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Stratégie de veille technologique : l’Institut marocain de l’information scientifique et technique au service de l’industrie marocaine

Ressi — 9 octobre 2006

Hanan Erhif

Lamyaa Belmekki

 Résumé

Le présent article a pour objectif de retracer la stratégie de veille technologique que nous avons proposée à l’Institut Marocain de l’Information Scientifique et Technique (IMIST) pour servir les petites et moyennes industries (PMI) exportatrices du secteur des industries agro-alimentaires (IAA) et du secteur des industries du textile, de l’habillement et du cuir (ITHC) situées dans la région du Grand Casablanca.
Pour élaborer cette stratégie, il était nécessaire d’étudier la pratique de veille technologique et les besoins en information scientifique, technique et technologique (ISTT) de ces PMI, d’étudier certaines expériences étrangères réussies en matière de veille technologique et d’analyser la littérature produite en la matière.
Ainsi, nous avons eu recours à la méthode descriptive utilisée dans les études de besoins en information des usagers. Une enquête a été menée auprès des industriels des deux secteurs pour étudier leurs besoins en ISTT, leur pratique de la veille technologique et leurs attentes de l’IMIST.
Une autre enquête a été réalisée auprès d’organismes étrangers de renommée pour étudier leurs expériences en matière de veille technologique. Des visites ont été effectuées à l’Institut de l’information scientifique et technique (INIST), à l’Agence de diffusion de l’information technologique (ADIT) afin de compléter les données collectées.
L’enquête a révélé que les PMI étudiées, bien que conscientes de l’importance d’innover, souffrent de problèmes conjoncturels et structurels qui entravent leur développement et leur passage à l’économie de la mondialisation des échanges.
Mots-Clés: 
veille technologique information scientifique et technique intelligence économique secteur industriel Maroc
Dernière modification: 
24/06/2009

Stratégie de veille technologique : l’Institut marocain de l’information scientifique et technique au service de l’industrie marocaine(1)

Introduction

Avec la libéralisation de l’économie internationale, le Maroc a pris plusieurs mesures afin d’intégrer son économie dans le marché mondial, entre autres l’adhésion du Maroc en 1987 aux accords du GATT et en 1994 à « l’Organisation Mondiale du Commerce ». La création de la zone de libre échange avec l’Union Européenne en Novembre 1996 (Benmir, 2001) et la signature de l’accord du libre échange avec les Etats-Unis en 2004 dénotent également de la volonté du Maroc à s’intégrer dans le marché mondial.

Cependant, l’intégration de l’économie marocaine dans le marché mondial signifie la réduction des coûts d’accès des producteurs issus d’autres pays au marché marocain, et ce à cause du démantèlement tarifaire. Ces facteurs exposent les entreprises marocaines non compétitives et particulièrement les PME/PMI au danger de leur disparition du marché (Benmir, 2001).

Par ailleurs, les PMI marocaines qui représentent 93 % du total des entreprises industrielles du Maroc (Ministère de l’industrie, du commerce, de l’énergie et des mines, 2001) dont 19 % sont exportatrices, souffrent d’un certain nombre de problèmes qui handicapent leur développement et leur compétitivité.

Les obstacles afférents aux développement de la PME et qui ont un fort impact sur leur compétitivité concernent, selon la Confédération Générale des Entreprises Marocaines (CGEM), six aspects : l’information, la formation, le conseil, l’innovation, la qualité et les pratiques de gestion.

Afin de pallier ces insuffisances, la mise à niveau des PMI marocaines, et plus spécialement de la PMI exportatrice qui est le plus en contact avec le marché mondial, est impérative. La mise à niveau de la PMI exportatrice n’est, en effet, plus un choix, c’est une contrainte qui s’impose à toute industrie exportatrice soucieuse d’accroître sa compétitivité et de conquérir de nouveaux marchés internationaux.

Cette politique implique différents acteurs nationaux : les départements ministériels, les associations professionnelles, les centres de documentation et d’information, la CGEM, les Chambres de Commerce, d’Industrie et de Services (CCIS), etc.

En plus des mesures de soutien d’ordre financier, fiscal, logistique et technologique, la mise à niveau s’intéresse aussi au volet informationnel au sein de la PMI exportatrice marocaine. Il s’agit, entre autres mesures, de l’intégration de la notion de « l’information scientifique, technique et technologique : ressource porteuse d’avantages concurrentiels» dans la logique de gestion de l’entreprise marocaine et de toute la nébuleuse des nouvelles techniques de management (à titre d’exemple la veille technologique et le management de la technologie) qui sous-tendent et appuient le passage des PMI exportatrices marocaines au nouveau contexte international.

C’est dans ce sens que le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique (CNRST) a créé l’Institut Marocain de l’Information Scientifique et Technique (IMIST). Ce dernier a pour missions de soutenir et encourager l’innovation technologique, de diffuser l’information scientifique, technique et technologique (ISTT) aux acteurs nationaux et d’assurer des prestations de veille technologique au profit de ces acteurs.

Méthodologie de travail

La proposition d’une stratégie de veille technologique à l’IMIST pour servir les PMI en question a nécessité :

  1. l’étude de la pratique de la veille technologique dans les PMI exportatrices des IAA et des ITHC situées dans la région du Grand Casablanca ;
  2. l’étude de leurs besoins en information scientifique, technique et technologique (ISTT) ;
  3. la proposition à l’IMIST d’une stratégie de veille technologique pour servir les PMI étudiées.

Pour atteindre ces objectifs, nous nous sommes basées sur la technique de l’enquête sur le terrain. L’instrument de recherche qui a été utilisé pour la collecte des données sur la pratique de la veille technologique et sur les besoins en ISTT était le questionnaire administré directement aux industriels des deux secteurs étudiés.

Des discussions avec ces industriels et l’observation directe de leurs comportements informationnels (dans certaines PMI) nous ont permis d’approfondir les données collectées.

En plus des visites aux PMI, nous avons mené des entretiens avec des acteurs professionnels oeuvrant pour le compte des secteurs étudiés. Il s’agit du Ministère du Commerce et de l’Industrie (MCI), du Centre Technique du Textile et de l'Habillement (CTTH), du Centre Technique des Industries Agro-alimentaires (CETIA), de la Fédération Nationale de l’Agro-alimentaire (FENAGRI) et de l’Association Marocaine des Industries du Textile et de l’Habillement (AMITH). Ces entretiens avaient pour but d’approfondir et de recouper les données collectées sur le terrain ainsi que de s’informer sur l’activité de veille technologique que mènent ces organismes.

En outre, un questionnaire a été envoyé à des organismes étrangers de renommée en gestion de l’ISTT et en veille technologique. Il s’agit notamment du Centre de Recherche Industrielle du Québec (CRIQ) au Canada, et en France des Agences Régionales de l’Information Scientifique et Technique (ARIST), de l’Agence de Diffusion de l’Information Technologique (ADIT) et de l’Institut de l’Information Scientifique et Technique (INIST).

Dans le même sens, des visites ont été effectuées à l’ADIT et à l’INIST dans l’objectif de s’inspirer de leurs expériences. Les formations qui nous ont été assurées par ces organismes nous ont permis de compléter notre étude sur leur expérience en veille technologique.

Les petites et moyennes industries...une population à cibler

Pour ce qui est de la population cible, nous avons choisi les PMI exportatrices appartenant aux secteurs des IAA et des ITHC et situées dans la région du Grand Casablanca.

Les PMI exportatrices des IAA et des ITHC occupent le premier rang dans la classification des PMI exportatrices marocaines. Ceci en se basant sur les différentes grandeurs économiques notamment le chiffre d’affaires et la participation à la production globale (Ministère de l’industrie, du commerce, de l’énergie et des mines, 2001). En outre, les PMI représentent 93 % du tissu industriel marocain et les deux secteurs étudiés sont des secteurs piliers de l’industrie marocaine.

Dans la région du grand Casablanca, il existe 32 PMI exportatrices dans le secteur des IAA et 332 PMI exportatrices dans le secteur des ITHC. Pour notre étude, nous avons opté pour l’enquête de la totalité des PMI exportatrices des IAA, soit 32 PMI. Pour les PMI exportatrices des ITHC, nous avons procédé à un échantillonnage aléatoire qui représente 20 % de la population totale, soit 66 PMI à enquêter.

Parmi les 66 PMI des ITHC, nous avons administré le questionnaire à 59 PMI des ITHC, soit un taux de réponse de 89,39 % et à 29 PMI des IAA parmi la population totale de 32, soit un taux de réponse de 90,6 %.

L’enquête menée auprès des PMI des deux secteurs a porté sur :

  • leur degré de compétitivité et leur capacité à innover ;
  • les infrastructures informationnelles dont elles disposent ;
  • les moyens technologiques, matériels, logiciels et financiers qu’elles mobilisent pour la gestion de l’ISTT et pour la veille technologique ;
  • leurs besoins en ISTT et en veille technologique ;
  • leurs problèmes conjoncturels, structurels et informationnels ;
  • leurs attentes en matière d’ISTT et de veille technologique.

Les PMI et la veille technologique…résultats saillants

Pour les deux secteurs étudiés, l’enquête a révélé que la PMI exportatrice étudiée souffre de problèmes conjoncturels et structurels qui entravent son développement et affectent sa compétitivité. Bien que la PMI soit consciente de la nécessité d’innover, elle affirme manquer d’encouragement et d’assistance de l’Etat pour passer à l’économie libérale. Ceci est accentué, selon la PMI étudiée, par le manque de communication et de coopération entre les organismes nationaux producteurs d’ISTT. Dans cette optique, la PMI procède peu à des actions stratégiques qui comportent un risque et qui entraînent un changement radical dans sa structure et son activité.

Même si la PMI affirme que la veille technologique est une notion inconnue pour elle, elle la pratique « sans le savoir ». En effet, elle veille à ce qu’elle reste à l’affût des changements qui s’opèrent dans son environnement.

D’autre part, la PMI ne voit pas encore l’importance de bien gérer l’ISTT pour en faire une ressource porteuse de richesse. Ceci est apparent dans l’absence du profil du spécialiste de l’information dans toutes les PMI enquêtées et dans le manque de structuration de la fonction information en leur sein.

En outre, la PMI ne calcule pas la part du budget qu’elle consacre aux activités informationnelles et aux activités de R&D.

En ce qui concerne les sources d’ISTT utilisées, la PMI affirme manquer d’information sur l’existence et l’intérêt de ces sources. Ceci justifie le manque d’exploitation des sources d’ISTT par les deux secteurs étudiés. Dans le même cadre, elle affirme être bien informée en nouveautés relatives aux matières premières et aux équipements et ce grâce aux visites des fournisseurs et à sa participation aux manifestations (salons, foires, etc.).

La principale révélation relative aux sources utilisées par les PMI étudiées demeure la non utilisation du brevet. En effet, elles n’utilisent pas, sinon sous-exploitent le brevet et ne traduisent pas les informations techniques qu’il contient en des actions d’innovation.

En ce qui concerne les moyens technologiques et matériels de la PMI étudiée, l’enquête a révélé que bien qu’elle dispose d’équipements technologiques et matériels, ces derniers ne sont pas utilisés à des fins de recherche de l’information. Internet est souvent utilisé pour communiquer avec le client à l’étranger.

Toutes les PMI s’accordent sur le besoin ardent et pressant de recevoir l’information pertinente et fiable à temps pour prendre des décisions fondées.

En étudiant les données issues de l’enquête, la revue de littérature et les expériences nationales et étrangères en matière de veille technologique, nous avons élaboré pour l’IMIST une stratégie de veille technologique pour servir en ISTT et en veille technologique les PMI exportatrices des deux secteurs étudiés.

Une stratégie de veille technologique pour servir les PMI

La stratégie proposée à l’IMIST est balisée par cinq éléments à savoir :

  • les objectifs de l’activité de veille technologique que l’IMIST doit se fixer pour servir les PMI ;
  • les prestations de veille technologique que l’IMIST doit élaborer pour servir les PMI ;
  • les moyens humains, technologiques, matériels et financiers à mobiliser ;
  • la démarche de veille technologique à suivre ;
  • la structure de veille technologique à mettre en place.

La stratégie de veille technologique que nous proposons à l’IMIST pour servir les PMI des deux secteurs étudiés constitue un modèle à suivre pour élaborer d’autres stratégies permettant de servir les autres catégories d’usagers de l’IMIST.

L’activité de veille technologique que l’IMIST mènera au profit des PMI doit avoir pour objectifs de permettre à l’entreprise de cerner les changements rapides de son environnement et s’y adapter, de résoudre ses problèmes opérationnels, de préparer sa prise de décision, d’alimenter sa réflexion prospective et de résoudre ses problèmes liés à la communication. La veille technologique destinée pour les deux secteurs peut être de différents types suivant la nature du demandeur (une entreprise / un groupement d’entreprises), la nature de l’information à diffuser (fraîche / d’une durée de vie plus ou moins longue) et la portée de la décision qui en découle (stratégique / tactique / opérationnelle).

Pour atteindre ses objectifs, l’IMIST est appelé à fournir aux PMI des prestations qui tiennent compte de leurs besoins et attentes, à savoir :

  • la fourniture de l’ISTT pertinente et fiable à temps ;
  • la formation en méthodologie de recherche et de traitement de l’information et en démarche de mise en place d’un système de veille technologique ;
  • l’assistance dans le processus d’innovation.

Les prestations de l’IMIST seraient aussi bien mono-clients que multi-clients. Les prestations mono-clients sont destinées à une entreprise donnée dans le but de résoudre un problème ponctuel qu’elle a exprimé. Il s’agit notamment d’étude de marchés, de la mise en relation avec des experts, de l’alerte sur un axe relatif à l’activité de la PMI et de formations et/ ou de conseils en une technologie.

Les prestations multi-clients ont pour objectif de servir les PMI ayant des préoccupations communes. Il s’agit notamment de produits d’alerte et des études destinées à répondre aux besoins de chacun des secteurs étudiés.

En ce qui concerne la tarification des prestations de veille technologique que l’IMIST fournira aux PMI, nous proposons la gratuité des prestations si l’Etat prend en compte la difficulté de la conjoncture actuelle du secteur industriel et couvre les charges de production des prestations. Dans le cas contraire, nous proposons que l’IMIST fasse payer ses prestations par les PMI et ce de manière progressive en tenant compte de la conjoncture actuelle.

Dans le même sens, l’IMIST est appelé à chiffrer les coûts de réalisation de ses prestations. Les coûts peuvent être déterminés en mesurant le temps consacré à leur réalisation ainsi que les charges de réalisation de chaque prestation.

Pour ce qui est des moyens à mobiliser pour mener à bien l’activité de veille technologique au profit des secteurs étudiés, l’IMIST est appelé à renforcer ses équipements, à impliquer différents profils dans son activité de veille technologique et à mobiliser des moyens financiers qui correspondent à l’envergure de ses missions.

Les moyens technologiques à mobiliser consistent essentiellement en un parc informatique et bureautique performants, des logiciels de veille technologique, des abonnements aux revues électroniques et aux bases de données.

L’équipe de veille technologique de l’IMIST doit être composée de spécialistes de l’information, de spécialistes en agro-alimentaire et en textile ainsi que de compétences dans d’autres disciplines tels le juriste, le marketer, l’infographiste, l’informaticien, l’économiste et l’assistante de direction.

La démarche de veille technologique que nous proposons à l’IMIST pour servir les PMI comprend quatre étapes énoncées par la littérature, à savoir : l’identification des besoins en ISTT des PMI étudiées, la recherche et la collecte de l’ISTT, son traitement et son analyse, et sa diffusion.

A ce processus, nous ajoutons deux autres étapes à savoir la capitalisation des informations collectées et diffusées et l’évaluation de la stratégie de veille technologique adoptée. Ces deux étapes permettront à l’IMIST de passer de la veille technologique à l’intelligence économique.

La veille technologique est une affaire de groupe. Dans cette optique, la structure de veille technologique à mettre en place doit faciliter la gestion des tâches et garantir l’efficacité et la rapidité dans la prise de décision. Cette structure doit permettre de gérer la diversité des profils impliqués et la complexité des projets à réaliser. Ainsi, nous proposons à l’IMIST d’adopter pour son service de veille technologique la structure par projet car elle répond le mieux aux spécificités de son activité.

Conclusion

Pour mieux servir les PMI, l’IMIST est appelé à évaluer continuellement sa stratégie de veille technologique et ce en tenant compte de l’évolution des besoins en ISTT des PMI étudiées. L’évaluation de cette stratégie peut se faire par le lancement d’autres études de besoins en ISTT et par la réalisation d’enquêtes de satisfaction auprès des PMI étudiées.

