvent que tout le monde a bien fait son métier, mais ce qui a manqué, c’est une vision globale. Dans une PME, c’est le chef d’entreprise qui doit avoir la vision globale, mais il doit être secondé par un réseau d’intelligence collective.
Bernard Besson clôt son exposé en se posant la question : est-ce que le fait de chercher à prévoir les risques peut tuer l’innovation… ?
Perception du risque et méthodes informationnelles, par Clotilde Aubertin
Clotilde Aubertin, Competitive Intelligence Analyst au Nestlé Research Center à Lausanne, présente les résultats d’une recherche sur la perception du risque par les consommateurs avec l’exemple des TFAS : les acides gras « trans ». Internet pourrait être un reflet de l’intérêt des consommateurs et permettrait d’établir une typologie des utilisateurs. Deux sujets clés sont analysés : le e-commerce par Internet et l’alimentation. Le comportement du consommateur est passé en revue, comme sa perception et la sécurité à l’égard du risque. Qu’est-ce qui a été produit sur le plan scientifique ? Quelle est la perception du risque sur une communauté académique ?
Les acides gras trans (Trans Fatty Acids) sont un procédé breveté par Procter & Gamble qui transforme l’huile en solide pour améliorer le goût. Dès 1998, la communauté scientifique émet des hypothèses sur les effets des acides gras transsur le cœur et, en 2000, le risque alimentaire est confirmé. Le Canada et les USA mettent alors en place des mesures restrictives et les restaurants informent des risques cardio-vasculaires. Les associations de consommateurs font du lobbying et sont des relais de l’industrie au consommateur final. La communauté scientifique produit des publications. Dans le processus de diffusion, les chercheurs publient, la presse et les médias relaient les scientifiques. Les consommateurs sont actifs avec le web 2.0 et cela crée une émulation. Lors des recherches en ligne, les outils choisis pour analyser les sources sont les web watchers, les alerts search engines et le text mining. Google trendsest complémentaire de la base de données Factiva. Quelques outils sont utilisés pour voir l’articulation des blogs de consommateurs les uns avec les autres. Ixxo permet de voir l’évolution du sujet à travers la blogosphère, notamment en cartographiant les blogs et leurs interactions. Des experts formulent des recommandations managériales, mais le sujet est trop scientifique et a une faible représentation sur Internet. L’analyse des blogs montre que seuls 0.05% des consommateurs se préoccupent des acides gras trans : le grand public n’a pas encore intériorisé le risque.
En conclusion, les différents types de communautés qui abordent ce sujet sont plutôt des experts, des scientifiques, des diététiciens ou des blogs plus personnels. Le web devient un outil très réactif avec l’accélération du temps, il est le reflet de la perception des consommateurs. On peut donc se poser la question de savoir comment mieux communiquer par l’intelligence économique pour réduire la perception du risque du consommateur. La réponse est peut-être dans l’amélioration de la médiation entre outils et expertise scientifique.
Evaluation des risques et système de contrôle interne (SCI) : quelles nouvelles responsabilités pour les organes de la SA ?, par Benjamin Chapuis et Bertrand Perrin
Benjamin Chapuis et Bertrand Perrin, tous deux professeurs à la Haute école de gestion Arc à Neuchâtel, introduisent leur exposé par l’aspect juridique, le droit ayant une dimension préventive qui s’impose quand il y a problème. La réglementation pour la société anonyme nécessite d’anticiper. Les administrateurs ont des responsabilités et des devoirs dont celui d’exercer personnellement leur mandat ainsi que le devoir de diligence, le devoir de fidélité et celui de respecter l’égalité de traitement entre les actionnaires. Il y a un lien de causalité entre la violation du devoir et le préjudice causé, donc il y a obligation d’exercer les attributions avec la diligence nécessaire. L’annexe aux comptes annuels doit contenir des indications sur la réalisation d’une évaluation du risque. L’évaluation du risque, selon le minimum légal, est celui que fait le conseil d’administration.
Il est important d’adapter son approche à l’exposition de l’entreprise aux risques. Le contrôle interne est un dispositif qui vise à assurer la conformité aux lois et règlements. Diverses lois, en 2002, 2003 et 2008, formalisent le contrôle interne. Le cadre conceptuel comprend diverses notions comme l’évaluation du risque, les activités de contrôle, l’information et la communication, la surveillance, la stratégie et le reporting. Benjamin Chapuis et Bertrand Perrin terminent leur exposé par quelques conseils pratiques pour la mise en place d’un SCI.
