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Démocratisation culturelle
« Fontaines de connaissance » ou « musées du livre » ?... Les bibliothèques municipales selon leurs non-usagers
Ressi — 30 novembre 2007
Olivier Moeschler, OSPS Observatoire Science, Politique et Société, Université de Lausanne
Résumé
Dans toutes les grandes agglomérations, environ la moitié de la population, voire plus, ne fréquente pas les bibliothèques municipales. C’est notamment le cas à Genève, où une étude compréhensive a été menée sur les pratiques et les représentations des non-usagers de bibliothèques municipales, afin de mieux comprendre les logiques de non-fréquentation de ces établissements.
Mis à part le degré de notoriété des bibliothèques municipales ou le rapport des personnes au livre et à la lecture, ce sont les images positives et négatives associées aux bibliothèques et aux bibliothécaires qui s’avèrent être un obstacle important pour les non-usagers (qui sont souvent des ex-usagers) et qui les empêchent de réintégrer la fréquentation de ces établissements dans leurs habitudes.
L’étude, menée avec la collaboration d’une volée d’étudiants futurs bibliothécaires, procède à une radiographie sans fard de cet imaginaire qui n’échappe pas à certaines caricatures, tout en proposant des pistes pour transformer ces « ennemis symboliques » des bibliothèques en alliés et réinscrire ces établissements au cœur de la Cité.
Les bibliothèques municipales à Genève, ce sont 7 bibliothèques (espaces adultes et jeunesse), une médiathèque, un établissement dédié au sport, deux discothèques et un service de bibliobus (5 véhicules en tout), incluant un service à domicile et un service de prison, avec 190 collaborateurs au total. Pas moins de 620'000 documents sont disponibles en libre accès, et l’on dénombre 50'000 inscrits, 500'000 visites et 1'600'000 prêts annuels (7'600 prêts par jour) ainsi que 270 animations culturelles par an (1).
Toutefois, une partie considérable de la population genevoise – environ la moitié, selon un sondage récent – ne profite pas de cette offre impressionnante (2). Pourquoi ces personnes ne fréquentent-elles pas les bibliothèques municipales ? Comment devient-on un non-usager de bibliothèques ? Et qu’est-ce qui pourrait faire (re-)venir ces personnes dans ces établissements ?
Pour répondre à ces questions, une étude exploratoire a été menée par le soussigné, dans le cadre du cours « Sociologie des publics » qu’il dispense à la HEG Haute école de gestion, Filière information documentaire, en collaboration avec la Cellule étude et projets du Service des bibliothèques et des discothèques municipales, au Département des affaires culturelles de la Ville de Genève. Elle s’inscrivait dans le « Projet accueil » mené par la Cellule, dont le but est l’élaboration d’une nouvelle stratégie d’accueil – et notamment d’une Charte d’accueil – au sein des bibliothèques municipales à Genève (3). Cette démarche, inédite dans la Cité de Calvin, se base sur les résultats de trois enquêtes :
- dans un premier temps, une investigation a été menée à l’interne, auprès des équipes des différentes bibliothèques municipales à Genève. Celles-ci ont été priées de remplir un questionnaire portant sur des thèmes tels que les valeurs fondatrices, les missions et les satisfactions du métier de bibliothécaire, les compétences mobilisées, l’accueil des usagers ou encore la fonction des bibliothèques. Les conclusions de cette première enquête ont servi de base à la rédaction d’une première version de la Charte ;
- dans un deuxième temps, deux enquêtes « externes » ont eu lieu, respectivement auprès des usagers et des non-usagers des bibliothèques municipales genevoises. Ces deux études ont été menées par des professeurs de la HEG, dont le soussigné, dans le cadre de travaux pratiques d’étudiants de la Filière information documentaire. Les résultats de ces deux enquêtes ont également eu une influence sur la Charte d’accueil puisqu’ils ont été diffusés au sein des établissements au moment de la consultation interne de la première mouture de cette dernière.
Cette contribution présente les résultats issus de l’un des deux volets de l’enquête externe, portant sur les non-usagers des bibliothèques municipales à Genève. Car, si elle s’inscrit dans le contexte d’une démarche spécifique et locale, cette étude voudrait également contribuer, au-delà des frontières genevoises, à combler une lacune concernant une population assez peu connue et difficile à étudier.