Notre étude constitue un modèle à suivre pour servir les autres secteurs industriels, les autres catégories d’entreprises (les grandes entreprises), les autres régions économiques du Maroc ainsi que les autres catégories d’usagers de l’IMIST (chercheurs, collectivités locales, institutions gouvernementales et non gouvernementales).

Cette étude propose de nouvelles pistes de recherche pour résoudre les problèmes qui entravent le développement de la PMI marocaine. Il s’agit notamment de l’étude de l’utilisation du brevet par l’entreprise marocaine et de l’étude de la relation entre la gestion des connaissances (knowledge management) et l’innovation dans l’entreprise marocaine.

Notes

(1) Cet article retrace les étapes et les résultats du mémoire de 3ème cycle de l'Ecole des sciences de l'information de Rabat intitulé "Eléments d'une stratégie de veille technologique pour l'Institut marocain de l'information scientifique et technique : cas des PMI exportatrices du secteur des industries agro-alimentaires et du secteur des industries du textile, de l'habillement et du cuir situées dans la région du Grand Casablanca".
Le mémoire a été encadré par M. Mohammed Idsaleh et M. Mohammed Essadaoui

Bibliographie

BENMIR, Fouad (2001). Système d’information de gestion et prise de décision en milieu industriel : cas des entreprises industrielles appartenant au secteur des IMME à Mohammedia. Mémoire 3ème cycle : Ecole des Sciences de I’information.
JAKOBIAK, François (1992). Exemples commentés de veille technologique. Paris, Les Editions d’organisation. 199p.
JAKOBIAK, François (1991). Pratique de la veille technologique. Paris, Les Editions d’Organisation. 232p.
MARTINET, B & MARTI, Y. M (2001). Intelligence économique : comment donner de la valeur concurrentielle à l’information. Paris, Les Editions d’organisation. 244p.
NAJIH, Amal. L’information externe dans les PME : cas de l’industrie textile à la Wilaya de Rabat – Salé. Mémoire 3ème cycle : Ecole des Sciences de l’Information.
REVELLI, Carlo (1998). L’intelligence stratégique sur Internet : comment développer efficacement des activités de veille et de recherche sur les réseaux, moteurs de recherche, réseaux d’experts, agents intelligents. Paris, Dunod. 212p.
ROMAGNI, P & WILD, V (1998). L’intelligence économique au service de la stratégie d’entreprise : c’est pour demain la veille. Paris, Les Presses du Management. 219p.

Webographie

AGENCE DE DIFFUSION DE L’INFORMATION TECHNOLOGIQUE (2001). [Internet]. Consulté le 18 Octobre 2001 : http://bourgogne.arist.tm.fr
ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LE DEVELOPPEMENT DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE (2001). [Internet]. Consulté le 22 Décembre 2001 : http://www.afdie.com
AGENCE FRANÇAISE DE L’INNOVATION (2001). [Internet]. Consulté le 22 Décembre 2001 : http://www.anvar.fr
AGENCES REGIONALES DE L’INFORMATION SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE BOURGOGNE (2001). [Internet]. Consulté le 18 Décembre 2001 : http://bourgogne.arist.tm.fr
CENTRE DE RECHERCHE INDUSTRIELLE DU QUEBEC (2002). [Internet]. Consulté le 06 Janvier 2002 : http://www.criq.qc.ca
CENTRE DE VEILLE TECHNOLOGIQUE (2001). [Internet]. Consulté le 25 Décembre 2001 : http://www.cvt.lu
INSTITUT NATIONAL DE L’INFORMATION SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE (2001). [Internet]. Consulté le 18 Octobre 2001 : http://www.inist.fr
OUATTARA, O (2003). La veille technologique, adaptation aux pays africains. [Internet]. Consulté le 22 Avril 2003 : http://www.ms161u13.u-3mrs.fr/memoires/oumarouattra_ts.pdf
QUAZZOTTI, Serge (2003). Veille technologique : guide des bonnes pratiques en PME/PMI. [Cd-rom]. Consulté le 23 Mars 2003
URFIST (2003). La veille. [Internet]. Consulté le 23 Mars 2003 : http://www.urfist.cict.fr/veille1.html
VERNA, Gerard (2002). La Veille technologique : une nécessité ardente. [Internet] : Consulté le 06 Janvier 2002 : http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/pub/veille.htm

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L’information au service de l’innovation » : Compte-rendu de la 3ème journée franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique

Ressi — 9 octobre 2006

François Courvoisier, Haute Ecole de Gestion, Arc de Neuchâtel

Jacqueline Deschamps

Françoise Simonot, IUT de Besançon, Université de Franche-Comté, France

Dernière modification: 
24/06/2009

« L’information au service de l’innovation » :Compte-rendu de la 3ème journée franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique

Le 15 juin 2006 s’est tenue à l’IUT de Besançon la troisième journée franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique organisée en collaboration avec la Haute école de gestion Arc de Neuchâtel, la Haute école de gestion de Genève et l’Université de Franche-Comté. Cette journée a fait suite aux deux précédentes éditions tenues à Neuchâtel en 2004 sur le thème « Comment anticiper, comment surveiller la concurrence ? » puis en 2005 sur le thème « Intelligence économique et réseaux ». Cette manifestation a pu avoir lieu grâce à une collaboration académique initiée en 2003 autour du lancement en Suisse d’études postgrades en intelligence économique et veille stratégique. En ouverture de ce colloque, présidé par Mme Françoise Simonot, professeur et chef du département Information-Communication, le directeur de l’IUT M. Joël-Pierre Eugène adresse une cordiale bienvenue aux participants. Madame Simonot rappelle que cette journée a pour but un échange d’expériences sur l’intelligence économique et la veille stratégique entre universités, consultants et entreprises.

Exposé de M. Jean Michel

Le premier exposé de la journée est réalisé par Jean Michel, consultant et formateur, qui a notamment accompagné la constitution du pôle régional des microtechniques en Franche-Comté. Pour innover, affirme Jean Michel, il ne suffit pas d’avoir un coup de génie : la méthode est prépondérante ! Il de faut pas perdre de vue le marché derrière l’innovation, c’est-à-dire les acheteurs potentiels. Pour le conférencier, l’innovation est un décalage, un déplacement pour avoir une autre représentation mentale de l’existant. Adepte de néologismes et de concepts porteurs de sens, Jean Michel suggère aussi des combinaisons nouvelles entre l’information et l’innovation : « infonovation » et « innoformation », qu’il illustre par un tableau croisé entre ces deux variables :

  Innovation (-) Innovation (+)
Information (-) Déclin assuré « Concours Lépine » (produits miracles)
Information (+) Suivisme, reproduction de l’existant C’est gagné ! $, £, €, CHF !

La méthode à adopter est une intelligente combinaison pour « in-nover » et « in-former » (mettre du neuf dans une forme), donc « trans-former ». L’innovation est un processus de déconstruction-reconstruction pour déplacer les représentations mentales, tout en veillant à neutraliser les phénomènes de blocage. Afin d’innover, il faut naturellement disposer au bon moment d’informations pertinentes selon les besoins du marché (market pull) ou selon les résultats de la recherche et du développement technique et scientifique (technology push). Chaque entreprise développera et maintiendra donc son propre système de gestion d’informations. L’information est un regard porté sur le monde, en toute subjectivité. Elle est source de progrès lorsqu’elle s’échange, c’est ce qui fait la puissance de l’internet et des « blogs », mais déstabilise ceux et celles qui ne veulent pas la partager ! La connaissance est une prise de recul par rapport à l’information brute : on la modélise pour comprendre le monde et agir. Les construits cognitifs conduisent au knowledge management, ou gestion des connaissances qui peuvent se matérialiser ou non dans des documents partagés. Selon Jean Michel, nous sommes à l’âge de pierre de la gestion de l’information ! Il nous faut établir des règles de gestion de cette dernière et du partage des savoirs. La « transversalité » devient un besoin impérieux, car nous sommes mal préparés à l’émergence de la « soupe numérique » face à la liquéfaction info-documentaire. En conclusion, Jean Michel suggère les approches suivantes pour favoriser l’innovation en entreprise : procéder par analyse fonctionnelle, par analyse systémique et par management par projets.

Exposé de M. Jean-Claude Jeune

Directeur de l’ARIST de Franche-Comté, Jean-Claude Jeune développe ensuite le thème de la « créativité encadrée ». Cette dernière est souvent bridée par des contraintes techniques, des normes, des habitudes, etc. L’innovation viable possède un marché réel, elle est exploitable librement (donc pas protégée) et elle procure un avantage concurrentiel notable. L’exploitation de l’innovation engendre un certain nombre de risques : un risque commercial (des méventes, l’action de la concurrence), un risque technologique (une fiabilité déficiente), un risque juridique (des brevets antérieurs et des droits des tiers). Aujourd’hui, le temps de développement d’une innovation est bien supérieur au cycle de vie du produit sur le marché : il faut donc la rentabiliser très vite. On peut naturellement sous-traiter le développement et s’approcher de pôles de compétences technologiques. Les grandes questions que l’innovateur doit se poser sont : « faut-il breveter ou non ? » et « quand protéger » ? Selon Jean-Claude Jeune, ce ne doit être ni trop tôt, si les solutions techniques ne sont pas stabilisées, ni trop tard après la commercialisation. Les réponses apportées par l’orateur à la question « pourquoi ne pas protéger ? » sont les suivantes : tout d’abord, s’il est impossible de défendre son droit (par exemple parce que cela coûterait trop cher), ensuite, si la durée de vie d’un produit est courte, puis si l’invention est dans le savoir-faire plus que dans la technologie ou le procédé et, finalement, si d’autres solutions existent au même coût.

Au cas où l’innovation de l’entreprise ne se situe pas dans son métier de base, mieux vaut trouver des preneurs de licence, procéder par cession, transfert ou partenariat. Si elle se situe dans le cœur de métier, on peut alors procéder par « endogénéisation ». Il ne faut pas perdre de vue qu’innover demande de toute façon des ressources importantes, financières et humaines. L’entreprise doit se méfier des innovations de rupture qui bouleversent un secteur d’activités : Jean-Claude Jeune cite par exemple le spiral qui a tué l’horloge franc-comtoise, car dès lors on a pu transporter l’heure !

Exposé de M. Pierre Gandel

Le métier de la société de Pierre Gandel, directeur de Moving Magnet Technologies SA (MMT) à Besançon, est le licensing, soit la cession de licences de composants automobiles (moteurs, actionneurs, capteurs) dans le monde entier. Pour la recherche d’information, il s’appuie sur des partenaires comme l’ARIST et l’ARIE, ainsi que sur des sources incontournables comme Delphon.com, les salons professionnels et les contacts avec les clients. MMT dispose d’une cellule de veille technologique efficace : des collecteurs établissent des fiches de collecte, ils procèdent à des tris puis des analyses, établissent des rapports de synthèse qui alimentent un tableau de bord de l’innovation stocké sur support informatique. Ces rapports de synthèse se font par business unit à court, moyen et long terme. La direction de MMT réagit à ces informations pour prendre des décisions appropriées. Une personne est responsable de l’intelligence économique, 15 collaborateurs et 3 animateurs sont continuellement impliqués dans la cellule de veille. Il s’agit d’optimaliser la gestion du temps, de faire circuler rapidement l’information et de faire preuve de réactivité, le cas échéant.

Chez MMT, la culture de l’innovation est nourrie par la connaissance des applications et des besoins du marché. Elle s’appuie sur un marketing fort, en contact avec le client, anticipant les applications dont ce dernier aura besoin. La veille technologique est fondamentale, de même que la protection efficace des idées par des brevets. Il est nécessaire de bien connaître la concurrence tout en ayant conscience de la qualité de son idée, tout en ayant procédé par recherche d’antériorité. En 15 ans, MMT a déposé plus de 100 brevets et cédé près de 70 licences d’exploitation. MMT a fait son business model du concept « l’information au service de l’innovation ». Les collaborateurs, d’une grande stabilité professionnelle, sont motivés à récolter de l’information, stimulés notamment par le challenge du meilleur veilleur. La chaîne de valeur de MMT peut être schématisée ainsi :

Information > Innovation > Protection > Revenus

Sur le marché de l’innovation, MMT est en concurrence directe avec les centres de R&D des grands équipementiers automobiles.

Exposé de M. Marc Schuler

Dixi Polytool SA, située au Locle, a un tout autre métier que MMT : la fabrication d’outillages industriels en tungstène et carbure monobloc. Ses clients sont des entreprises horlogères, médicales, des secteurs de l’automobile et de l’aéronautique. Son directeur, Marc Schuler, explique comment Dixi Polytool a passé d’une « approche produit », il y a 5 ans encore, à une « approche marché ». Le changement de culture a été assez important, même si le marché reste à peu près le même. Les départements de vente et de marketing sont devenus les moteurs de la société, même dans des niches très techniques. La démarche de type marché est double, et son aspect communicationnel fondamental : dans le sens marché > Dixi, Marc Schuler relève les flux d’information classiques suivants : les demandes des clients, les informations sur les concurrents, les informations émanant de la vente, la presse spécialisée, les foires et expositions, les recherches universitaires et sur les nouveaux matériaux. Dans le sens inverse Dixi > marché, les flux les plus importants sont : les activités de vente, les conseils techniques sur projets par les ingénieurs d’applications, les catalogues et flyers, les activités de rédaction technique, les foires où Dixi expose, la publicité, les conférences, le sponsoring et les events (comme par exemple l’invitation de clients à un match de hockey).

Suite à un diagnostic d’entreprise, il a été relevé que Dixi était faible pour récolter et structurer l’information provenant du marché : cette dernière n’était ni formalisée, ni partagée. Il a donc été décidé de créer une cellule de veille, avec les besoins en information suivants : les spécificités des concurrents, leurs prix, leurs technologies, les produits de substitution et toutes autres informations marketing des concurrents. Dans le cadre de son travail de diplôme, une étudiante de la Haute école de gestion Arc de Neuchâtel a analysé les besoins, déterminé les éléments clés de la veille et contribué à l’implémentation de cette dernière. Elle a notamment mis le doigt sur le fait que l’information disponible est abondante, mais non formalisée, ainsi que sur le manque de connaissance des outils de recherche sur internet par les collaborateurs de Dixi Polytool.

Les étapes de la méthodologie de veille ont été les suivantes : sensibiliser les collaborateurs (étape fondamentale), impliquer la direction de l’entreprise, définir exactement les éléments à intégrer dans la veille, mettre en place cette dernière, procéder à une séance de lancement de la veille, puis assurer le suivi de la direction pour garantir la viabilité et la pérennisation du système. Ce processus s’appuie sur le cycle bien connu du renseignement : collecter > analyser > interpréter > diffuser. La base de la prise d’informations est la « feuille de veille », les sources les plus importantes sont les clients, les fournisseurs, la presse spécialisée, les foires-expositions, les sites internet des concurrents, les agents internationaux, les centres de recherche et les associations faîtières.

Ensuite, le traitement et l’analyse de l’information se font par une synthèse des fiches dans Excel et un chargement sur l’intranet de Dixi Polytool. En outre, la direction commerciale extrait des informations hebdomadaires des rapports de visites qui n’auraient pas fait l’objet d’une fiche. L’information est ensuite partagée avec le département R&D.

Jusqu’au début de 2006, la diffusion de l’information se faisait par simples discussions informelles. Depuis la fin du premier trimestre de cette année, l’information structurée selon la méthodologie décrite ci-dessus est réinjectée dans les réunions de vente et les réunions techniques. Les outils de veille mis en place sont les fiches d’information, le système de classement, les alertes Google et l’introduction de la veille concurrentielle, qui est dorénavant inscrite dans le Manuel Qualité de la société.

De cette expérience de mise en place d’un processus de veille, Marc Schuler tire les leçons suivantes : tout d’abord, le management doit profondément s’investir pour changer les méthodes de travail ; ensuite, un suivi régulier doit être assuré avec les vendeurs ; puis il faut être strict, avec soi-même et ses collaborateurs pour ancrer le système dans les habitudes de travail ; finalement, l’information doit être diffusée et partagée pour crédibiliser le système.