Le système de contrôle interne (SCI) et la surveillance des risques : la situation en Suisse romande, par Pierre-Alain Cardinaux
Pierre-Alain Cardinaux, responsable du siège de Lausanne de la société Ernst & Young, présente un état des lieux du système de contrôle interne en Romandie et de son rôle dans la surveillance des risques. Le conférencier nous rappelle que le SCI existe dans la loi suisse. Ainsi, il est indiqué dans cette dernière qu’une annexe aux comptes doit être partie intégrante du rapport. Elle doit indiquer la surveillance des risques dans l’entreprise, car l’organe de contrôle doit appréhender l’environnement de l’entreprise. Un guide de surveillance des risques et de contrôle interne a été édité en 2008. Les PME s’y mettent, de même que le secteur public.
Pierre-Alain Cardinaux fait part des résultats d’une enquête romande menée par Ernst & Young sur la présence des systèmes de contrôle interne dans les entreprises. Cette enquête a été effectuée en mars 2008 auprès des membres du CFO On Board. On a enregistré 60 réponses sur 120 entreprises, dont beaucoup de grandes entreprises, comme Edipresse, Implenia, Kudelski et Pargesa. 81 % des entreprises ont déjà un SCI, ou alors il est en cours d’implantation. 62 % font une évaluation du risque (ER), 55% font le minimum.
Il ressort de l’enquête que les entreprises qui possèdent un SCI suivent certaines règles : il y a intégration avec les objectifs du groupe, avec l’audit interne, avec les normes (ISO, etc.), avec la stratégie. Généralement, le soutien du Conseil d’administration est faible, le CEO est jugé bon. Au niveau de l’efficacité des contrôles, 73% des entreprises répondantes se prononcent pour un oui avec modération. 62% connaissent la nouvelle norme NAS890, contre 38% qui l’ignorent.
Les difficultés majeures rencontrées sont le fait de savoir rester pragmatique : jusqu’où aller dans la connaissance du niveau de détail ? Ou encore, quels sont les bénéfices retirés du SCI ? La mise à jour des directives constitue une difficulté, mais, dans l’ensemble, le SCI permet d’améliorer la prise de conscience des risques, de dialoguer avec les différents départements, d’avoir plus de rigueur et de visibilité, donc globalement une meilleure connaissance et évaluation des risques.
Pierre-Alain Cardinaux conclut en présentant quelques voies d’amélioration qui ont été identifiées : le tableau de bord, le suivi des risques, l’implication des cadres, le développement d’une culture d’entreprise par rapport au métier. Les trois variantes de la commission d’audit de la Chambre fiduciaire sont la description du processus, la description des risques en relation avec les comptes et la description de tous les risques pertinents. Le défi est de produire une documentation raisonnable.
Intelligence économique et risques pays, par Michel-Henry Bouchet
Michel-Henry Bouchet, directeur du Global Finance Center au CERAM à Nice, aborde l’intelligence économique et les risques pays, notamment dans le contexte de la globalisation des marchés, en tenant compte des analyses et des prévisions.
Les principaux composants des risques pays sont les risques sociopolitiques, financiers, le risque de contamination régionale et le risque systémique. Le risque économique est le plus important et l’on voit des risques nouveaux émerger, comme la volatilité et la rumeur. Ni les agences de classement, ni les primes de taux ou les décotes de dette ne sont de bons indicateurs d’imminence de crise ou du type de risque. Les classements du risque pays ont des avantages : simplicité, comparaisons entre pays et à travers le temps, condensé du consensus du marché, par exemple par les agences Moody’s et Standard & Poors.
Les agences de rating n’ont pas vu venir les crises, comme celle des subprimes. Ainsi, les crises financières émergent sans avoir été annoncées. Ces agences font parfois preuve de myopie ou de surévaluation du risque en cas de crise.
En conclusion, Michel-Henry Bouchet affirme que l’utilisation de l’intelligence économique est la clé pour transformer l’information en outil de décision stratégique, afin d’évaluer risques et opportunités et de mesurer la qualité de gouvernance des agents privés et publics. Il faut savoir croiser l’information selon différentes sources.
Par exemple, la Banque mondiale examine la gouvernance de différents pays sous les angles suivants : qualité de la gestion, perception de la corruption (avec Transparency International), indice de liberté économique, indice global de compétitivité (avec le World Economic Forum).