On sait à travers les statistiques nationales que la majorité de la population ne fréquente pas, loin s’en faut, les bibliothèques : en France, selon la dernière édition des Pratiques culturelles des Français, en 1997, pas moins de 69% – ou sept personnes sur dix de la population française de 15 ans et plus – n’avaient pas fréquenté, dans les douze mois, de bibliothèque ou médiathèque. Cette étude nous rappelle que la fréquentation de ces établissements est directement liée à l’âge (seul un peu plus d’un tiers des 15-19 ans n’a pas fréquenté d’établissement dans les douze mois, contre 85% des 65 ans et plus), mais aussi à la catégorie socioprofessionnelle des personnes concernées : en effet, les cadres, les professions intellectuelles supérieures et les professions intermédiaires ont bien plus de chances de fréquenter une bibliothèque ou médiathèque que des ouvriers, des employés, des artisans ou encore des agriculteurs (Donnat, 1998 : 241-244) (4). De plus, cette étude révèle que si la part d’usagers a augmenté entre 1989 et 1997 en France (de 23% à 31%), ces chiffres portent en fait, on l’a dit, sur les « bibliothèques et médiathèques » ; surtout, la part d’usagers non-inscrits a augmenté elle aussi entre ces deux années, et ce plus fortement, suggérant une utilisation de plus en plus variée – pas forcément liée au prêt de supports – de ces établissements, une tendance à la diversification des usages par ailleurs confirmée récemment par une enquête du CREDOC (Maresca, 2006) (5). Les usagers des bibliothèques municipales sont par ailleurs assez bien connues : une étude menée il y a quelques années à l’échelle nationale en France en a décrit dans le détail les caractéristiques, les habitudes et les opinions (Bertrand et al., 2001).
Mais peu de choses sont connues au sujet d’une population qui, par définition, est moins facile à cerner, pour la simple raison que, précisément, elle ne se trouve pas entre les murs des établissements qu’elle ne fréquente pas, et où il aurait été aisé de les interroger. Pourtant, lors d’un colloque de sociologues de la réception tenu il y a quelques années et dont les actes viennent de paraître, l’importance de l’étude des « non-publics de l’art » – le pluriel est, on le verra, important – a été réaffirmée (Ancel et Pessin, 2004). Pour le domaine des bibliothèques, un spécialiste des publics a récemment relevé un manque de connaissances en la matière : selon cet auteur, il « serait intéressant de pouvoir disposer de travaux compréhensifs auprès des non-usagers, de façon à mieux connaître cette population et la manière dont elle perçoit l’offre des bibliothèques » (Poissenot, 2002 : 20). La présente étude s’inscrit dans la droite ligne de cette exigence de plus d’analyses qualitatives, à l’image de l’enquête du CREDOC déjà citée, menée en 2005 également auprès de focus groups.
Réalisée à Genève dans le cadre d’un travail pratique d’étudiants de première année en Information documentaire – de futurs bibliothécaires donc – à la HEG, l’étude dont on rend compte ici ne peut bien sûr remplacer une démarche qui nécessiterait, pour produire des résultats tant soit peu représentatifs, des moyens autrement plus importants. Mais elle peut fournir quelques premiers éléments de réponses aux questions posées et, partant, des pistes pour des recherches plus systématiques à entreprendre à l’avenir, à Genève ou dans d’autres agglomérations urbaines.
Comment interroger des non-usagers de bibliothèques municipales, où les trouver ? En accord avec la Cellule étude et projets, mais aussi en relation avec les possibilités données, on a opté pour une approche relativement ouverte et exploratoire : le but de cette enquête menée « hors les murs » était moins de récolter un grand nombre d’informations quantifiables sur les non-usagers que d’être à l’écoute ce ces derniers, de recueillir leur parole. La méthode choisie était donc résolument qualitative et compréhensive : c’est moins la représentativité que l’on cherchait à obtenir qu’une variété de témoignages. Ceci afin de décrire, dans le détail, les craintes et les freins, mais aussi les attentes et les désirs des non-usagers en matière de bibliothèques, et plus généralement de comprendre plus précisément les raisons de leur non-fréquentation ce ces établissements.