Exposé de M. Laurent Sage

Directeur de l’information auprès de la Chambre de Commerce du Doubs, Laurent Sage indique que cette dernière bénéficie d’une nouvelle organisation depuis 2002. En effet, elle a désormais une orientation plus prospective pour déceler les enjeux clés et se trouver plus à l’écoute des entreprises-membres. La veille permet de voir comment l’environnement évolue, notamment au travers d’une revue de presse régulière, d’une veille internet et de l’activité de groupes de travail. Le système d’information permet une écoute des partenaires et une mise en relation de ceux-ci. Un centre appelé « I2E » permet de construire une recherche et une veille sur internet mutualisée. Des veilleurs par thème peuvent capter l’information au moyen d’outils avancés et la mettre sur une plateforme. L’information est ensuite diffusée aux partenaires et entreprises de la CCI du Doubs. Les préoccupations de ces derniers sont largement orientées vers les effets de la mondialisation sur leurs affaires, notamment en ce qui concerne l’embauche et le licenciement du personnel.

Exposé de M. Stéphane Koch

Stéphane Koch, directeur d’Intelligentzia à Genève, parle ensuite des sources ouvertes de l’information : il s’agit de sécuriser la structure de l’entreprise qui innove. Ces sources ouvertes sont nombreuses : tout d’abord le téléphone, l’e-mail et le contact humain ; ensuite le web visible et invisible, les newsgroups, les forums de discussion, les archives web « off line » et les métadonnées (documents MS Office). Les accès sont multiples, notamment par les moteurs Google, Yahoo et MSN, mais parfois fragmentés : par exemple, on n’obtient pas les mêmes occurrences, ou les mêmes dates de deux documents, en tapant deux suffixes de pays différents à ces deux moteurs. Le site http://www.jux2.com permet de comparer ce que l’on trouve ou non au moyen de ces trois moteurs. Selon Stéphane Koch, le web s’oriente de plus en plus vers les services comme les blogs et les tags.

Pour organiser sa recherche d’informations sur internet, il faut configurer sa machine et ses extensions, notamment avec le navigateur Firefox. Des outils de réseaux de compétences humains comme LikedIn, Plaxo et Viaduc peuvent être utiles. Les éléments trouvés peuvent être mis en veille pour donner du sens à la démarche. Le site http://www.technorati.com permet actuellement d’indexer plus de 44 millions de blogs ! Le logiciel gratuit http://www.websitewatcher.com permet d’être averti de changements sur des sites web surveillés au moyen de mots clés. Le logiciel http://www.netnewstracker.com recherche quotidiennement des phrases sélectionnées dans les news groups, et les envoie par e-mail au requérant. Stéphane Koch suggère également de veiller sur les statistiques de fréquentation de son propre site.

Exposé de Vincent Guyod

Vincent Guyod est directeur marketing d’Oxibis, à Morbier. Son entreprise développe, fabrique et vend une quinzaine de lignes de lunettes (plus de 300 références) de moyenne gamme. En outre, la Société gère la marque Exalto, de plus haut de gamme, qui compte 10 lignes et plus de 200 références. Oxibis a récemment lancé Dilem, une marque de lunettes « accessoires de mode » à branches interchangeables.

Oxibis procède à plusieurs types de veille et d’études : en premier lieu, la veille concurrentielle d’Oxibis se base sur une analyse des besoins, la recherche d’informations sur tous les supports disponibles (presse professionnelle, bilans de sociétés, internet), le traitement de l’information puis sa diffusion à l’interne. En deuxième lieu, la « veille tendances » est similaire à la veille concurrentielle, mais sur tous types de supports plus les salons, conférences, workshops (design, mobilier, mode, etc.), l’observation de vitrines et du look des gens. Cela aboutit à la création de « cahiers de tendances ». Troisièmement, la réalisation d’études qualitatives et quantitatives ad hoc permet de mieux cerner la demande et segmenter les gammes, comme une étude faite auprès de 200 opticiens. D’autre part, des études socio-marketing sont aussi entreprises pour dégager les tendances de fond de la société : le lancement de Dilem s’est notamment appuyé sur une telle étude. Finalement, la protection des innovations est réalisée après avoir recouru à une « veille brevets », et tous les modèles Oxibis sont désormais brevetés suite à des problèmes de contrefaçon que l’entreprise a subis.

La lunetterie étant un secteur très concurrentiel, l’innovation et la protection de cette dernière font partie intégrante de la culture de l’entreprise, comme les formes de veille et de recherche évoquées ci-dessus.

Exposé de M. Karim Benzineb

Linguiste-traducteur de formation, Directeur de Metaread à Genève, Karim Benzineb a fondé son entreprise en 2001 et développé des outils d’aide à la traduction, puis des outils de recherche de documents similaires autres que les mots : des contenus de textes et des textes complets. Il fabrique des « meta-données » à partir de textes complets pour procéder à des recherches sémantiques dans plusieurs langues. Chez Metaread, l’innovation est déclenchée de manière exogène : elle crée le marché ! Souvent, il n’est pas possible de la gérer en interne, dans la petite équipe de cinq personnes, et Metaread s’appuie fréquemment sur des travaux académiques existants, puis les améliore.

L’innovation est nécessaire à la survie de Metaread : chaque collaborateur a accès aux mêmes sources de données innovantes. S’il ne trouve pas de solution, un autre fournisseur de données sera choisi, ce n’est qu’une question de temps ! Les sources d’information pour innover sont en grande majorité internet (deux tiers des sources, mais pas toujours fiables, avec risque de partir sur de fausses pistes), les chercheurs universitaires (sources généralement fiables) et les livres et publications. Innover, pour Metaread, c’est écouter le client, comprendre ce qu’il demande, faire le point sur les solutions existantes (technologies, avantages, prix). Ensuite, il faut aller très vite et faire mieux que l’existant dans l’ingénierie des logiciels, soit optimiser les technologies existantes en prenant l’approche client la plus pertinente.

En guise de conclusion, Jean Michel dégage trois facteurs clés de succès dans la mise en place de systèmes d’information au service de l’innovation :

  • le succès dépend plus du savoir des hommes et de l’organisation interne basée sur une culture d’entreprise orientée vers l’innovation que d’une solution technologique ;
  • ce n’est pas parce que l’on collecte de l’information que l’on est gagnant, il faut ensuite la structurer et modifier la culture de l’organisation ;
  • pour « tenir la distance », il faut crédibiliser le système en le pérennisant.

Août 2006
Dr. François Courvoisier – Professeur, HEG Arc de Neuchâtel
Dr. Jacqueline Deschamps – Professeur, HEG de Genève
Mme Françoise Simonot – Professeur, Chef du département Information-Communication, IUT de Besançon, Université de Franche-Comté

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Les archives électroniques : Quels défis pour l’avenir? Actes de la Troisième journée des archives organisée les 8 et 9 mai 2003 par les Archives de l’Université catholique de Louvain

Ressi — 9 octobre 2006

Daniel Ducharme

Dernière modification: 
24/06/2009

Fillieux, Véronique et Évelyne Vandevoorde (éd.). Les archives électroniques : Quels défis pour l’avenir? Actes de la Troisième journée des archives organisée les 8 et 9 mai 2003 par les Archives de l’Université catholique de Louvain. Louvain-la-Neuve : Bruylant-Academia, 2004 (Publications des Archives de l’Université catholique de Louvain ; 8) ISBN 2872097570

Depuis 2001 les Archives de l’Université catholique de Louvain ont pris l’heureuse habitude d’organiser une Journée des archives à laquelle participent des archivistes en provenance de Belgique, certes, mais aussi d’ailleurs dans le monde. Ce sont les actes de cette Troisième journée des archives que nous vous présentons ici. Ils comprennent les textes des onze communications qui ont été faites au printemps 2003 dans le cadre de ce symposium annuel

François Burgy, archiviste adjoint à la ville de Genève, débute ce symposium en posant la question : « Les documents électroniques vont-ils avoir raison des archivistes? » (p. 8-21). Après avoir brossé un portrait succinct des relations entre archivistes et informaticiens depuis la fin des années 1960, il décrit en sept points les problématique des documents numériques eu égard à la discipline archivistique : la préservation à long terme, la remise en cause des principes archivistiques, la diplomatique, l’archivistique intégrée, les outils informatiques, la formation et les réseaux de coopération. Puis il prend acte de l’évolution de la profession d’informaticien en raison de problèmes communs tels que la préservation à long terme et la gestion électronique des documents. Enfin, il dresse un bilan provisoire de l’appropriation des documents électroniques par les archivistes, prédisant même avec grand optimisme que l’apport de ces derniers à la gestion des documents électroniques risque d’accroître la reconnaissance sociale de la profession d’archiviste en Suisse, voire dans le monde, à la condition toutefois qu’elle préserve son autonomie professionnelle et qu’elle dote ses membres d’une formation de qualité.

Jean-Marie Yante, pour sa part, revient sur « La problématique de base des archives électroniques » (p. 23-36). Après avoir apporté des précisions terminologiques sur le triptyque « électroniques », « informatiques » et « numériques » qui qualifie les documents d’archives, il résume les avantages, en matière de collecte, de stockage et de diffusion, que procure l’environnement numérique à l’archivistique contemporaine, soulignant au passage le fait que l’archiviste n’hérite plus des archives, mais devient plutôt un acteur dans la constitution du patrimoine archivistique de demain (p. 25). Puis l’auteur décrit les problèmes soulevés par les documents numériques tels que les banques de données (écrasement des données), les sites web (fluidité), le forum en ligne (structuration des informations) et les courriels (gestion technique). Ensuite il aborde le problème des dépendances de l’information numérique par rapport au support, aux logiciels et aux matériels, problème dont la solution consisterait en l’adoption d’un format « canonique » qui permettrait d’archiver le message indépendamment du logiciel et de l’environnement informatique choisis lors de la création (p. 29). Plus loin, Yante énumère les contraintes et défis posés par la gestion des archives électroniques, mettant en relief les normes en tant qu’élément stabilisateur de ces dernières. Il s’attarde alors à la dématérialisation de l’information qui, en dissociant celle-ci de son support, en atténue la qualité de preuve. Il s’arrête aussi à la signature électronique, un moyen d’assurer l’intégrité des documents qui résiste mal à la migration des données. Enfin il met à jour le défi de la description des archives électroniques qui oblige les archivistes à préciser, par le moyen des métadonnées, leur provenance, leur finalité, leur fiabilité et leur contexte de création. En dépit de ces contraintes et défis, l’auteur soutient que des permanences demeurent, notamment le principe de provenance ou de respect des fonds qui, loin d’être obsolète, s’en trouve renforcé par l’environnement numérique (p. 33). L’auteur termine sa communication en résumant deux expériences de numérisation, celles des Archives nationales du Québec et des Archives générales des Indes à Séville. Évoquant le coût des opérations, l’incertitude relative à la stabilité des supports et l’obsolescence des appareils de lecture, il convie les archivistes à la prudence en matière d’utilisation de la numérisation à grande échelle pour la conservation du patrimoine archivistique. En conclusion, Yante estime que, même si le numérique est rempli de promesses pour la profession et la discipline archivistiques, « trop d’incertitudes demeurent, trop de défis restent à relever » (p. 36).

Avec la communication intitulée « Développer un système de gestion globale des archives – le projet DISSCO et les aspects humains » (p. 37-49) de Frank Schellings, nous quittons la voie de la théorie pour la pratique. En effet, cet auteur décrit les conditions conceptuelles et humaines nécessaires au succès de la mise en œuvre d’un système de gestion électronique de documents (GED). Pour ce faire, il s’appuie sur un projet qui a pour but de doter les institutions scientifiques de Belgique d’un système documentaire automatisé tenant compte du records continuum. Après avoir distingué les notions de document, records et knowledge management et le rôle respectif de chacun des intervenants dans le projet, il décrit la diversité organisationnelle des institutions, se demandant s’il est possible d’envisager une application unique. Puis Schellings aborde la méthodologie de l’analyse de l’existant en tenant compte de sa triple dimension : fonctionnelle, politique ou relationnelle, et culturelle. Enfin l’auteur termine son article par l’énumération de quelques normes (MoReq, UK Pro, ISO 15489, etc.) susceptibles de constituer un noyau d’exigences fonctionnelles pour le futur système.

Dans « La collecte des archives électroniques aux Archives de Paris » (p. 51-69), Louis Faivre D’Arcier résume les interventions des archivistes relatives au transfert et au versement des documents numériques aux Archives de Paris, « un des plus importants services d’archives français ». Après avoir décrit le contexte administratif et bureautique de cette administration, l’auteur décrit plusieurs cas de figure dont les critères d’évaluation des documents issus d’applications bureautiques. Ensuite, il énumère les « difficultés particulières à la collecte de données issues d’applications déjà en service », plus précisément des documents issus de bases de données dont le contenu n’est pas « historisé ». Enfin, Faivre D’Arcier décrit les projets en cours, soit l’élaboration d’un module d’archivage du logiciel unique de gestion du courrier et l’archivage « à la source » des informations contenues dans l’intranet de la ville de Paris. En conclusion, l’auteur souligne que, si la gestion des archives électroniques permet de prendre en compte dès l’origine l’archivage dans la production documentaire, les tâches reliées à cette fonction ne sont pas faciles à mener à bien. La reconnaissance de la gestion des archives dans l’administration a encore des progrès à faire.

Sous le titre de « Préserver la mémoire et transmettre des documents dans la culture électronique » (p. 71-79), Yolande Juste et Ferdinand Poswick relatent l’expérience du collectif Informatique et Bible en la matière. Après avoir rappelé l’urgence d’une prise de conscience du devoir de mémoire, les auteurs résument l’approche technique de ce collectif qui comprend cinq phases : formulation des objectifs, description des données à traiter, proposition de traitement, estimation du temps de réalisation et élaboration d’un contrat de réalisation. Des remarques complètent l’énumération de chacune de ces phases dont l’objectif ultime est de faciliter le passage de la culture de l’écrit alphabétique – celle du livre imprimé et de la bibliothèque – à la culture de l’écriture électronique et de la communication planétaire.

Filip Boudrez et Carole Van Camp s’intéressent quant à eux à la préservation des messages électroniques vie une application XML (p. 81-96). Pour ce faire, ils décrivent la politique adoptée par la ville d’Anvers (Antwerpen, en néerlandais) qu’ils illustrent à travers le David Project (Digitale Archivering in Vlaamse Instellingen en Diensten). Après avoir énuméré les étapes préliminaires à la mise en œuvre d’une politique de gestion du courrier électronique, ils décrivent en détail les procédures préconisées par le David Project. En conclusion, ils rappellent que la préservation des messages électroniques doit s’inscrire dans une politique globale de gestion des documents électroniques dans l’organisation.

Dans « L’authenticité : un défi » (p. 97-108), Lucie Verachten examine avec minutie la notion d’authenticité des archives et décrit les moyens susceptibles de la garantir lors des étapes de création, de transfert, d’évaluation, de conservation et de diffusion des documents. En conclusion, elle rappelle que la préoccupation majeure des archivistes « n’est plus la sauvegarde des supports, mais bien celle de l’information après une migration, une conversion ou une émulation du hardware et du software » (p. 108).

Pour sa part, Hannelore Dekeyser s’intéresse aux « conditions d’accès et d’utilisation par rapport aux droits des individus concernés » (p. 109-119). Après avoir décrit le phénomène de l’ombre électronique (ces traces que laisse l’utilisation de l’ordinateur), il aborde la problématique de la protection de la vie privée, de la propriété intellectuelle et du droit à l’information, refusant d’envisager une solution globale au conflit d’intérêts entre les archives, dont l’importance dans la vie démocratique de la société ne peut être mise en doute, et les individus.

Comme son titre l’indique, Michel Dorban se livre à une « analyse bibliométrique de quelques concepts en relation avec la valorisation des archives électroniques » (p. 121-149). Après avoir défini la notion de « valorisation » et explicité la méthode de l’analyse bibliométrique qu’il a utilisée, l’auteur résume les résultats des recherches effectuées à partir des concepts de records management, computerized records et electronic document, résultats qu’il présente sous la forme de multiples tableaux. En conclusion, Michel Dorban met en évidence les difficultés rencontrées dans l’utilisation de ces concepts, notamment les résultats assez peu homogènes en raison de la « dispersion des articles dans un grand nombre de revues ».

La dernière communication faite à cette Troisième journée des archives est de Francesca Klein et porte sur le « Imago Project » (p. 151-159), un projet de numérisation du fonds Diplomatico de Florence, un fonds qui compte notamment 85 000 parchemins florentins du VIIIe au XIVe siècles. L’auteure décrit les caractéristiques du projet, de l’acquisition du matériel de numérisation au mode de consultation retenu en passant par la mise en ligne des résultats sur Internet.