Le risque réputation et le risque social, par Stéphane Koch
Stéphane Koch, président de l’Internet Society à Genève, commence par dire que nous sommes tous des « cyclons » ! Sur le web, il y a du mimétisme, du clonage digital. La protection de la marque et de l’entreprise est plus que jamais d’actualité, car la valeur de l’entreprise, c’est son savoir dans l’entreprise 2.0 orientée services. Dans ce cadre, l’intelligence économique signifie anticiper, s’adapter au changement, être proactif dans la détection des risques. Il faut prendre en compte le facteur humain dans la réputation de l’entreprise.
La diffusion de l’information repose sur l’émotion suscitée chez le lecteur. C’est l’employé 0.0 à l’ère de l’entreprise 2.0. L’humain répond à la pyramide de Maslow : amour, doute, incertitude, trahison ; le web 2.0 est au service de l’individu. Le web viral peut transmettre toutes sortes d’informations. Le temps de traitement de l’information diminue avec une information qui augmente en volume. La société est constituée de blogs et d’hommes : toutes les formes de savoirs sont mobiles et dématérialisées. La blogosphère offre une grande caisse de résonnance. Le social engineering permet de réfléchir sur le sens de l’information : sur Facebook, par exemple, les amis d’aujourd’hui ne sont pas forcément ceux de demain.
Il y a une opposition entre l’entreprise fermée et la société ouverte : les modèles d’auto- organisation spontanée sans leaders se font en fonction d’objectifs, par l’opposition entre le perçu et la réalité, entre le périmètre informationnel et le périmètre stratégique. Il vaut mieux réfléchir par l’information plutôt que par les structures, et déterminer les points d’accès aux savoirs tacites et stratégiques de l’entreprise.
Pour Stéphane Koch, les moyens pour collecter de l’information sont nombreux : détective, pirate, web mercenaire, infrastructures extérieures à l’entreprise, Ethernet… Traçabilité est le maître mot. Risques en cascade et cascades de risques impliquent pour tout un chacun de s’imprégner de la culture digitale. Il faut déterminer et sécuriser les points d’accès stratégiques à l’information de l’entreprise : personnes, documents, logiciels, hardware, réseaux sans fil, clés USB, etc. ; puis évaluer les risques en fonction de la valeur de l’information traitée. Le bon réflexe, quand on sort de l’entreprise, est de n’emporter que l’information utile.
Le benchmarking pour réduire les risques, par Pierre Achard
Pierre Achard, de la Société Lifemap à Bourg-la-Reine, présente le processus du benchmarking pour réduire le risque. A tout moment, une technologie nouvelle peut faire irruption dans l’activité de l’entreprise et la surprendre. Le risque en lui-même n’est pas négatif. L’adaptation doit être permanente. Il peut être d’apparition brusque, inattendue prévisible ou non. Le risque se définit par sa probabilité de survenue. Au tipping point (le point d’inflexion), tout bascule. Le veilleur en entreprise doit maîtriser cela en termes stratégiques. Le risque peut se révéler au cours du projet : il impose une réaction d’adaptation pour retrouver l’équilibre menacé ou perdu. La règle des 4 A est la pratique de l’intelligence économique tournée vers l’ouverture : Analyser, Adopter, Adapter, Avancer.
Selon Pierre Achard, le risque maîtrisé, c’est la résolution de problème, saisie des opportunités, anticipation, avancement, progrès. Le benchmarking, c’est un input et un output avec un processus qualitatif à améliorer : identifier le meilleur de la classe et ses meilleures pratiques. Le benchmarking des risques n’est plus seulement un processus, mais l’identification de tous les risques et de leurs conséquences. Il devient alors le benchsetting, qui est quantitatif, global et tient compte de probabilités d’occurrence des risques à formuler pratiquement : Comment / pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Quelles sont les options possibles ? Que fait-on ?
La gestion des risques concurrentiels en B2B, par Fabien Noir
Fabien Noir, marketing manager chez Sonceboz SA à Sonceboz, avance que le principe de base est la détermination des facteurs de risques : c’est un processus holistique (valeur, philosophie, mode de management), un processus technique (organisation de la surveillance des concurrents) et un processus tactique, selon Michael Porter (agir contre ses concurrents). Dans une matrice stratégique, il faut croiser ses domaines d’activités avec ses savoir-faire de base, ses avantages concurrentiels, ses concurrents, les opportunités et les menaces du marché. A certaines intersections, on trouve des thèmes clés de surveillance, associés à des risques.