Un bref questionnaire-grille d’entretien a été élaboré en collaboration avec la Cellule ainsi que suite à un brainstorming des étudiants concernés, qui se sont montrés enthousiastes à l’idée d’interroger cette population à la fois peu connue et potentiellement centrale dans leur future pratique de bibliothécaires. Outre la problématique générale de la démocratisation culturelle et l’inégalité de l’accès aux lieux de culture, les thématiques et aspects suivants nous ont intéressés :
- la question de l’accueil était au centre des interrogations : les personnes ont-elles eu par la passé des (mauvaises) expériences avec l’accueil dans les établissements ?
- Plus généralement, il s’agissait de décrire les pratiques – il faudrait dire non-pratiques dans ce cas – et les représentations des individus en matière de bibliothèques : pour quelles raisons ne fréquentent-ils pas, ou plus, ces établissements ? Pourquoi n’ont-ils pas le « réflexe bibliothèque » ? Comment les personnes perçoivent-elles les bibliothèques et les bibliothécaires ? Quelle est la fonction, quels sont les avantages ou les désavantages de ces établissements à leurs yeux ?
- Au sein des répondants, on a tenu à pouvoir distinguer les non-usagers « absolus » du groupe un peu particulier des ex-usagers : en effet, les professionnels se rendent compte que, venu un certain âge, bon nombre de personnes, pourtant inscrites en bibliothèque, cessent de les fréquenter.
- On a également travaillé dans l’optique de ce qu’on appelle le « deficit model », postulant une méconnaissance de l’offre, voire de l’existence même des bibliothèques municipales : quel est leur degré de notoriété dans le quartier, et des autres bibliothèques municipales genevoises ? Les personnes connaissent-elles l’éventail de supports qui leur est proposé dans ces établissements ?
- La question des loisirs médiatiques en général des personnes nous a également intéressés ; parmi les différents supports utilisés (médias, DVD, Internet…), la question de la lecture, mais aussi du rapport à l’objet « livre », nous a particulièrement occupés : comment les personnes se procurent-elles des livres, si elles ne les empruntent pas ? Trouvent-elles important de posséder un ouvrage et pourquoi ?
- Le thème des enfants – de la non-fréquentation des bibliothèques par des parents de jeunes enfants – a aussi été considéré.
- On s’est enfin intéressé en outre à l’usage potentiel des établissements : que devrait proposer une bibliothèque selon les non-usagers, qu’est-ce qui pourrait éventuellement les faire (re-)venir en bibliothèque ?
- Les questions de profil portaient sur le sexe, l’âge, la formation, la profession, la langue, la nationalité, le domicile et les raisons de la présence dans le quartier.
Au final, le questionnaire comportait une vingtaine de questions, très souvent ouvertes, ainsi que les questions sociodémographiques. Le lecteur intéressé le trouvera annexé à ce texte.
Adaptée aux possibilités en termes de temps (l’ensemble de l’enquête devait se faire sur un semestre) et de personnel disponible (les deux classes concernées comptaient une quarantaine d’étudiants, répartis en groupes), la démarche choisie impliquait que l’on découpe la ville en une douzaine de zones, correspondant en gros aux bibliothèques et discothèques municipales existantes (plus un quartier sans bibliothèque, comme « groupe de contrôle », et un groupe s’occupant des quartiers traversés par le bibliobus), dans lesquels des « micro-échantillons » de la population étaient à interroger (6).
Dans chacune des ces zones, une vingtaine d’individus environ ont été interviewés par les étudiants (5 répondants par enquêteur) en avril et mai 2006 ; ces derniers avaient reçu l’instruction de choisir les personnes de manière aussi aléatoire que possible, tout en veillant au mieux à l’équilibre de leur échantillon de quartier (notamment en termes de sexe, d’âge et de nationalité) (7). Des tris effectués sur des données obtenues auprès de l’Office cantonal de la statistique genevois avaient permis d’avoir une image globale de la population des quartiers concernés en termes d’âge et de nationalité, ce qui pouvait servir de repère aux étudiants dans leurs enquêtes. Toute personne de 15 ans ou plus entrait en ligne de compte pour l’interrogation, pour autant bien sûr qu’elle réponde par la négative à la première question : celle de savoir si elle avait fréquenté une bibliothèque municipale genevoise dans les douze derniers mois (8). Il ne s’agit donc pas forcément d’échantillons d’habitants des quartiers concernés : en effet, vu la mobilité des personnes à l’intérieur d’une ville et la possibilité qui en découle de s’inscrire et d’emprunter dans des établissements se situant ailleurs que dans son quartier d’habitation, on a renoncé à se limiter aux seules personnes domiciliées dans la zone en question. Les échantillons concernent donc des personnes qui habitent, travaillent, font leurs courses, se promènent ou qui se trouvent pour quelque autre raison que ce soit dans les espaces publics (rues, places) du quartier concerné aux heures de pointe, à savoir à midi ou en fin d’après-midi, un jour de semaine (et c’est dans ce sens que l’on parlera dans la suite de « leur » quartier) ) (9).