Enfin, François Burgy et Paul Servais nous invitent à poursuivre la réflexion (p. 161-165) sur les archives électroniques. Après avoir résumé les grandes lignes de cette Troisième journée des archives, ils constatent que « la gestion des archives électroniques donne davantage de poids à la fonction d’évaluation et de sélection parmi les fonctions archivistiques », ce qui met en évidence « la valeur permanente des méthodes archivistiques » (p. 163). Cette conclusion a le mérite d’être rassurante pour la discipline et la profession archivistiques, tout en ne minimisant pas les défis techniques, juridiques et politiques que pose la gestion des archives dans la société de l’information.

Une bibliographie de plus de 200 titres complète avantageusement cet ouvrage au contenu d’une richesse incontestable. En effet, si cette Troisième journée des archives réunit un grand nombre de comptes rendus d’expériences pratiques, elle ne néglige pas pour autant les réflexions théoriques et méthodologiques qui doivent accompagner toutes actions destinées à relever les défis de la gestion des archives au seuil du XXIème siècle. Le lecteur y trouvera donc l’expression d’une pratique aussi variée que la gestion des messages électroniques ou la numérisation de fonds anciens que le rappel des problèmes théoriques, techniques et juridiques que continue de poser la gestion des archives sous forme électronique. Pour terminer, je me permets toutefois d’exprimer un souhait : le jour où l’on cessera d’affubler les archives du qualificatif « électroniques », un grand pas aura été franchi puisque, depuis la deuxième révolution technologique des années 1990, il n’y a plus d’archives autrement que numériques, et j’aurais aimé qu’on franchisse ce pas lors de ce symposium.

  • Publié par Ressi

Editorial n°3

Ressi — 29 mars 2006


Editorial N°3

Nous avons le plaisir de vous présenter le numéro 3 de RESSI. Notre appel à collaboration n'est pas resté vain puisqu'encore une fois encore l'équipe de rédaction a pu compter sur votre soutien pour alimenter cette parution.

Notre livraison comprend deux articles dans la rubrique Etudes et recherches. Jean-Philippe Accart se penche sur l'histoire et l'évolution du mot « documentation ». Francine Courtial et Gilbert Lenoir nous proposent l'évaluation d'une collection de revues dans le but d'orienter le fonds d'une bibliothèque spécialisée en cancérologie.

Notre souhait de privilégier des auteurs résidant en Suisse mais de rester ouverts aux auteurs internationaux est encore une fois réalisé puisque de ces deux articles proposés, l'un est écrit par un professionnel de la Bibliothèque nationale suisse et l'autre provient de l'Institut de cancérologie Gustave Roussy en France.

Le dossier Comptes rendus d'expériences nous conduit au Nicaragua où Rosemarie Fournier, bibliothécaire suisse travaille pour la coopération internationale depuis plusieurs années et où Céline Bize, étudiante de 3 ème année dans la filière Information documentaire de la Haute école de gestion de Genève a effectué un stage de trois mois à l'Institut d'Histoire du Nicaragua et d'Amérique Centrale à Managua.

Dans le dossier Evénements, Linda Beaupré et Hélène Laverdure, respectivement de la Sûreté et du Ministère du travail du Québec, nous donnent un aperçu du colloque international sur la gestion de l'information numérique qui a eu lieu à Tunis du 14 au 16 avril 2005, et résument leurs interventions sur leurs deux expériences de gestion électronique des documents (GED). Hélène Madinier et Ariane Rezzonico, de la HEG de Genève nous proposent un compte rendu du Congrès Online Information 2005 qui s'est tenu à Londres en décembre dernier et a mis en évidence l'importance des réseaux sociaux dans l'information en ligne. Wikis, blogs, gestion de l'information dans les organisations et évolution du rôle des professionnels de l'information ont particulièrement intéressé nos collègues dans ce congrès.

Dans la rubrique Ouvrages parus en Science de l'information, Claire Peltier, de la Haute école de gestion de Genève, nous propose la recension en français d'un ouvrage en anglais sur les bibliothèques numériques. Robert Barth, de la Hochschule für Technik und Wirtschaft de Coire (Chur), nous propose une recension en allemand d'un ouvrage sur la bibliothéconomie.

Nous remercions les auteurs qui ont contribué à ce numéro et d'ores et déjà nous attendons les articles qui viendront remplir les colonnes du numéro 4.

Le Comité de rédaction

  • Publié par Ressi

« Documentation » : un mot, une histoire, une actualité autour d’un métier

Ressi — 29 mars 2006

Jean-Philippe Accart, Bibliothèque nationale suisse, Berne

 Résumé

La documentation a désormais son histoire et intéresse la recherche en sciences de l'information. Les évolutions actuelles de la technologie ont une incidence sur le contenu du métier de documentaliste au sein des organisations, avec pour conséquence un élargissement de la définition même de la documentation. Englobée dans la notion d'information, la documentation touche de près au Records Management ou au Knowledge Management . Cet article fait le point sur l'histoire et le sens du mot « documentation » au travers du prisme des évolutions actuelles, et, en corollaire, sur l'évolution du métier de documentaliste.

Mots-Clés: 
Documentation
Dernière modification: 
24/06/2009

« Documentation » : un mot, une histoire, une actualité autour d’un métier

La documentation – et plus largement les sciences de l'information et de la communication (SIC) – s'enrichit régulièrement d'ouvrages, articles ou écrits de recherche sur son histoire (1) : ce champ disciplinaire intéresse donc les chercheurs en sciences de l'information qui focalisent leur réflexion sur des thèmes particuliers tels l'évolution du métier, le document, le document numérique, la recherche d'information, l'indexation ou les classifications dans une perspective historique. Le contexte actuel de l'information montre que, même si l'histoire de la documentation est récente – un peu plus d'un siècle – certaines idées visionnaires émises à la fin du XIXe siècle resurgissent grâce aux technologies de l'information (2) ce qui permet une mise en perspective avec le développement des réseaux. On peut y voir un signe de maturité, voire de reconnaissance qui montre, à l'évidence, un changement dans la perception de cette discipline, considérée longtemps comme une technique de traitement du document quels que soient la forme et le support de celui-ci. En 1993, la revue de l'ADBS (3), Documentaliste, sciences de l'information , publiait un numéro spécial intitulé « Contributions à l'histoire de la documentation en France » (4) avec, entre autres, des articles de Jean Meyriat, un des pères fondateurs des sciences de l'information en France, de Marie-France Blanquet, d'Yves Le Coadic et de Bruno Delmas. Plus de dix ans ont passé : qu'en est-il aujourd'hui du terme « documentation » ? Comment est-il analysé, perçu ? Est-il à ranger dans la catégorie des termes obsolètes ou garde-t-il son actualité ? Inspiré en partie de ces publications, cet article fait le point sur le sens, l'histoire et l'actualité du mot « documentation ». En corollaire, l'évolution du métier de documentaliste apparaît comme fortement liée aux sens actuels accordés au terme « documentation ».

Les mots et leur sens

En considérant les différentes définitions des dictionnaires, encyclopédies et manuels (5), il est peu de dire que le mot « documentation » revêt plusieurs réalités, qui sont toujours actuelles :

  • Il représente l'activité professionnelle ou la fonction exercée par les documentalistes ;
  • Il désigne le service – en tant que lieu – où se pratique cette activité au sein de l'entreprise ;
  • Il englobe l'action de se documenter, c'est-à-dire d'utiliser un certain nombre de moyens pour effectuer une recherche documentaire ;
  • Il signifie enfin une collection de documents et la façon de les organiser en vue d'une diffusion d'information.

La plupart des définitions font référence au fait que « documentation » vient de « document ». Jusqu'au XVIIe siècle, le document est pris dans un sens juridique : venant du latin « documentum », il est « ce qui sert à instruire », il est une preuve (Blanquet, 1993). Les auteurs des années 1920-1950 ont souligné le caractère cognitif du document, comme résultat, trace, preuve d'un traitement cognitif effectué par son auteur. Plus tard, une définition plus large sera donnée : un document est porteur de connaissances, il sert à démontrer. Il possède des caractéristiques physiques (sa forme) et des caractéristiques intellectuelles (son contenu). Il se définit actuellement par sa nature (écrit, imprimé, numérique…), son support et son mode de diffusion (Accart, Réthy, 2003). Le caractère cognitif du document est amplifié par les recherches récentes des chercheurs en sciences de l'information, le document dit « numérique » fait également l'objet de toutes les attentions (6).

Les historiens des mots situent l'apparition du mot « documentation » vers 1870 (7) . Le verbe « documenter » est employé et le Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française de Paul Robert (8) le définit comme étant « l'action de fournir des documents ». Il prend aussi le sens de « renseigner ».

Nous devons le sens actuel du mot « documentation » à certains précurseurs ainsi qu'à certaines associations professionnelles (Meyriat, 1993). En 1895, Paul Otlet et Henri Lafontaine sont les premiers à utiliser ce terme : la définition qu'ils en donnent est très large car, englobant la bibliographie, elle est la science qui permet la fourniture de tous les documents sur un sujet donné (Otlet, 1934). Au début du XXe siècle, les termes bibliographie et documentation sont alors complémentaires, la nouveauté de la documentation étant la diffusion, la mise à disposition de l'information (Fayet-Scribe, 2000). Elle s'ouvre sur l'information, traite les documents ; le support prend une place secondaire. En 1931, l 'Union française des organismes de documentation (UFOD) se met en place : c'est la première association professionnelle de documentalistes, qui donnera les bases de création de l'ADBS en 1963. L'UFOD précise les règles et les normes de la profession, elle définit une terminologie de la documentation et fait adopter « documentaliste » au lieu de « documentariste » ou « documentateur » (9), jugés trop techniques (10) . Le relais sera pris par l'Institut national des techniques de la documentation (INTD) en 1950. A partir de cette deuxième moitié du XXe siècle, l'informatique commence à être utilisée pour traiter les données ; l'information scientifique et technique (IST) se met en place. On parle de plus en plus de gestion automatisée des documents, de recherche automatique. La notion de documentation, en ce qu'elle exploite le contenu des documents, se développe en complément de la gestion matérielle, le terme est défini dans les dictionnaires (Comberousse, 2005). A l'heure actuelle, cette définition s'applique toujours, et correspond en partie aux évolutions du métier.

Les mots et leur actualité

Maryvonne Holzem précise à juste raison que le terme « documentation » est dorénavant associé de manière systématique à « information », montrant ainsi qu'en lui-même ce terme seul n'est plus aujourd'hui suffisamment porteur de sens (Holzem, 1999). Dans les années 1990, l'association professionnelle des documentalistes a modifié le développé de son sigle (ADBS) en « Association des professionnels de l'information et de la documentation ». Les dictionnaires et encyclopédies actuelles donnent des définitions de ces termes : le document est désigné comme « un écrit, un objet ayant valeur de preuve, de témoignage ou d'information ». Le verbe documenter signifie « fournir des documents, des informations à… ». La documentation est « l'action de rechercher et d'utiliser des documents, des informations » ; c'est également « un ensemble de documents réunis ». Le documentaliste, lui, est chargé de « réunir, classer, diffuser des documents (pour le compte d'une collectivité, d'un service public, d'une entreprise, etc., ou pour appuyer un travail de recherche, une étude) ». Une évolution notable dans ces définitions est le terme d' « action » auquel est relié le fait de « rechercher et d'utiliser des informations »: cela est relativement nouveau et renforce l'image d'un métier qui va au-devant de l'information, par conséquent dynamique où la notion de service à l'utilisateur est implicite. Le terme « information » prime cependant de plus en plus sur celui de « documentation » ; le verbe « diffuser » est également employé et l'utilisateur est enfin cité. Le lien entre documentaliste, information-documentation et utilisateur est établi, ce qui n'était pas le cas auparavant. D'aucuns trouveront ces définitions trop restrictives et ils auront raison. Les instances officielles ou associatives apportent leurs propres définitions : le Répertoire opérationnel des métiers (ROME), édité sur Internet par l'Agence nationale pour l'emploi, donne dans sa dernière édition une fiche signalétique complète du métier (11). L'Euroréférentiel des emplois-types de l'information-documentation publié par l'ADBS (12) détaille et définit les différents aspects du métier : 49 métiers liés à la documentation sont listés ; à titre de comparaison, ils étaient 22 en 1999. Cette inflation des dénominations montre bien la diversification réelle du métier – et donc du sens du mot documentation - et même si la présence de certains métiers dans cette liste peut apparaître inadaptée car relevant plutôt des métiers de la communication ou informatique (communicateur technique, enquêteur professionnel, gestionnaire de données…), elle révèle un souci réel de l'ADBS d'être la plus exhaustive possible dans son approche et une volonté de rassembler des métiers qui ont pour dénominateur commun le traitement et l'organisation de l'information. Cette liste permet de repérer trois grandes tendances :

  • en premier lieu , le fait que le métier est de plus en plus dominé, comme la société dans son ensemble, par les technologies de l'information et de la communication (TIC) ;
  • en second lieu , la complexification des tâches à l'intérieur du métier, avec des catégories plus spécifiques : l'analyste-indexeur, le documentaliste-archiviste, le documentaliste-audiovisuel, le gestionnaire de langage documentaire, l'informateur-orienteur, le chargé d'études documentaires…
  • en troisième lieu , la dimension stratégique de l'information dans les organisations fait apparaître d'autres métiers utilisant les compétences techniques du métier de documentaliste : administrateur de service électronique d'information (télématique ou type Intranet/Internet), gestionnaire de données, animateur de réseau documentaire, concepteur multimédia…

Les mots et la réalité

La technologie des réseaux, loin de faire disparaître la documentation, fait apparaître ce mot sous un autre jour : la définition de la documentation s'élargit, elle est de plus en plus liée à des techniques qui relèvent des archives, de la veille d'information ou de la mémoire d'entreprise. Prenons les métiers de records manager , de knowledge manager ou de veilleur, que certains voient comme des appellations différentes de celui de documentaliste : records manager est plus proche du métier d'archiviste, mais fait appel également à des techniques documentaires. La notion de mémoire d'entreprise constituée par la documentation interne de l'entreprise n'est pas étrangère aux documentalistes. Le métier de knowledge manager est parfois exercé par un documentaliste, mais plus souvent par un expert - ou un réseau d'experts - au sein de l'entreprise. La documentation n'est pas du Knowledge Management : organiser des savoirs propres à des individus, faire la relation entre des individus, des savoirs et des expertises nécessitent parfois d'autres compétences que celles de documentaliste. Ce dernier peut, dans certains cas, être partie intégrante du réseau des savoirs mis en place au sein de l'entreprise, proposer de relier bases d'information et bases de connaissances, extraire les connaissances contenues dans les documents : c'est un maillon de la chaîne, essentiel certes, mais pas suffisant. Le métier de veilleur, quant à lui, est proche de celui de documentaliste, c'est une extension de son rôle qui demande expérience et connaissance de l'environnement interne et externe de l'entreprise. La plupart des documentalistes ont une partie de leur activité orientée vers la veille : ils attirent l'attention de leurs utilisateurs sur tel ou tel document, site Web, article ou ouvrage récemment parus, définissent des profils, s'abonnent à des produits d'information électronique. Ils réalisent des synthèses d'actualité. L'activité de veille est fortement répandue dans certains secteurs de l'activité économique (militaire, pharmaceutique, bancaire, technologie de pointe…) : le terme de « renseignement » s'applique parfaitement à la veille, et la documentation retrouve ainsi une de ses définitions premières. Dans le domaine administratif, le statut récent de chargé d'études documentaire dans la fonction publique française (13) montre que la réalité a changé : le chargé d'études documentaires est un cadre, il doit être capable de fournir une information pointue, organisée, sous forme de dossier documentaire, de résumé. Les exigences du concours sont élevées, un niveau de spécialisation important est demandé au candidat.

Ces différents exemples permettent d'affirmer qu'actuellement la documentation a changé de rôle et de positionnement dans les organisations, et donc de définition. Cela est dû à une conjonction de phénomènes dont certains ont déjà été décrits : le niveau intellectuel, une formation universitaire, une identité professionnelle qui s'affirme, la place grandissante de la technologie, un niveau d'exigence élevé de la part des institutions et des organisations. La place prise par l'information dans l'entreprise est un autre facteur d'évolution non négligeable. La fonction documentaire a tendance à être diffuse, de même que l'information. Après une ère de centralisation de l'information sous forme de services dédiés, nous voyons apparaître des services éclatés au sein des entreprises ou des institutions et parfois même des responsabilités autrefois attribuées à une seule personne distribuées à plusieurs.