Par exemple, dans le cas d’une organisation humaine, on se trouve devant le choix d’une organisation centralisée ou décentralisée. Le processus passe par la définition des rôles de collecteur – analyste – animateur, mais aussi le training des personnes ressources et une révision selon une fréquence propre à l’organisation. Dans le cas d’une organisation technique, le processus passe par l’identification et la qualification des sources d’information internes et externes. Le cycle du renseignement reste le fil conducteur, et pour cela, la mise en place d’outils de collecte et d’analyse automatisée est privilégiée (sans négliger l’analyse humaine).
Fabien Noir relate que la mise sous surveillance d’un site web fournisseur de Sonceboz a fait apparaître une alliance stratégique critique. L’analyse des demandes d’offres de prix a mis en lumière une demande spéciale d’un client. La veille brevet donne des indications concurrentielles (qui ? quoi ?). La stratégie d’entreprise doit être définie et communiquée dans l’organisation. L’intelligence économique est un outil d’acquisition des ventes et de défense du patrimoine : elle doit donc être partie intégrante de la culture d’entreprise. Il faut une animation soutenue du processus par le marketing. L’étape du feedback est cruciale pour les outputs décisionnels.
Conclusion de la journée, par François Courvoisier
Les travaux se terminent par des remerciements à l’équipe organisatrice, ainsi qu’à Fabienne Courvoisier, adjointe scientifique, et à Antonia Jaquet, assistante de recherche, toutes deux à la Haute école de gestion Arc, qui ont chacune œuvré dans les coulisses et contribué au bon déroulement de la journée.
On peut trouver les présentations des intervenants, au format powerpoint, sur le site web de la Haute école de gestion Arc en suivant le lien http://www.he-arc.ch/hearc/fr/idma/Prestations_Services/Prestations_Services/compterenduscolloques.html.
Le 6ème colloque franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique aura lieu à l’IUT de Besançon, l’Université de Franche-Comté, le jeudi 18 juin 2009, sur le thème :
« Intelligence économique et développement à l’international »
Quels services d’information documentaire aujourd’hui ? Pistes de réflexion issues d’une Journée d’étude organisée récemment par le département Information documentaire de la HEG Genève
Ressi — 9 décembre 2008
Florence Muet, Haute Ecole de Gestion, Genève
Quels services d’information documentaire aujourd’hui ? Pistes de reflexion issues d’une Journee d’etude organisee recemment par le departement Information documentaire de la HEG Geneve
Comment évoluent les services d’information aujourd’hui, dans un environnement complètement renouvelé ? C’est à cette question majeure que le département Information documentaire de la Haute Ecole de Gestion de Genève a tenté de chercher des réponses en organisant le 25 septembre dernier à Lausanne une journée d’étude professionnelle intitulée « Services d’information documentaire : adaptations, innovations, nouveaux concepts ». L’objectif était de recueillir le témoignage de responsables de bibliothèques et de services documentaires représentatifs de nouvelles approches de la fonction documentaire, et ce dans trois domaines : la lecture publique, les bibliothèques académiques et les services documentation professionnels 1 . La présente contribution propose, en guise de synthèse des témoignages et des débats de la journée d’étude, quelques pistes de réflexion pour tenter de comprendre dans quel sens se déploie cette nouvelle vision des services d’information documentaire et de leur mode d’intervention.
On ne fera qu’évoquer ici les mutations qui rendent nécessaires ces nouvelles approches, tant elles sont déjà vécues par chaque professionnel de l’information, quel que soit son univers de travail. Force est de constater que les services d’information documentaire sont aujourd’hui pris entre trois pressions face auxquelles ils doivent se situer. Les utilisateurs, parce qu’ils ont le choix, montrent un niveau d’exigence de plus en plus élevé, à la fois sur la pertinence des services qui leur sont proposés et sur la qualité de la mise à disposition de ces services. L’avènement de la documentation numérique a fait apparaître de nouveaux opérateurs de l’accès à l’information et au savoir, dont certains sont dotés d’une force de production et de commercialisation qui tend à en faire les leaders du secteur (Google est ainsi devenu en seulement quelques années le standard de la recherche d’information). Enfin, les institutions elles-mêmes (et les collectivités qu’elles représentent), parce qu’elles financent leurs infrastructures documentaires, attendent encore plus qu’avant une contribution effective et directe de ces services à leur activité, ainsi que la preuve de cette contribution. Dans ce contexte, les services d’information documentaire sont amenés à « repositionner leurs valeurs ajoutées » pour reprendre l’expression de Ghislaine Chartron, directrice de l’Institut National des Techniques Documentaires à Paris 2 , dans son allocution d’ouverture.