Conclusion : Le présent et l'avenir

Au travers de ce qui précède, nous avons vu le sens du mot « documentation » évoluer et s'enrichir avec le temps, englobé ou associé avec la notion d'information : il donne un autre contenu au métier de documentaliste, plus large, plus étoffé et qui correspond mieux à la réalité. En 2006, la situation de la documentation évolue : tout en gardant ses bases traditionnelles, le métier est de plus en plus conditionné par la technologie et les réseaux, au point même de poser la question de son utilité : la documentation n'est-elle (ou ne sera-t-elle pas) pas remplacée par le « tout-numérique », avec l'accès facilité aux ressources électroniques ou le développement des moteurs de recherche sans la nécessité pour l'utilisateur de recourir à un intermédiaire ? Il est encore trop tôt pour donner une réponse claire. Les questions au cœur du métier restent cependant aussi sensibles : orientation, accès, validation, coût de l'information sont parmi les points-clés qui caractérisent le monde de l'information aujourd'hui et auxquels les documentalistes peuvent apporter une réponse. Le « tout-numérique » implique maintenant une nouvelle définition de la documentation : exercer dans ce secteur induit implicitement de savoir rechercher, organiser et diffuser l'information à l'aide des technologies. Technologie et documentation sont étroitement liées et le seront probablement pour longtemps.

NOTES

(1) Voir la bibliographie pour les dernières publications et également les travaux de la SFSIC (Société française des sciences de l'information et de la communication :http://sfsic.free.fr/)
(2) Notamment l'idée de la bibliothèque universelle chère à Paul Otlet et les récents développements du moteur de recherche Google avec le projet GooglePrint.
(3) ADBS : Association des professionnels de l'information et de la documentation :http://www.adbs.fr
(4) Documentaliste, sciences de l'information , 1993, vol. 30, n° 4-5
(5) Larousse, le Robert ou Le Littré pour les dictionnaires ; Encarta, Universalis, Hachette, le Dictionnaire encyclopédique de l'information et de la documentation pour les encyclopédies et les dictionnaires encyclopédiques.
(6) De nombreux groupes de recherches en sciences de l'information existent. Pour mémoire :
- Institut des Sciences du Document Numérique (ISDN) :
http://isdn.enssib.fr/institut/institut.html
- Groupe de Recherche "Document Numérique et Usages", Université Paris VIII :
http://doc.univ-paris8.fr/ http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001020.html
(7) Cité dans : « Cours de licence Documentation » :
http://www.sha.univ-poitiers.fr/documentation/sciencesinfo.html(Université de Poitiers).
(8) Edition 2000.
(9) Au cours dea années 2000, l'ADBS a lancé une réflexion auprès de ses adhérents sur le changement de nom du métier, « documentaliste » étant jugé peu adapté aux évolutions en cours. « Information Manager » a notamment été proposé, mais au final, le terme de « documentaliste » est resté.
(10) L'UFOD a vu son action continuer avec la création de l'ADBS en 1963.
(11) Répertoire opérationnel des métiers (ROME) - Code ROME 32214 - Spécialiste de la gestion de l'information:http://rome.anpe.net/candidat/index.php
(12) ECIA (2004). Euroréférentiel I&D. 2 Niveaux de qualification des professionnels européens de l'information-documentation. Paris, ADBS. ISBN 2-84365-069-0.
(13) Concours interministériel mis en place en 1998.

BIBLIOGRAPHIE

ACCART Jean-Philippe, RETHY Marie-Pierre (2003). Le Métier de documentaliste . Paris, Electre-Le Cercle de la Librairie. ISBN 2-7654-0872.
BLANQUET Marie-France (1993) , La fonction documentaire : étude dans une perspective historique , vol. 30 : n° 4-5 / juillet 1993, p.199-204
COMBEROUSSE Martine (2005). Histoire de l'information scientifique et technique . Paris, A. Colin, (Coll.128 ; 213). ISBN 200-34417-1.
«Contributions à l'histoire de la documentation en France » (1993). Dossier. Documentaliste, sciences de l'information, vol. 30, n° 4-5.
FAYET-SCRIBE Sylvie (2000). Histoire de la documentation en France. Culture, science et technologie de l'information : 1895-1937 . Paris, CNRS Editions. ISBN 2-271-05790-6.
HOLZEM Yvonne (1999). Terminologie et documentation : pour une meilleure circulation des savoirs. Paris, ADBS. ISBN 2-84365-032-1.
MEYRIAT Jean (2000 ). « Robert Escarpit, la documentation et les sciences de l'Inforcom. ». Documentaliste, sciences de l'information, v ol. 37, 5-6, déc., p.326-328.
MEYRIAT Jean (1993). « Un siècle de documentation : la chose et le mot ». Documentaliste, sciences de l'information , vol. 30, 4-5, juil., p.192-198.
OTLET Paul (1934). Traité de documentation. Le livre sur le livre. Théorie et pratique . Bruxelles, Editions Mundanéum, Palais Mondial. (Réédité par le Centre de lecture publique de la Communauté française de Belgique, Liège, 1989). ISBN 2-87130-015-1.

Bibliographie complémentaire

(textes non cités dans l'article mais ayant servi à son élaboration)
BRIET Suzanne (1951). Qu'est-ce que la documentation ? Paris, Editions documentaires et industrielles.
BUCKLAND Michael K. (1997). “What is a “ Document? , Journal of the American Society for Information Science, vol. 48, n° 9, 804-809.
BUCKLAND Michael K. (1998).“ What is a “digital document ?”, Document numérique, t.2, n° 2, 221-230.
CHAUMIER Jacques (2002). Les Techniques documentaires au fil de l'histoire. 1950-2000 . Paris, ADBS. ISBN 2-84365-064-X.
DELMAS Bruno (1994). « Une fonction nouvelle : genèse et développement des centres de documentation » in Histoire des bibliothèques françaises , Paris, Electre- Cercle de la Librairie , tome 4, pp. 179-193. ISBN 2-7654-0510-7.
DUVERNE Anne (1993). "Les pionniers du savoir" , Documentaliste, sciences de l'information, vol. 30, n°6, nov.-déc.
ECIA (2004). Euroréférentiel I&D. 2 Niveaux de qualification des professionnels européens de l'information-documentation. Paris, ADBS. ISBN 2-84365-069-0.
FONDIN Hubert (2001). « La science de l'information : posture épistémologique et spécificité disciplinaire » . Documentaliste, sciences de l'information, juin, vol . 38, n° 2, pp. 113-122.
FONDIN Hubert (2002). « La « science de l'information » et la documentation ou les relations entre science et technique ». Documentaliste, sciences de l'information , juin, vol. 39, n° 3, pp. 122-129.
Histoire des bibliothèques françaises (1992). sous la dir. de Martine Poulain. Paris, Electre-Cercle de la librairie. ISBN 2-7654-0510-7.
LE COADIC Yves-François (1994). La science de l'information , Paris, PUF, « coll. Que sais-je ? », n° 2873. ISBN2-13-046831-9.
Les origines des sciences de l'information et de la communication (2002). SFIC, sous la dir. R. Boure. Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion. ISBN 2-85939-745-0.
Recherches récentes en sciences de l'information : convergences et dynamiques (2002). Sous la dir. de Viviane Couzinet et Gérard Régimbeau, en collab. avec Josiane Demeurisse, Joëlle Devillard, Patrick Fraysse et Francine Pavan. Actes du colloque international organisé les 21 et 22 mars 2002 à Toulouse par l'équipe Médiations en information et communication spécialisées (MICS) du LERASS (Université Toulouse 3). ISBN 2-84365-059-3

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  • Documentation

N°3 mars 2006

Ressi — 29 mars 2006

Sommaire - N°3, Mars 2006

  • Editorial n°3

Etudes et recherches :

  • « Documentation » : un mot, une histoire, une actualité autour d’un métier - Jean-Philippe Accart
  • Evaluation d'une collection de revues : identification d'un noyau de revues en cancérologie - Francine Courtial et Gilbert Lenoir

 Comptes-rendus d'expériences :

  • L’information numérique et les enjeux de la société de l’information - Linda Beaupré et Hélène Laverdure
  • Une bibliothécaire et une stagiaire bibliothécaire au pays des volcans- Rosemarie Fournier et Céline Bize

Evénements :

  • Congrès Online information 2005: la montée en puissance des réseaux sociaux - Hélène Madinier et Ariane Rezzonico

Ouvrages parus en Science de l'information :

  • Digital Libraries: principles and practice in a global environment - Claire Peltier
  • Besprechung Petra Hauke Bibliothekswissenschaft quo vadis ? - Robert Barth
  • Publié par Ressi

L’information numérique et les enjeux de la société de l’information: Colloque scientifique international du 14 au 16 avril 2005 à Tunis

Ressi — 29 mars 2006

Linda Beaupré, Sûreté du Québec, Canada

Hélène Laverdure, Ministère du Travail, Canada

Dernière modification: 
24/06/2009

L’information numerique et les enjeux de la societe de l’information: Colloque scientifique international du 14 au 16 avril 2005 à Tunis

Le Colloque scientifique international tenu à Tunis du 14 au 16 avril 2005 était présenté en marge du Sommet mondial de la société de l'information qui aura lieu en novembre 2005. Le thème reposait essentiellement sur la gestion de l'information numérique, thème qui occupe aujourd'hui une place incontournable dans toutes les stratégies de développement des organisations. Les sous-thèmes suivants figuraient au programme du colloque : Les sciences de l'information à l'ère du numérique, les réseaux d'information et les usages des données numériques, l'information numérique et les stratégies de développement, et bien d'autres. A cette rencontre étaient conviés des enseignants universitaires et chercheurs, des professionnels de l'information, des chefs de projets en entreprise ainsi que des cadres supérieurs issus des secteurs clés de l'économie.

C'est dans le contexte de ce colloque international que nous avons présenté nos projets de conférence au comité scientifique qui les ont acceptés. Nos communications ont traité, d'une part, de la mise en œuvre de la gestion électronique des documents (GED) au sein de la Sûreté du Québec et, d'autre part, du projet Corail du ministère du Travail du Québec relatifs aux relations du travail en ligne.

Résumé de la conférence

La gestion électronique des documents : véritable catalyseur vers un changement de paradigmes

La Sûreté du Québec dépend, entre autres, des informations qu'elle détient pour accomplir sa mission et fournir les services adéquats à la population, aux institutions et aux entreprises. La qualité, la protection et l'accessibilité de cette information sont déterminantes pour la réalisation des opérations et l'atteinte des objectifs. Pour la Sûreté , l'information constitue sa matière première et l'essentiel de sa production. On constate que la gestion de l'information, tous supports confondus, est aujourd'hui au cœur des préoccupations des organisations. Elle fait l'objet de nombreux questionnements et suscite un intérêt certain quant au souci de prendre les dispositions nécessaires en vue d'en assurer un traitement adéquat. Conséquemment, la Gestion électronique des documents (GED) s'avère être un véritable catalyseur vers un changement quant aux pratiques de gestion des documents, et ce, sans égard aux supports. Elle est actuellement le meilleur moyen technologique pour assurer la gestion de l'actif informationnel, et ce, de la collecte ou de la création des documents jusqu'à leur disposition finale. Sans compter que dans nos administrations modernes les actifs informationnels accusent une croissance importante, rapide et soutenue. Ce phénomène est constaté entre autres par l'avènement des outils bureautiques et d'Internet, notamment l'utilisation massive du courrier électronique pour échanger les informations. Au terme de son implantation, la GED facilitera la gestion et la conservation des documents par l'informatisation du Plan de classification et du Calendrier de conservation ; elle favorisera également la centralisation de certaines opérations de contrôle ainsi que la systématisation du déclassement dans les unités administratives. Tout ceci sans pour autant mettre en péril les principes de sécurité décentralisée et de cloisonnement des accès aux différentes unités administratives. L'implantation de la GED participera également à la consolidation des besoins, facilitera l'intégration des activités de gestion des documents et offrira de multiples possibilités aux utilisateurs. Elle évitera la prolifération de technologies disparates et répondra tant aux besoins spécifiques des utilisateurs qu'aux besoins institutionnels dans ce domaine d'activités.

Ma participation à ce colloque à titre de conférencière a contribué au rayonnement de l'organisation tout en offrant une occasion de partager mon expertise en Gestion électronique des documents et d'aller voir, à l'extérieur du Québec, l'état d'avancement des travaux dans le domaine. Cet événement a également permis à la Sûreté et à moi-même d'enrichir notre potentiel de connaissance dans le domaine. L'expérience s'est avérée des plus enrichissantes!

Linda Beaupré
Sûreté du Québec
Responsable du Module de la gestion des documents
Service du développement des projets organisationnels
Division de la gestion de l’information
1701, rue Parthenais, local 7.43
Montréal (Québec) H2K 3S7 CANADA

Résumé de la conférence

Corail, les relations du travail en ligne

Le ministère du Travail et la Commission des relations du travail (CRT) du Québec sont à élaborer un nouveau service en ligne afin de mieux desservir les besoins de leurs clientèles internes et externes. Les documents visés concernent les relations du travail au Québec. Plus précisément, il s'agit des conventions collectives, des sentences arbitrales de grief, des dossiers d'accréditation ainsi que certaines décisions de plaintes relatives à l'emploi. Certains documents jugés confidentiels ne seront disponibles qu'à la clientèle interne. Une fois mise en place, la solution préconisée devra intégrer les principales fonctions de gestion électronique des documents, de numérisation des documents sur support papier, de recherche et consultation, de diffusion électronique et finalement de tarification des services. Elle sera également basée sur une architecture ouverte et évolutive permettant de répondre adéquatement aux besoins de gestion documentaire pour la clientèle interne ainsi qu'aux besoins de recherche des différentes clientèles internes et externes. Cette solution devra finalement permettre au Ministère d'assurer le respect de la législation et des orientations gouvernementales en vigueur au Gouvernement du Québec en matière de gestion documentaire.

L'amélioration du service à la clientèle du Ministère et de la CRT a été la principale motivation des autorités permettant au projet de voir le jour. Plusieurs bénéfices ont également été considérés, on n'a qu'à parler de la rationalisation des espaces d'entreposage, du partage de documents électroniques et de la protection des documents. La solution développée se divise en trois sous-systèmes soit la numérisation, l'indexation et la conversion en format PDF; le dépôt et la diffusion des documents à nos clientèles internes; la diffusion à nos clientèles externes.

Dès le début du projet, on souhaite que la numérisation des documents permette la destruction du support papier. Les processus et les mécanismes de conversion vers un support numérique doivent garantir l'intégrité des documents. Par conséquent, le traitement est entièrement automatisé et les outils développés permettent d'obtenir et de conserver les renseignements authentifiant un document numérisé. L'outil de gestion électronique des documents assure la conservation, la diffusion et la gestion des documents visés par le projet. Le principal avantage pour les utilisateurs reste sans contredit une plus grande autonomie dans la recherche et le repérage de documents, quels qu'ils soient. Il est maintenant possible aux clientèles internes de faire des recherches directement dans le texte des documents mais également en utilisant les métadonnées associées à un document. Une interface a été développée spécialement pour la diffusion à nos clientèles externes. Celles-ci pourront accéder aux documents au moment qui leur convient et ce, dès 2006, en s'abonnant à Corail pour une journée, un mois ou une année.

Hélène Laverdure
Ministère du Travail
Chef du service de la gestion documentaire
Direction des ressources financières et matérielles
200 Chemin Sainte-Foy, 5e étage,
Québec (Québec) Canada G1R 5S1

En conclusion

Notre participation à ce colloque nous a permis de partager nos expériences respectives avec des gens provenant de différents pays et d’approfondir certains aspects de l’information numérique. La majorité des conférences auxquelles nous avons assisté étaient d’ordre théorique. Ce que nous retenons particulièrement de ce colloque est la difficulté de concilier théorie et pratique. Les ressources humaines et financières étant limitées, comment trouver le temps de répondre aux besoins des utilisateurs tout en prenant un temps de réflexion sur l’impact de nos processus archivistiques sur l’évolution fulgurante de l’information numérique?

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  • Information numérique
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Une bibliothécaire et une stagiaire bibliothécaire au pays des volcans

Ressi — 29 mars 2006

Rosemarie Fournier,

Céline Bize, Haute Ecole de Gestion, Genève

Résumé

Rosemarie Fournier, bibliothécaire suisse, travaille pour la coopération internationale depuis plusieurs années. Elle décrit son expérience en Bolivie et au Nicaragua et parle des difficultés et des satisfactions de sa collaboration avec des bibliothécaires de pays en voie de développement.
Céline Bize, étudiante à la Haute École de gestion de Genève (Filière Information documentaire) raconte ses trois mois de stage passés à l'Institut d'histoire du Nicaragua et d'Amérique centrale , à Managua, Nicaragua.
Dernière modification: 
26/06/2009

Une bibliothecaire et une stagiaire bibliothecaire au pays des volcans

Introduction

Peut-être est-ce trop de livres de voyage,
trop de récits d'aventures…
peut-être est-ce la fenêtre ouverte
du service de prêt et renseignements de la Médiathèque Valais…
je suis partie loin, longtemps…
(Rosemarie Fournier)

Tout a commencé un jour d'automne 1998 à Bienne. Là se trouve Cinfo http://www.cinfo.ch/, centre d'information, de conseil et de formation sur les professions de la coopération internationale et de l'aide humanitaire. Cinfo organise périodiquement des journées d'information destinées aux personnes intéressées par une expérience de travail à l'étranger. Mon mari et moi avons assisté à l'une des ces journées et avons ainsi fait la connaissance d'E-Changer http://www.e-changer.ch/. Nous avons été immédiatement séduits par sa philosophie, par le sérieux de la préparation au départ et du suivi sur le terrain.

Mouvement d'envoi de volontaires au Sud, plus particulièrement en Amérique latine, E-Changer a son siège à Fribourg, Suisse. Son activité principale est la formation et l'accompagnement de personnes qui s'engagent pour une expérience de vie dans un pays où leurs compétences professionnelles et personnelles peuvent appuyer un projet. C'est avec eux que nous sommes partis trois ans en Bolivie et que nous avons signé un nouveau contrat pour deux ans à Managua, Nicaragua.

Nous avons mis sur pied un groupe de soutien à notre projet. C'est une exigence d'E-Changer: le travail de fourmi que nous accomplissons au Sud doit être relayé en Suisse. Ce groupe de soutien est constitué de toutes les personnes -connues ou inconnues- qui ont envie de suivre notre travail et d'en savoir plus sur un pays qu'ils ne visiteront peut-être jamais. Nous l'avons appelé "hormiga", qui veut dire "fourmi" en espagnol. Pourquoi? Parce qu'une fourmi toute seule ne peut pas faire grand-chose mais mettez-en quelques centaines ensemble et vous verrez qu'elles sont capables de changer leur monde! Le travail d'information et de sensibilisation se fait à travers de notre site Internet www.hormiga.ch, d'articles d'information dans différents médias et de lettres circulaires adressées aux membres.

Les bibliothèques des pays en voie de développement

Vous pouvez bien l'imaginer: une bibliothèque bolivienne ou nicaraguayenne n'a pas grand-chose à voir avec ses homologues helvétiques. La plupart du temps, les livres sont rares, obsolètes, en mauvais état. Les bibliothécaires sont peu ou pas formés. Les locaux sont vieillots, petits, mal adaptés. Le public est rare… Quant la propre bibliothèque nationale d'un pays n'a AUCUN budget d'acquisitions, on peut imaginer à quel point la situation est grave. Il y a heureusement quelques exceptions. A Managua, par exemple, la Banque centrale (el Banco Central) a sa propre bibliothèque qui ferait bonne figure dans une ville européenne: catalogue en ligne, libre-accès, collections actualisées http://biblioteca.bcn.gob.ni/. L'arbre qui cache la forêt…

La coopération internationale, pourtant très active dans le domaine de l'éducation, appuie très peu de projets bibliothéconomiques. Pourquoi? Il serait intéressant de faire une étude sur ce thème. Personnellement, je pense que les bibliothèques du Sud souffrent d'un manque de visibilité. Elles ne sont pas reconnues par les instances qui gèrent l'aide au développement. Il faut dire à leur décharge que le thème n'est pas très spectaculaire et que personne ne souligne son importance. Les bibliothécaires du Nord ont certainement une part de responsabilité dans cette indifférence. Il n'est pas dans leur tradition de collaborer et d'appuyer leurs collègues moins bien lotis.

Mon travail en Bolivie (1)…

Mon premier contact avec une bibliothèque bolivienne fut à Tarija, au centre pour enfants handicapés où mon mari appuyait l'équipe éducative. Ce centre possède une petite bibliothèque de quelque 200 titres sur les thèmes de l'éducation spécialisée et du handicap. Même les étudiants de la Faculté de psychologie ou ceux de l'Ecole normale viennent consulter ces livres car nulle part ailleurs à Tarija, ville de 150'000 habitants, on n'en trouve l'équivalent. La Bibliothèque municipale de Tarija n'a ni catalogue, ni budget d'acquisitions, ni service de prêt. En Bolivie, si un lecteur ne rend pas un livre emprunté, on retient le prix dudit livre sur le salaire du bibliothécaire. La photocopie est une véritable industrie: faute d'argent pour acheter les livres, on les photocopie à tour de bras dans l'une des nombreuses officines qui entourent chaque université. Le piratage est également florissant. Comment les blâmer? Quand plus de 60% de la population est en dessous du seuil de pauvreté (moins de deux dollars par jour), l'achat d'un livre est simplement impossible.

J'ai collaboré de manière bénévole à différents projets de bibliothèques, à Tarija et à La Paz. Je me suis heurtée à chaque fois au manque crucial de moyens matériels. Même l'achat de crayons, de papier ou d'étiquettes peut se révéler problématique. Par bonheur, la motivation et l'envie d'en savoir plus ne coûtent rien. Le personnel de ces bibliothèques m'a toujours accueillie avec enthousiasme. Il m'a fallu du temps pour comprendre leur situation. Je découvrais une nouvelle réalité, celle d'un pays tellement pauvre que le moindre bout de papier prenait de la valeur. Paradoxalement, pour pouvoir leur offrir mon aide, je me suis appuyée sur eux. C'est ensemble que nous avons cherché des solutions raisonnables pour améliorer leur bibliothèque. Bien sûr, il y eut des moments de découragement, des désillusions, des déceptions… Le plus difficile pour moi, ce fut peut-être la force d'inertie de certains organismes ou de certaines personnes et le temps fou que prend l'accomplissement de la moindre tâche. Ma notion du temps et celle des Boliviens ne se sont jamais bien accordées, malgré tous nos efforts.

Durant mon séjour bolivien, j'estime avoir reçu bien plus qu'apporté, tant du point de vue professionnel que personnel. J'ai appris à exercer mon métier de manière différente et j'ai appris que le cœur peut plus que la raison. Je garde un souvenir lumineux de ces trois années au pays des lamas.

… et au Nicaragua

J'étais encore en Bolivie quand j'ai entendu parler d'un poste de coopérante au Nicaragua. Premiers contacts électroniques avec la directrice, premiers échanges de vue, premiers rêves… L'idée s'est avérée irrésistible, la réalité aussi. A la fin de notre contrat, nous avons fait escale à Managua avant de rentrer en Suisse afin d'examiner de près le projet et le lieu de vie. La décision fut vite prise: après la Bolivie , vive le Nicaragua !

María de los Ángeles Chirino Ramos , la directrice de la bibliothèque et archives de l'IHNCA (2), que nous appelons familièrement Marielos, se désespérait de trouver un jour une bibliothécaire coopérante pour former son personnel. Elle est cubaine et vit au Nicaragua depuis une vingtaine d'années. C'est la seule personne diplômée en bibliothéconomie de l'institut et elle se rend parfaitement compte de l'importance d'une formation. Elle m'a donc accueillie à bras ouverts. C'est ainsi que, depuis janvier 2005, je me rends chaque jour à la Universidad Centroamericana où se trouve l'IHNCA, Instituto Histórico de Nicaragua y Centroamérica . Mon travail porte essentiellement sur deux axes:

  • la formation en bibliothéconomie: deux heures de cours par semaine donné à tout le personnel de bibliothèque et archives, ainsi qu'un soutien plus individuel le reste du temps
  • un appui en renforcement institutionnel: ce dernier s'est révélé nécessaire pour dynamiser et rationaliser les procédures de travail.

Ce projet est atypique pour différentes raisons. Normalement, la plupart des volontaires travaillent dans des milieux populaires, avec des mouvements de base, avec une population défavorisée, dans des conditions qui peuvent être difficiles. Je suis dans un institut faisant partie d'une université; mes collègues sont toutes licenciées universitaires. De plus, la plupart sont attentives à ce qui se passe dans le pays et les discussions que nous avons sont enrichissantes et éclairantes pour moi.

Autre point vital: les partenaires du sud accueillent généralement les volontaires avec beaucoup d'enthousiasme mais les problèmes ne tardent pas. Le décalage entre la description du projet et la réalité du terrain est un fait quasi incontournable et peut causer de sérieux problèmes. Rien de tel à l'IHNCA. Je me sens acceptée et reconnue. Je crois que mes collègues apprécient mes cours (du moins me le font-ils savoir à travers les évaluations). Je ne voudrais pas sembler présomptueuse mais réellement j'ai l'impression d'apporter une petite pierre utile à cet édifice.

Ce type de projet, relativement nouveau pour E-Changer, possède un potentiel de développement très important. Le fait que le partenaire sud soit aussi solide, fiable et motivé est un gage de progrès. Le fait que mes collègues soient capables de propager l'enseignement reçu est un gage de durabilité. Le fait que la direction de l'IHNCA soit convaincue de l'importance de l'apport d'une coopérante et qu'elle le valorise est un gage de succès.

Une stagiaire de la HEG à l'IHNCA

En 2004, lors de mon séjour en Suisse, j'avais signalé à la HEG que, si un(e) étudiant(e) parlant espagnol souhaitait faire son stage pratique au Nicaragua, j'étais tout à fait disposée à l'accueillir et à suivre son stage.

C'est ainsi que Céline Bize a séjourné trois mois à Managua, accomplissant son stage au sein de l'équipe de l'IHNCA. Cette expérience fut tout à fait positive. Je me sentais responsable car, après tout, c'est moi qui avais offert cette possibilité à la HEG. Par bonheur, Céline est une personne très compétente, très professionnelle. Son stage s'est bien déroulé et l'IHNCA est tout à fait prêt à examiner un autre dossier de stagiaire pour l'an prochain!

Le séjour de Céline à l'IHNCA s'inscrit parfaitement dans la philosophie de mon travail de coopérante. C'est un élément de plus dans la sensibilisation Nord-Sud. Maintenant, Céline, sa famille, ses amis, ses camarades de classe connaîtront un peu mieux la réalité nicaraguayenne.

Différence de mentalités

Dans une entrevue récente (3), une travailleuse sociale brésilienne qui collabore avec E-Changer donnait une réponse intéressante à la question de savoir ce qui avait attiré son attention lors de son voyage en Suisse:

"En premier lieu, j'ai découvert la frénésie helvétique. Ici tout est très rapide. Les heures sont millimétriquement calculées. L'horloge fonctionne intensément. Tout est très méthodique et j'ai pu constater l'attention énorme au travail dans les endroits où je me suis rendue. Les Suisses sont très objectifs et sérieux. Comprendre ce rythme a été un apprentissage important. J'ai été très étonnée de la relation des gens avec le temps. Je l'ai ressenti par moments comme quelque chose de stressant. J'ai senti parfois le risque que la qualité de vie soit menacée par le fait de courir et de courir. Le temps conditionne tout. Une certaine rigidité des corps, la tension de l'embrassade comme salutation, si on s'embrasse..."

De quoi faire réfléchir, non? Depuis que je vis dans le Sud, j'ai eu maintes occasions de constater à quel point nos priorités diffèrent. Si pour nous, l'heure est sacro-sainte, ici c'est la rencontre. Donc, si je suis avec un ami et que l'heure tourne, ce n'est pas grave. Si j'arrive en retard (ou pas du tout) à mon prochain rendez-vous, tant pis. L'important, c'est ici et maintenant. A la bibliothèque, cela se traduit par des piles de livres partout, des plans de travail annuels qui ressortent plus du domaine du rêve que de la réalité, un flou dans les procédures de travail qui ferait le désespoir de n'importe quelle direction de bibliothèque suisse. Comment trouver ma place là-dedans? Je l'avoue, j'ai souffert et je souffre encore! Les mots clés sont s'adapter et relativiser. S'adapter à une autre culture et arriver à se fondre dans le paysage sans perdre ses propres repères. Il ne s'agit pas d'effacer ce qui fait ma différence mais de faire en sorte qu'elle cohabite le plus harmonieusement possible avec l'autre. Relativiser est aussi essentiel: est-ce vraiment si important si le tableau des statistiques du prêt n'est pas d'une clarté éblouissante? Ce qui compte, c'est que l'on mette sur pied des statistiques, même si elles ne sont pas parfaites. La comparaison entre là-bas et ici est stérile, la transposition impossible. C'est ce qui fait toute la richesse du défi: inventer quelque chose de nouveau en s'appuyant sur une expérience professionnelle acquise dans des conditions totalement différentes, et en tenant compte d'une réalité à mille lieues de la Suisse.

Efficacité et rendement

La quantité de travail accomplie ici ne peut en aucun cas se référer aux normes suisses. Tout prend tellement de temps! La faute à la bureaucratie que l'on retrouve partout. Un exemple: si je veux disposer du beamer le vendredi après-midi pour mon cours, je dois faire à chaque fois une demande écrite au moyen d'un formulaire ad hoc. Je l'envoie par courrier électronique et de plus j'en apporte une copie imprimée, signée, au responsable du service informatique. Quelqu'un viendra tout exprès installer et désinstaller le beamer (chose que je pourrais très bien faire moi-même). Le temps passé à ce genre d'exercice et la paperasse accumulée (on ne jette rien) font que le rendement est assez bas.

La difficulté à rationaliser les procédures de travail est réelle. Je suis chargée de l'appui à la réalisation d'un manuel de procédures. On m'avait dit qu'il était déjà quasiment terminé et qu'il manquait juste le peaufinage de quelques détails. Nous sommes en décembre et il n'est toujours pas fini… C'est un peu ma faute: mes suggestions de simplification et de rationalisation de certaines tâches ont demandé une longue réflexion. C'est un peu leur faute aussi: il est très difficile de prendre des décisions relatives à la politique de la bibliothèque et de s'y tenir. On décide que l'IHNCA est une bibliothèque de consultation, sans prêt à domicile, mais on multiplie les exceptions; la finance d'inscription est de 10 dollars mais c'est vraiment "à la tête du client" et au bon vouloir de la direction. On ne s'en sort plus. Toutefois il faut souligner qu'un manuel de procédures est encore quelque chose de relativement nouveau au Nicaragua. C'est tout à l'honneur de l'IHNCA de vouloir se doter d'un tel instrument de travail.

Mieux vaut en rire

L'humour est un support de premier plan dans la rencontre des cultures. Il aide à éviter les frictions. Si on parvient à rire de ses propres travers, on se gagne déjà un grand capital de sympathie. Quand mes collègues me mettent en boîte à propos de ma ponctualité jamais en faille, je me sens acceptée, reconnue dans ma différence.

L'humour est un excellent instrument de travail dans la coopération. On ne sait jamais comment quelqu'un prendra une remarque ou une critique même constructive. Il y a toujours le risque de tomber dans le stéréotype de l'étranger qui sait (normal, il vient d'un pays développé ) et qui a la bonté de faire bénéficier l'indigène de ses connaissances. Une manière d'éviter cette attitude paternaliste, c'est de ne pas se prendre trop au sérieux.

L'enseignement peut être très vertical dans ce pays. C'est quelque chose de sérieux, qui ne laisse pas beaucoup de place à l'élève. La pédagogie du prof-qui-sait et de l'élève-qui-écoute-et-apprend est encore très utilisée. Une de mes "élèves" m'a dit un jour qu'elle appréciait le fait de pouvoir dire une "bêtise" pendant mes cours, sans avoir peur que je me fâche. Cela m'a conforté dans ma conviction de laisser les cours ex-cathedra au vestiaire et de me lancer à fond dans les cours participatifs, multipliant les travaux de groupe, les présentations d'élèves, les jeux de rôle… Je ne finirai peut-être pas le programme de formation prévu pour ces deux ans mais je sais que les sujets abordés seront bien assimilés.

Bilan à mi-chemin

Je suis à l'IHNCA depuis une année. Je parle de l'IHNCA en disant "nous" parce que je me considère partie prenante de cette institution. Je prends chaque jour comme il vient, sans essayer de voir plus loin que le prochain cours ou la prochaine réunion de travail. Même si j'ai un plan de travail à suivre, j'apprends l'improvisation. Je perds chaque jour un peu plus de ma "raideur suisse". Je me surprends même à arriver en retard, c'est dire. Le climat de Managua y contribue certainement. La chaleur intense, la touffeur des jours, l'humidité ambiante durant la saison des pluies… c'est tout simplement impossible de garder le même rythme de travail qu'au Nord.