Un postulat avait présidé à la préparation de cette journée d’étude : la réponse que doivent donner les services d’information documentaire à cette nécessité de confirmer leur place dans le nouvel ordre documentaire est celle de l’innovation dans les prestations proposées et du développement de nouveaux concepts de services. A l’écoute attentive des différentes contributions, l’impression générale qui ressort est qu’en fait, il ne s’agit pas toujours forcément d’innovation au sens de création de services qui n’existaient pas avant, mais plus globalement d’une vision totalement renouvelée de la fonction documentaire, qui amène à mettre en œuvre différemment des services assurés depuis finalement longtemps pour certains. Les Ideas Stores 3 continuent de faciliter l’usage de ressources documentaires pour le grand public, comme toute bibliothèque de lecture publique ; mais autrement. Les Learning Centres 4 assurent, comme les bibliothèques universitaires traditionnelles, l’accès au savoir scientifique et à la méthodologie documentaire ; mais avec de nouvelles modalités. Les services documentation professionnels ont depuis bien longtemps développé des prestations de diffusion d’information ; leur action n’est cependant plus forcément pensée de la même façon aujourd’hui.
Bien sûr, l’offre des services d’information documentaire en direction de leurs publics évolue nettement. Une première tendance est de diversifier les ressources mises à disposition. Le cas de la lecture publique est emblématique. Ainsi, le succès de la DOK Library Concept Center de Delft en Hollande 5 est fondé en bonne partie sur une multiplication des types de supports mis à la disposition des publics : des livres bien sûr, mais aussi et surtout des e-books, des supports audiovisuels (films, musique, vidéo), des jeux vidéo, etc. L’idée globale est de proposer au public des expériences plurielles d’accès au savoir ou au loisir. Les bibliothèques scientifiques diversifient également depuis longtemps leurs collections, avec une part de plus en plus importante accordée aux ressources numériques, mais aussi à des outils logiciels, des tutoriels, etc. Dans les Learning Centres, par exemple, l’objectif est de combiner un ensemble de ressources et d’outils pour que chaque étudiant puisse trouver ce qui convient à son style d’apprentissage. Un autre credo est celui de la primauté donnée aux flux d’information. Une bibliothèque n’est plus un réservoir mais un nœud de circulation du savoir. Le nom du projet de modernisation des bibliothèques de l’ONU 6 est révélateur à ce propos : il s’agit de passer « des collections aux connexions ». Le rôle du professionnel de l’information est avant tout de faciliter l’accès à l’information et ce de façon dynamique. L’exemple du centre d’information et de documentation du Comité International de la Croix-Rouge à Genève 7 illustre cette logique. A côté d’un service standard de mise à disposition de ressources documentaires pour les publics internes et externes (bibliothèque de 25 000 ouvrages, médiathèque de 120 000 photos), ce centre a fondé son développement sur la mise en place de prestations de recherches et de veille documentaire pour l’interne. Une bonne partie de l’équipe travaille ainsi à la réalisation régulière de dossiers de synthèse, de bulletins de veille thématique, de produits de surveillance à partir des bases de données médias et d’Internet, etc.