En 2006, je poursuivrai ma tâche: former mes collègues et collaborer au renforcement de l'institution. Si les catastrophes naturelles nous épargnent, si les élections présidentielles se déroulent sans émeutes, si l'université continue à financer l'IHNCA, si tout va bien, je terminerai mon contrat en décembre 2006. Je rentrerai en Suisse avec un bagage professionnel et personnel bien plus lourd que celui que j'avais en arrivant. J'aurai sûrement encore bien d'autres choses à vous raconter… En attendant, je passe le clavier à Céline Bize, afin qu'elle vous conte son expérience !

Rosemarie Fournier, décembre 2005

Notes

(1) Voir Lire, mais en Bolivie / Rosemarie Fournier. - Arbido, 2003, vol. 18, no 9, pp. 25 - 26.
(2) Institut d'histoire du Nicaragua et d'Amérique centrale (Managua)
(3) Una mirada a la cooperación suiza con ojos del sur / Sergio Ferrari. - Nov.2005

 

L'IHNCA

L'Institut d'histoire du Nicaragua et d'Amérique centrale à Managua est une institution de l'Université d'Amérique centrale (UCA) consacrée à la recherche, la diffusion de l'histoire et la gestion du patrimoine documentaire. Sa mission est de produire et de délivrer des connaissances nouvelles sur l'histoire du Nicaragua et de l'Amérique centrale; préserver, enrichir et diffuser le patrimoine culturel en appliquant les technologies de l'information et de la communication (TIC). Pour cela, il promeut la recherche et l'échange académique; il développe de nouvelles méthodes d'enseignement de l'histoire; il organise des cours, conférences et expositions; il publie des textes et des revues spécialisées et gère des fonds documentaires.

L'IHNCA possède une bibliothèque et un centre d'archives importants. Les collections furent initiées à partir de 1934 par les Jésuites. Il s'agissait de rassembler la documentation existante sur l'histoire du Nicaragua et de l'Amérique centrale. Cette tâche fut spécialement difficile dans un pays régulièrement dévasté par des révolutions, des guerres, des tremblements de terre, des inondations et autres catastrophes. Actuellement, l'Institut détient des livres, documents manuscrits, périodiques, cartes, photographies, vidéos, microfilms, cassettes sonores... Il possède même une importante collection de céramique précolombienne, de masques et de peintures. Le catalogue d'une partie de ces fonds est automatisé et consultable en ligne.

Tu pars au Nicaragua?

Novembre 2004, je rentre chez moi d'une journée de cours à la Haute École de gestion de Genève , où j'étudie en filière information documentaire. Dans le train, une de mes camarades me demande : «Alors Céline, tu vas faire ton stage au Nicaragua?». Je ne comprends pas sa question… je n'ai pas encore vu l'e-mail qui nous annonce qu'une bibliothécaire suisse qui part pour deux ans au Nicaragua est d'accord d'accueillir un/e stagiaire, mais mes amis savaient déjà que je serais intéressée. Aimant les voyages et ayant déjà l'idée dans un coin de ma tête de participer un jour à un projet de coopération, je me dis que c'est une occasion unique qui se présente à moi. Mon stage ne me permettrait pas seulement de mettre en pratique les connaissances acquises durant les deux premières années de mes études, mais aussi de me confronter à une réalité professionnelle différente de celle que je pourrais trouver en Suisse et de découvrir une nouvelle région du monde.

Septembre 2005, l'atterrissage est plutôt difficile. Quatre jours après la fin des examens, je me trouve loin de chez moi, dans un pays que je ne connais pas. Toutefois, je trouve tout de suite un environnement familier dans la bibliothèque et l'accueil est chaleureux. Après une semaine d'introduction où j'ai l'occasion de visiter tous les services, il est temps de commencer les tâches qui m'ont été confiées.

Recherches sur Internet

Une partie de mon activité a consisté à faire des recherches sur Internet pour élaborer un guide de ressources utiles aux utilisateurs mais aussi aux bibliothécaires qui sont peu habitués à utiliser Internet. Mes recherches se sont effectuées sur deux axes: des ressources utiles pour le personnel des services au public et d'autres ayant pour thème la bibliothéconomie. Je me suis vite rendu compte des difficultés qu'un tel travail peut comporter dans un pays comme le Nicaragua. La mauvaise connexion à Internet et certains ordinateurs obsolètes ont rendu le travail plus compliqué que prévu.

J'ai aussi été confrontée à un problème de langue. En effet, la plupart des bibliothécaires de l'Institut ne maîtrisent pas l'anglais. Il y a donc des ressources auxquelles ils ont plus difficilement accès. Cela a particulièrement été le cas dans le domaine de la bibliothéconomie. Il existe un certain nombre de portails consacrés à ce thème en espagnol, mais parfois même sur des sites hispanophones, tous les liens renvoient à des ressources en anglais. Je trouve aussi dommage que, par exemple, le portail de l'UNESCO pour les bibliothèques ne propose pas une version en espagnol.

A ces difficultés s'ajoute un sentiment de frustration, celui de ne pas pouvoir proposer un autre type de ressources qui pourraient être très utiles. En effet, durant la deuxième année de cours, nous avons appris à utiliser les bases de données commerciales. Il est évident qu'ici, il est impossible de pouvoir se les offrir. C'était donc à chaque fois une déception quand je tombais sur le site d'une banque de données ou d'un périodique électronique intéressant mais coûteux. Heureusement, les ressources non payantes se développent, comme les archives ouvertes ou les périodiques électroniques gratuits. Il y a aussi des bases de données bibliographiques gratuites mais dans ce cas la difficulté est de fournir le document lui-même. Il existe par exemple un projet d'archives ouvertes pour l'Amérique latine mais, malheureusement, il n'en est qu'à l'état de test pour le moment. Il faut donc apprendre à prendre son temps et oublier nos standards européens. Lors de mon travail, je me suis aussi demandé à quel point les ressources trouvées peuvent être utilisées. Parfois la connexion à Internet est tellement lente que l'on peut rapidement se décourager.

La collection Dariana

L'autre moitié de mon travail a consisté à corriger le catalogage de la collection «Dariana», selon les normes AACR2. La bibliothèque possède en effet une bonne partie des œuvres de et sur Rubén Darío, grand poète nicaraguayen. Je devais donc, à partir de l'inventaire de la collection, vérifier le catalogage de chaque ouvrage, lui attribuer des descripteurs pris dans une liste restreinte et lui allouer une cote basée sur la classification Dewey. Je devais aussi compléter certains champs non remplis ou encore assigner un numéro de registre, unique pour chaque exemplaire. Il fallait aussi vérifier que la même édition ne fasse pas l'objet de deux notices catalographiques, ce qui était parfois le cas quand l'ouvrage se trouvait dans plusieurs fonds. Il s'est avéré que certains livres n'avaient pas leur place dans la collection, comme par exemple les textes écrits par les fils et petit-fils de Darío. Dans ce cas, ils ont été sortis de la collection et intégrés dans un autre fonds. Dewey, AACR2 sont autant de points de repère , même loin de chez soi. L'utilisation de normes et de standards ne permet pas seulement un meilleur échange de données, mais aussi de se retrouver en milieu familier, même dans un environnement très différent et de pouvoir pratiquer ce que j'ai appris en Suisse au Nicaragua. Par contre, j'ai eu quelques problèmes avec CDS/ISIS, le logiciel utilisé pour le catalogue. L'interface est peu conviviale et il m'a fallu du temps pour maîtriser certaines fonctions.

Petit bilan

Lors de ce stage, j'ai pu mettre en pratique mes connaissances en matière de recherche sur Internet et faire profiter la bibliothèque de ma plus grande habitude de l'utilisation de cet outil. Évidement, le travail que j'ai effectué n'est qu'un point de départ. Les documents que j'ai rédigés sont amenés à évoluer, au fur et à mesure que de nouvelles sources apparaissent ou que d'autre disparaissent.

Sur un plan personnel, cela m'a permis de faire des découvertes, tant sur le domaine Amérique latine que dans le domaine de la bibliothéconomie, autant de ressources qui pourront m'être utiles dans le futur. Toutefois, ce travail m'a demandé beaucoup de patience, qui n'est normalement pas une de mes qualités, et de flexibilité. J'ai aussi eu la satisfaction d'avoir assez de temps pour terminer les tâches qui m'avaient été confiées, aussi bien pour le guide de ressources que pour la collection Dariana , qui est maintenant entièrement recataloguée.

En prenant la décision de partir au Nicaragua, mon but n'était pas seulement centré sur la pratique professionnelle ; je souhaitais évidemment aussi découvrir une autre partie du monde et pratiquer une langue étrangère. J'ai pu faire un peu mieux connaissance avec la réalité nicaraguayenne en voyageant dans le pays, en lisant la presse quotidienne et en assistant à des conférences sur des thèmes d'actualité. Il n'est pas impossible que dans quelques années, je parte pour un projet de coopération quelque part dans le monde, mais je ressens aussi le besoin d'acquérir de l'expérience en Suisse, pour pouvoir ensuite en faire bénéficier d'autres personnes. Une chose est sûre, cette aventure m'a renforcée dans le choix de ma formation. En effet, dans un contexte où l'accès aux ressources documentaires est rendu plus difficile pour plusieurs raisons (financière, linguistique, technique...), je me rends mieux compte de l'importance du rôle que les professionnels doivent jouer pour faciliter l'accès à l'information.

Je garderai un bon souvenir de mes collègues et de l'ambiance de cette bibliothèque, même si pour moi, trois mois ont été trop courts pour m'intégrer complètement dans ce pays si différent. Toutefois, je resterai attentive aux événements et à l'évolution de ce coin du monde.

Céline Bize
Étudiante de 3e année
Haute École de gestion (Genève)
Filière Information documentaire
Décembre 2005

  • Publié par Ressi
  • Bibliothèque
  • Haute Ecole de Gestion (Genève)

Congrès Online information 2005: la montée en puissance des réseaux sociaux

Ressi — 29 mars 2006

Hélène Madinier, Haute Ecole de Gestion, Genève

Ariane Rezzonico, Haute Ecole de Gestion, Genève

Mots-Clés: 
Blog, Congrès Online Information, Wiki
Dernière modification: 
24/06/2009

Congres Online information 2005 : La montée en puissance des réseaux sociaux

Le congrès Online Information 2005, qui s'est tenu du 29 novembre au 1 er décembre, pour sa trentième édition, a rassemblé quelque 775 délégués d'une quarantaine de pays, et plus de 9700 visiteurs autour de 250 exposants.

Comme les années précédentes, plus de 30 conférences et une centaine de séminaires en libre accès (free seminars) en marge de l'exposition ont été organisés.

Donc une assez bonne tenue par rapport à Online 2004 ; même si les éditeurs scientifiques, au niveau de l'exposition sont surreprésentés.

Plusieurs grandes tendances se dégagent:

  • l'importance des réseaux sociaux dans l'information, illustrée par la vogue des outils comme les wikis et les blogs, auxquels était consacrée toute une session;
  • la démocratisation de la recherche et ses conséquences ;
  • la participation des professionnels de l'information à la gestion de l'information dans l'organisation, qui a fait l'objet d'une session entière (track «managing enterprise content») pendant les 3 jours du congrès.

On décrira ici l'évolution des outils de recherche, les wikis et les blogs, et des exemples particulièrement intéressants de gestion de l'information et d'innovation dans des bibliothèques, illustrant la nécessaire évolution des rôles des professionnels de l'information.

Mais tout d'abord, il nous paraît important de rendre compte de la conférence d'ouverture, donnée par David Weinberger, professeur-chercheur associé au centre Berkman d'études sur Internet et la société, centre rattaché à la faculté de droit de Harvard. (1)

Sa conférence, intitulée « the shape of knowledge- everything is miscellaneous » a esquissé quelques grandes tendances, non sans provocation.

On en citera deux:

  • Les gens cherchent par eux-mêmes, ils n'ont plus besoin d'intermédiaires ; les professionnels de l'information doivent décidément abandonner l'idée de servir de filtres. Même si leur façon de rechercher n'est pas toujours adéquate, les travailleurs du savoir trouvent grosso modo ce qu'ils cherchent: « pretty good is good enough ».

S'il est indéniable que les utilisateurs recherchent eux-mêmes l'information, que les experts connaissent les sources fiables, et qu'il faut revoir le rôle de l'intermédiaire en conséquence, n'a-ton pas intérêt ici à aller à contre-courant de cette tendance et à démontrer l'importance de la validation de l'information ? Il y a eu ici des objections de l'assistance, remarquant que l'on ne peut se satisfaire d'informations non validées dans les domaines scientifiques, juridiques etc…, domaines dans lesquels la validation de l'information est parfois vitale…

Cette tendance a parfois été confirmée par plusieurs intervenants qui citaient des utilisateurs pensant que « si l'information n'est pas sur Google, c'est qu'elle n'existe pas ».

  • C'est le partage de connaissances qui crée de nouvelles connaissances, c'est via les connexions humaines, l'interaction, favorisées par les nouveaux outils comme les wikis et les blogs. On travaille maintenant de plus en plus selon un mode social, de «peer to peer», de réseaux sociaux.

Cette dernière tendance s'est trouvée dans les faits confirmée par plusieurs conférences :

Que ce soit des réalisations basées sur des blogs et des wikis, des systèmes de gestion de contenu (CMS) et de gestion des connaissances (KM), toutes ces initiatives ont en commun une forte composante communautaire, sociale, et on verra la place que peuvent y trouver des professionnels de l'information.

Outil de recherche, wikis et blogs

Outils de recherche

Les grands moteurs de recherche, à savoir « The Big4 » (comprenant Yahoo, MSN, Google et Ask), évoluent vers des applications offrant de plus en plus de services personnalisés. Si jusqu'à présent, la taille des index était un critère discriminant dans le choix d'un moteur, on remarque qu'actuellement la concurrence se joue sur la recherche verticale (segmentée par domaine ou par champ), la catégorisation des résultats ou encore l'intégration de contenus. Google multiplie les applications comme Google Base, Google Books, Google Blog Search, etc. Yahoo a développé une version beta d'un outil Yahoo Mindset (2) qui offre la possibilité d'orienter les résultats selon leur nature commerciale ou non. Cette fonctionnalité (que l'on utilise en positionnant un curseur) permet de choisir ce que l'on souhaite privilégier comme type d'information et les résultats seront issus de sources plus académiques ou institutionnelles. Yahoo propose depuis quelques temps la recherche de podcast dans une version beta (3). Cette nouvelle application permet de récupérer des fichiers audio ou vidéo et de les télécharger sur son baladeur numérique ou de les consulter directement sur son ordinateur.

Ask (4) offre de nouvelles possibilités permettant d'étendre ou de restreindre les résultats d'une recherche. Quant à la recherche sur ses propres fichiers (desktop search), tous les grands outils affinent leurs fonctionnalités mais la protection des données n'est pas garantie, particulièrement dans le cas de Google qui garde une copie des fichiers même si ceux-ci ont été effacés sur son ordinateur.

Les wikis

L'apport des wikis dans le monde professionnel est de plus en plus important. Un wiki permet à un groupe un travail collaboratif. Si les wikis se sont révélés très utiles pour publier des guides de voyages, des dictionnaires ou des encyclopédies, leur usage est de plus en plus répandu que ce soit sur un intranet ou sur internet. En gestion de projet, le wiki permet de publier des documents, de les mettre à jour, de les corriger et de conserver toutes les versions antérieures. On peut également utiliser un wiki pour planifier un travail. Le wiki ne nécessite pas d'application coûteuse et complexe et remplace parfois des échanges de courriers électroniques au sein des entreprises. Son utilisation ne requiert pas de compétences particulières de la part des collaborateurs. Toutefois, l'implantation et la mise en œuvre demandent des aptitudes en informatique pour choisir un outil de création et maintenir le fonctionnement du wiki. Si l'on ne veut pas créer son propre serveur on peut utiliser des serveurs externes qui offrent gratuitement ou non les logiciels ainsi que l'hébergement de l'application. Le contenu non structuré du wiki se distingue des pages structurées de l'intranet et il est important de définir clairement les usages propres à chacun.

Quant à Wikipedia, le wiki le plus connu, son créateur Jimmy Wales a présenté son fonctionnement et la manière dont sont assurées la gouvernance et la vérification du contenu des articles. Selon Jimmy Wales, la gouvernance de Wikipedia est « un mélange de consensus, de démocratie, d'aristocratie et de monarchie ». Beaucoup de rédacteurs sont étudiants et un nouveau sujet est vérifié à travers le « Google Test ». Ce test effectué sur Google permet de vérifier l'existence d'un thème. S'il n'y a pas de réponse, les experts considèrent que le sujet ne doit pas figurer dans l'encyclopédie .

Les blogs et la blogosphère

Cette année, une session entière leur était consacrée et des expériences originales ont été présentées tant dans l'enseignement supérieur, dans les entreprises ou dans les medias. La simplicité pour le mettre en œuvre, la création de communautés, la visibilité et le partage d'information sont les points forts des blogs. L'accroissement du nombre de blogs va se poursuivre et Technorati (5) (outil de recherche et de création) offre l'accès à plus de 25 millions de blogs.

Le quotidien anglais « The Guardian » propose une quarantaine de blogs à ses lecteurs. Il est certain que l'usage des blogs leur a permis de mieux présenter des informations par l'ajout de photos, de vidéos, de podcast, etc. Les lecteurs sont invités à participer à ces blogs en insérant leurs commentaires ou en partageant des analyses d'événements avec les journalistes. Tous les domaines couverts par le Guardian sont représentés : les sports, les jeux, les actualités, la culture, la politique, etc. Les quarante blogs du Guardian ont déjà généré plus de 85000 commentaires. Les lecteurs ont également la possibilité de réagir entre eux à des informations trouvées sur les blogs. On retrouve dans ces usages la notion de réseau social qui est le point fort de ces nouvelles applications. L'introduction des blogs a aidé le Guardian à mieux restituer des informations et à créer un véritable contenu multimédia.

Une autre illustration de l'usage des blogs a été présentée par l'entreprise IBM. IBM a choisi d'utiliser le blog comme moyen de communication avec ses collaborateurs et ses clients. Tout collaborateur peut animer son blog pour autant qu'il ne divulgue pas d'informations confidentielles ou nuisant à l'entreprise. IBM a mis en place des procédures destinées à accompagner la création des blogs. Ceux-ci peuvent être professionnels ou non. Certains blogs d'IBM ont une orientation marketing permettant aux consommateurs de s'informer sur les produits et de les commenter. D'autres blogs sont internes à l'entreprise et permettent l'échange d'information entre experts. Ils sont utilisés comme outil de Knowledge Management. Des développeurs partagent leurs recherches et la collaboration entre équipes s'en trouve renforcée. IBM recense environ 12000 blogueurs dans plus de 70 pays. Que ce soit en gestion de projet, en veille ou en KM, la simplicité de gestion du blog liée à la possibilité d'archiver les informations publiées, voire d'en syndiquer une partie offre aux collaborateurs des entreprises une source d'information inépuisable.

La gestion de l'information dans les organisations

Plusieurs expériences de gestion d'information dans les organisations ont été relatées.

Les noms de ces réalisations sont bien sûr tous différents mais il est frappant de constater que la démarche ainsi que les facteurs de succès et d'échec et les enseignements à en tirer sont souvent très proches. Ici encore, on constate l'importance des réseaux sociaux.

Certaines réalisations sont basées sur des portails. Dans tous les cas, il s'agit de mieux gérer les informations internes ou externes.

Il y a autant de spécialistes de portails que de définitions précises (6), mais on peut cependant considérer qu'un portail est un cadre supportant des sites Intranet, Internet, et Extranet; il intègre des applications et des processus à l'intérieur et au-delà des frontières de l'organisation.

On rendra compte des quatre exemples suivants (7) :

  1. Le choix d'un système de gestion du contenu (CMS) à l'Université de Reading, au Royaume-Uni
  2. La mise en œuvre d'un portail à l'université d'Utrecht, aux Pays-Bas
  3. La reconception du portail de gestion de contenu à TDC cable TV, au Danemark
  4. La mise en œuvre d'un système de gestion des connaissances à Swiss Re, Zurich

1. L'équipe de projet de l'Université de Reading devait convaincre la direction de choisir un CMS, d'élaborer l'appel d'offres et de procéder à sa mise en œuvre, sachant que coexistaient des centaines de contributeurs en interne avec des compétences techniques variables, un grand nombre de sites Web: plus de 64 000 pages de contenu et plus de 80 serveurs Web, le tout sans coordination centrale, ni stratégie de contenu.

La mise en œuvre du nouvel outil s'est accompagnée de la rédaction de guides de réutilisation du contenu et de guides de style de contenu à l'intention des différents contributeurs.

Une grande part de succès réside dans la «politique»: la nécessité de communiquer, de recueillir l'adhésion, de convaincre les sceptiques. Pour cela, il faut créer des comités avec des experts internes, recruter des consultants, faire des liens avec la stratégie d'entreprise, et faire un audit des contenus.

Il est aussi utile de choisir un site-pilote (ici le site de recrutement pour étudiants postgrades), permettant de tester la technologie, le personnel et les processus.

Dans l'appel d'offres, il est essentiel de ne pas trop détailler, de donner des scénarios d'utilisation du système, et d'indiquer clairement les exigences essentielles.

Pour le choix, il faut définir des critères pondérés de technologies, d'usage, et de processus, et demander des démonstrations des scénarios.

Même si cette présentation était davantage axée sur la façon de choisir, elle insistait néanmoins sur:

  • l'accompagnement nécessaire de ces choix, en amont et en aval, permettant d'aboutir à terme à une réelle coordination de l'information externe.
  • L'importance de réaliser ce travail en équipe: en l'occurrence il était mené par le service de la communication, avec contribution des systèmes d'information, de la bibliothèque, et des représentants des étudiants.

2. la mise en œuvre d'un portail à l'université d'Utrecht, aux Pays-Bas devait permettre d'avoir accès à l'Intranet, à toutes les ressources électroniques de l'université, à la messagerie et aux applications de gestion, au travers un seul cadre et une seule authentification (single sign-on). Ce dernier aspect n'est pas encore mis en œuvre, de même que l'intégration d'applications trop différentes. Il faut noter qu'il a fallu convaincre tous les départements de son utilité.

Enseignements tirés par l'équipe de projet :

  • Un portail a besoin d'une application à très forte valeur ajoutée (killer application) pour justifier les coûts; à Utrecht, cela a été le cas pour l'accès aux ressources offertes par la bibliothèque,
  • Le fait que les divers utilisateurs ou groupes d'utilisateurs puissent personnaliser leurs accès, et notamment les intranets de communautés, facilement modulables, est un facteur de succès décisif.

3. La chaîne câblée danoise TDC a fait une première expérience de portail malheureuse, dont elle a tiré les enseignements.

Elle avait choisi un CMS pas encore mûr technologiquement, le projet était mené par le service informatique, qui communiquait peu.

La solution n'a pas correspondu aux attentes. Le projet a donc été re-ciblé, en l'ancrant beaucoup plus sur les besoins des utilisateurs, en communiquant mieux et en élargissant l'équipe éditoriale.

Leur mot d'ordre: « Penser grand mais commencer petit »

4. Enfin, Swiss Re, une grande compagnie de réassurance basée à Zurich compte environ 9000 employés répartis sur une trentaine de localisations dans le monde, et a mis en place un projet de KM visant à gérer la surcharge informationnelle.

L'équipe de projet a recueilli les besoins et les a agrégés sous différents axes: par sujet, par fonction, organisationnel et géographique, puis a créé deux plateformes :

  • Les réseaux de connaissances ou knowledge networks, qui comportent des bases de données, des actualités utiles à l'organisation, des outils de gestion de contenu et visent à créer et échanger des connaissances sur des sujets stratégiques et constituent ainsi des réseaux d'experts dans toute l'organisation;
  • Les pages de communautés, qui offrent également des bases de données et des actualités, mais aussi des accès à des informations et applications internes; ces pages présentent l'intérêt d'être gérées par les communautés spécifiques, qui décident elles-mêmes ce qu'elles souhaitent traiter; ce sont des plateformes self-service, prêtes à l'emploi (portlets: mini-portails pré-définis), et qui forment des intranets de communautés.

Parmi les facteurs de succès :

  • le soutien du top management et la forte implication des knowledge managers
  • l'importance des sujets qui doivent relever des tâches quotidiennes

On peut identifier des points récurrents au travers ces 4 exemples :

  • la nécessité de communiquer sans cesse pour réussir (les 3 premiers projets);
  • la coordination des communautés d'utilisateurs: on rejoint ici ce qui était annoncé comme une tendance forte en conférence d'ouverture: les utilisateurs savent chercher eux-mêmes, mais ils ont besoin d'outils spécifiques, de taxonomies, de coordination, (cf les 2 derniers projets). C'est un rôle qui peut être assumé par des professionnels de l'information.

L'évolution du rôle des professionnels de l'information: «Des collections aux connexions»

Plusieurs communications et ateliers portaient (comme souvent à Online) sur la nécessaire évolution du rôle du professionnel de l'information, mais un récit d'expérience est apparu comme exemplaire: la transformation du rôle des bibliothèques des Nations Unies à New York (8).

Exemplaire dans le processus de changement, et exemplaire du rôle d'animation souligné plus haut.

Linda Stoddart, responsable de la bibliothèque centrale des Nations Unies (Dag Hammarskjöld Library) et du groupe de travail «knowledge sharing» a tout d'abord expliqué que la bibliothèque était en quelque sorte acculée au changement : les départs n'étaient plus remplacés, les budgets coupés, et ses services de moins en moins utilisés.

Bref, c'était changer ou disparaître.

En 2004, une nouvelle structure a été mise en place avec un groupe de travail de knowledge sharing, lançant une série d'initiatives qui ont transformé peu à peu les bibliothèques, qui d'une approche orientée processus ont développé une approche orientée conseil et coaching.

Ses objectifs :

  • encourager le partage des connaissances en créant des réseaux entre les collaborateurs
  • fournir un support personnalisé

Son mot d'ordre: «From collections to connections».

Il s'agit donc de passer d'un modèle de constitution de collections à un modèle de service, de connexion: connexions entre les documents et les utilisateurs, entre les documents et les fonctions, et entre les utilisateurs eux-mêmes.

Ce changement a pu s'opérer en élaborant une stratégie, en la communiquant aussi bien en direction du personnel que de la hiérarchie, en utilisant un petit groupe d'agents du changement et en formant intensivement les collaborateurs des bibliothèques. Il s'est concrétisé dans de nouvelles activités :

  • la responsabilité de l'Intranet général des Nations Unies, confiée à la bibliothèque par le Secrétaire Général adjoint
  • le PKM ou Personal Knowledge management: c'est un support personnalisé aux utilisateurs: grâce à leurs connaissances des outils technologiques et des sources d'information, des collaborateurs des bibliothèques ont développé une activité de conseil et de coach auprès de l'ensemble des collaborateurs, menée en coordination avec le service des systèmes d'information.

Cela n'a certes pas été sans mal dans une institution aussi bureaucratique que l'ONU: la culture centralisée, hiérarchique, la lourdeur des procédures et la résistance au changement ont constitué de réels obstacles. En ce sens, la communication de messages positifs, la promotion de la nouvelle image, des nouvelles activités, et la mise en valeur des succès ont contribué à vaincre ces résistances.

Mais depuis deux ans, les bibliothèques de l'ONU ont beaucoup gagné en visibilité et elles ont désormais une meilleure image dans l'organisation.

Les professionnels de l'information assument ici des rôles de consultants, d'interprètes, d'animateurs de réseaux, rôles qui favorisent le partage des connaissances et l'apprentissage organisationnel.

NOTES

(1) http://cyber.law.harvard.edu/home/david_weinberger
(2) http://mindset.research.yahoo.com/
(3) http://podcasts.yahoo.com/
(4) http://www.ask.com
(5) >http://www.technorati.com/
(6) Cf présentation de Janus Boye du 1.12.2005: Portals: from idea to reality - the dangers of the current state of portals in the marketplace, cf programme 2005 http://www.online-information.co.uk/ol05/conferenceprogramme.html
(7) http://www.online-information.co.uk/ol05/conferenceprogramme.html
(8) « Innovation and change: transforming United Nations libraries »,, cf programme 2005 http://www.online-information.co.uk/ol05/conferenceprogramme.html

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Digital Libraries : principles and practice in a global environment

Ressi — 29 mars 2006

Claire Peltier

Dernière modification: 
24/06/2009

Tedd, Lucy A., Large, Andrew. Digital Libraries : principles and practice in a global environment. Münich : Saur, 2005. ISBN3-598-11627-6

Publié par deux professeurs en sciences de l'information, Lucy A. Tedd (du Département des Sciences de l'Information de l'Université britannique d' Aberystwyth, et Andrew Large (Graduate school of Library and Information Studies de l'Université canadienne McGill), ce deuxième ouvrage rédigé en tandem propose une introduction générale aux bibliothèques numériques (1).

Malgré l'existence d'une littérature déjà abondante sur la question, l'ouvrage est à bien des égards bienvenu en raison de son approche à la fois théorique et pratique. En effet, il traite à la fois de l'aspect historique des différentes technologies de l'information (de l'invention de l'écriture au e-book), des usagers et des services (compétence en recherche de l'information, services de référence numériques), des sources d'informations numériques (documents en texte intégral, publications en open access), des standards et de l'interopérabilité (métadonnées, protocoles d'interrogation), de l'organisation de l'accès aux sources d'information numériques (logiciels de gestion des documents numériques, logiciels libres), de l'esthétique des interfaces (pour attirer et garder les usagers tout en tenant compte de leur multiculturalité), de la recherche d'information numérique (recherche en texte intégral, portails), des aspects pratiques de l'implantation d'un projet de bibliothèque numérique (gestion du projet, droits d'auteur, consortiums), ainsi que de plusieurs études de cas présentant des bibliothèques numériques de différents endroits du monde.

On notera que la bibliothèque numérique de l'Open University britannique (institution dont le public est constitué d'étudiants sans qualifications mais qui sont autorisés à suivre des études supérieures) fait l'objet d'intéressants développements dans le dernier chapitre du livre. Les auteurs explicitent les raisons qui ont amené l'Open Library à implanter un service de bibliothèque numérique, doté de plusieurs milliers de périodiques électroniques, de sources de référence rapides en ligne de thèses en ligne, etc. Ils signalent aussi que l'Open Library propose à ses usagers certains services personnalisé tels que des chats en direct avec un bibliothécaire pour obtenir de l'aide à la recherche, des cours en ligne sur les sources d'information numériques, etc.

L'enjeu de la formation à la recherche de l'information fait l'objet d'un développement dans le chapitre intitulé ( Users and Services) , dans lequel les deux auteurs développent le concept d'" information literacy" . Celui-ci a trait, entre autres, aux aptitudes d'identifier un besoin d'information, de construire une stratégie de recherche, de comparer et d'évaluer les sources d'information, etc. Dans la partie intitulée " Libraries and Information Media in Historical context ", les auteurs insistent sur le fait que la révolution numérique actuelle change la manière dont l'information est utilisée aujourd'hui dans le monde. De leur point de vue, l'émergence de l'information numérique ne constitue rien d'autre que la dernière nouveauté d'une longue liste de développements technologiques remontant, pour les plus anciens, à l'Antiquité. Cette (ré)volution constitue une chance pour la promotion du savoir, à condition que l'éducation à la recherche de l'information soit assurée. Dans cette optique, Lucy Tedd et Andrew Large insistent sur l'importance de la formation des étudiants et exposent les modules de formation à distance développés au Royaume-Uni.

L'ouvrage n'omet pas de passer en revue les multiples acteurs qui proposent des ressources électroniques en texte intégral (les sociétés telles que EBSCO, ACM, Ingenta, le mouvement de l'open access). Il offre également un aperçu des différents projets internationaux en cours, ainsi qu'une typologie des métiers émergeants: architecte de l'information , médiateur de savoir , bibliothécaire hybride …

Bien structuré, truffé de définitions et conçu de manière pédagogique, cet ouvrage présente aussi le mérite d'avoir été écrit dans un anglais facile à lire. Il faut savoir gré aux auteurs d'offrir des exemples relevant d'un très large palette (y compris dans les pays non-occidentaux). La rapidité avec laquelle certains sujets sont abordés (notamment les périodiques électroniques) est compensée par une riche bibliographie annexée à la fin de chaque chapitre. Un index thématique complète l'ouvrage pour en faire un point de départ idéal pour les professionnels de l'information ou l'étudiant en sciences de l'information. Une iconographie foisonnante, malheureusement présentée en noir et blanc et dans un format peu confortable pour les yeux, complète les nombreuses références pratiques (adresses de sites web, URL de documents, etc.) insérées directement dans le corps du texte.

NOTES

(1) Ouvrage précédent : Information seeking in the online age: principles and practice / Andrew Large, Lucy A. Tedd and R.J. Hartley. – London : Bowker Saur,1999. – 308p. – ISBN 1-85739-260-4

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