Enfin, les maîtres mots pour les services d’information documentaire aujourd’hui sont ceux de l’interactivité, du service et de la médiation. Tout est fait pour que la bibliothèque vive au rythme de l’usager et cultive en quelque sorte l’empathie avec lui. Un premier principe est celui de la simplicité : de la consultation du catalogue, des accès aux ressources, des modalités d’utilisation. Les bibliothèques sont désormais « plug and play ». Une autre clé est celle de la proximité avec l’usager. Les Ideas Stores se sont implantés à proximité des lieux de passage de leur public cible. Les études préalables à leur conception ont en effet montré que les usagers souhaitaient se rendre à la bibliothèque à l’occasion de leurs déplacements de vie quotidienne, autrement dit en même temps qu’ils font leurs courses. Les Learning Centres se définissent comme des centres de vie au sein des campus, avec des espaces modulables pour accueillir différents types d’activités et une accessibilité garantie par des horaires d’ouverture élargis. Les services d’information spécialisés garantissent une présence régulière auprès de leurs usagers, adoptant leur rythme de travail. Une autre tendance est l’adoption des modes de fonctionnement des usagers. La bibliothèque n’est plus un lieu à part, doté de règles différentes auxquels les usagers devraient se conformer. Elle adopte les modes de fonctionnement qui ont cours aujourd’hui, notamment avec les jeunes générations. Ce qui paraissait iconoclaste il y a encore peu tend à devenir la norme : intégration de cafétérias et de cafés Internet, autorisation du téléphone portable et du bruit dans certains espaces, choix de couleurs vives et de mobilier design, etc. Enfin, l’accent est mis sur la communication avec l’usager. Les services d’information documentaires s’organisent pour que les personnels soient véritablement disponibles et à l’aise avec les usagers. Dans les bibliothèques publiques, les postes de renseignement sont allégés mais mieux répartis au sein des espaces. Dans les Learning Centres, les bibliothécaires assurent une prise en charge individualisée des étudiants, notamment sous forme de tutorat documentaire. Et les équipes des services documentation spécialisés sont intégrées dans des groupes de travail avec leurs utilisateurs. Dans tous les cas, les compétences en termes de communication et de relation interpersonnelles sont favorisées et développées pour les personnels en contact avec le public.
Les évolutions sont donc nettes dans la façon de concevoir les services rendus aux publics. Mais l’apport le plus intéressant de la journée d’étude nous semble résider dans le constat d’une évolution radicale de la posture des professionnels de l’information vis-à-vis de leur activité. Au-delà de la modernisation des services rendus aux utilisateurs, c’est en fait une conception rénovée de la fonction documentaire qui se fait jour.
D’abord, les différentes évolutions dans l’offre des services d’information documentaire que nous venons de citer sont toutes liées, explicitement ou non, à une philosophie très forte du centrage premier sur l’utilisateur. C’est peut-être en bonne partie là que se situe la transformation de fonds des services d’information documentaire. La bibliothèque traditionnelle était centrée sur sa collection, qui fondait sa légitimité et organisait son fonctionnement, autour du modèle du circuit du livre. Son rôle premier était de préserver et de valoriser le savoir. La bibliothèque d’aujourd’hui fonctionne à partir de son public, part de ses attentes et de ses comportements. Il est ainsi avéré que le cœur du service d’information documentaire n’est plus la gestion de la ressource documentaire (dont par ailleurs les modalités changent radicalement, avec la documentation numérique qui tend à devenir dominante dans de nombreuses bibliothèques) mais la gestion de l’utilisateur. Une autre façon de dire ce changement radical est de considérer que le cœur de métier du professionnel de l’information n’est plus l’indexation mais la médiation. Le rôle premier du service d’information documentaire est ainsi d’animer un ensemble de dispositifs d’accès et de circulation du savoir, en adaptant ses modalités de fonctionnement aux pratiques, aux envies et aux contraintes des utilisateurs. Certes, cette logique existe déjà depuis plusieurs années, notamment avec l’adoption bien comprise de méthodologies de marketing pour penser l’offre de services aux utilisateurs. On réalise aujourd’hui qu’il ne s’agit pas d’une option mais bien d’une logique de comportement première pour n’importe quel service d’information documentaire. L’écoute des publics, l’analyse de leurs besoins, l’observation de leurs pratiques et l’évaluation de leur satisfaction deviennent alors des facteurs de réussite incontournables.
Une deuxième évolution fondamentale, extrêmement présente dans les discours de tous les intervenants de la journée d’étude, réside dans le fait que les services d’information documentaire entendent se positionner comme de véritables acteurs au sein de leur communauté (une municipalité pour une bibliothèque de lecture publique, la communauté académique pour une bibliothèque scientifique ou encore l’entreprise pour un service documentation interne) et non pas comme de simples fournisseurs. Le maître mot est alors celui de la contribution effective de ces services d’information à l’activité et au développement de leur communauté. Au-delà de la fonction documentaire, c’est ainsi le rôle social ou institutionnel du service d’information documentaire qui est mis en avant et qui dicte les règles de son activité et de son fonctionnement. Ainsi, les Ideas Stores participent très clairement à un projet global d’intégration sociale de populations culturellement défavorisées (ils sont situés dans les quartiers les plus pauvres de Londres) par l’accès au savoir et à la formation. Les Learning Centres sont conçus pour être un des outils du développement de la compétence individuelle et, au-delà, de l’intelligence collective, facteur premier de compétitivité des territoires, dans une économie de l’information. Et les deux exemples de services spécialisés présentés lors de la journée montrent bien comment leur intervention est conçue pour être plus qu’un simple appui puisqu’ils participent directement à l’activité en apportant leur compétence là où elle est utile (le service information-documentation du CICR est par exemple une des différentes structures internes actionnées dans le processus de préparation d’une mission d’intervention ; la bibliothèque de l’ONU à New York a quand à elle évolué fortement vers une mission d’apprentissage informationnel des agents de l’organisation). Une nécessité impérative pour les responsables et les concepteurs de services d’information documentaire est alors de disposer d’une véritable vision stratégique (et de s’en donner les moyens !), permettant de repérer et de comprendre la dynamique et les enjeux auxquels leur service doit répondre. Une autre conséquence réside dans le fait d’être sur un comportement très réactif. Les professionnels de l’information sont ainsi amenés à identifier là où leurs compétences peuvent être utiles et à engager eux-mêmes des propositions de service, dans une véritable logique d’acteur.
Une dernière dimension de cette nouvelle vision du service d’information documentaire, qui découle en bonne partie des précédentes, est celle d’une approche élargie et ouverte de la fonction documentaire. On parle aujourd’hui de nouveaux concepts pour les bibliothèques aussi parce que ces services vont sur des terrains où ils n’étaient pas présents auparavant, plus précisément s’articulent étroitement avec d’autres activités ou fonctions, avec l’idée globale de proposer à l’usager une porte unique d’accès à un ensemble intégré d’activités et de ressources. Pour les bibliothèques publiques et académiques, le lien est nettement fait entre information et formation, des alliances intimes de services étant proposées aux usagers autour de ces deux approches complémentaires. Les Ideas Stores proposent à leur public un ensemble complet de services reliés entre eux, allant de l’accès à des ressources documentaires à l’organisation de formations dans tous les domaines, de l’aromathérapie à la comptabilité, des arts du jardin à la création de pages web. Des salles de cours sont implantées au cœur des Learning Centres, mais aussi des cellules d’édition numérique pour les étudiants, des salles multimédia, etc. La diversification touche aussi les publics. Ainsi, l’Infothèque de l’Université Léonard de Vinci 8 située à Paris cible non seulement le public naturel des étudiants de l’institution mais étend aussi ses prestations documentaires et de formation à l’information à un public professionnel, notamment de chercheurs d’emploi. Les services documentation d’entreprise sortent également de leur mission traditionnelle de gestion des publications externes pour devenir les animateurs des dispositifs de capitalisation des connaissances, de records management et de gestion individuelle de l‘information (une des prestations mises en place par la bibliothèque de l’ONU à New York est par exemple d’apprendre aux agents à mieux gérer leur messagerie électronique).
On voit donc bien aujourd’hui que ce n’est pas (ou plus) la logique documentaire qui prime pour la conception des services d’information documentaire, mais bien la double perspective des usagers (diversité des ressources, simplicité d’accès et d’utilisation, animation et commodités, interaction et personnalisation du service) et de la collectivité (intégration sociale par le savoir et la culture pour la lecture publique ; enjeu des compétences pour les bibliothèques universitaires ; contraintes d’efficacité opérationnelle pour les entreprises ) qu’ils servent. Au final, un service d’information documentaire se définit aujourd’hui comme un dispositif catalyseur de ressources, de services et d’expertise. Sa valeur ajoutée provient de la combinaison de cet ensemble de prestations complémentaires et de relations de services multiples. Et c’est bien cette logique d’intégration qui semble fonder la place, le rôle et l’action des services d’information documentaire dans une économie de l’attention.
10. Notes
1 On trouvera un compte rendu de cette journée d’étude dans l’article : C. Bize, K. Pasquier. Services d’information documentaires. Adaptations, innovations, nouveaux concepts. Documentaliste-Sciences de l’information, vol 45, n°4, novembre 2008, pp 20-21
4 Voir celui de l’Université de Kingston, présenté lors de la journée d’étude. http://www.kingston.ac.uk

La revue Ressi
- N° Spécial DLCM
- N°21 décembre 2020
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