Les données recueillies dans les quartiers ont fait l’objet d’un double travail de la part des étudiants. Dans un premier temps, des portraits individuels ont été réalisés pour chacune des personnes interrogées : rédigés à partir de prénoms fictifs selon des directives uniformes, le but de ces petits textes (d’une demi page environ) était de transformer en un récit et, par là, de rendre lisibles et communicables les informations récoltées au cours du mini-entretien conduit (10). Cette opération impliquait donc une mise en ordre et, déjà, un premier choix parmi les réponses des individus ; avec notamment la question de savoir quelles réponses ouvertes – jugées particulièrement révélatrices, originales, drôles ou inquiétantes – inclure comme citation dans le portrait. Puis, dans un deuxième temps, chaque groupe d’étudiants a rédigé une synthèse des réponses de son quartier, sur la base de la mise en commun et confrontation des informations recueillies par chaque membre du groupe.
Les chapitres qui suivent présentent d’une certaine manière la « synthèse des synthèses », ou un résumé des synthèses d’étudiants et des principales tendances qui se dégagent du kaléidoscope d’informations et de témoignages aussi riches que parfois inattendus recueillis auprès des non-usagers de bibliothèques municipales dans les différents quartiers de Genève. Le rapport final complet est disponible auprès de l’auteur.
La première image qui se dégage des données récoltées est celle d’une grande hétérogénéité : à lire la douzaine de synthèses de quartier et les quelque 200 portraits confectionnés par les étudiants, « le » non-usager de bibliothèques municipales – au sens d’un individu au profil typé – n’existe pas !
Sans doute qu’une analyse statistique révélerait, au sein de l’échantillon des personnes interrogées, une surreprésentation de certains groupes (socialement défavorisés) et une sous-représentation d’autres (les catégories socioprofessionnelles supérieures, dont on a dit qu’elles ont plus de chances de fréquenter les bibliothèques). Mais les réponses récoltées montrent surtout que dans tous les milieux sociaux, toutes les professions, toutes les nationalités et tous les âges, les individus ont de « bonnes » raisons – ou pensent du moins en avoir – de ne pas fréquenter les bibliothèques municipales. A l’image des pratiques culturelles elles-mêmes, très éclectiques et individualisées (Donnat, 1994 ; Lahire, 2004), le non-public des bibliothèques est, en définitive, pluriel, la non-utilisation de ces établissements prenant des formes multiples.
Le profil des personnes interrogées est donc, par définition, très hétérogène ; de fait, tout le monde peut être, ou devenir, un non-usager de bibliothèques municipales. Un des groupes d’étudiants a décrit l’échantillon très bigarré des personnes abordées comme suit : « trois étudiants, dont un qui travaille à 40% à côté de ses études, un cameraman, une femme qui travaille dans le domaine social, un ‘SDF en plus sain’, une esthéticienne, un cuisinier, un éducateur, une commerçante, un garagiste, une nettoyeuse, un rédacteur, une employée de commerce et une retraitée ». Mais dans les échantillons de certains quartiers, des tendances sont perceptibles, notamment en termes de nationalité – au moins autant en lien avec la composition de la population du quartier qu’avec des tendances concernant la population globale des non-usagers. Ainsi, dans le quartier de la Servette, l’échantillon interrogé était, selon les étudiants, « principalement de nationalité suisse » ; aux Pâquis par contre, quartier où, selon les statistiques disponibles, les personnes de nationalité étrangère sont majoritaires, les étudiants n’ont rencontré que trois Suisses sur 15 répondants, et ont décrit ce quartier comme « extrêmement cosmopolite » ; un multiculturalisme qui constitue à ne pas en douter un défi pour les bibliothèques, sur lequel nous reviendrons par la suite.
Autre tendance qui se dégage : les raisons pour ne pas, ou plus, fréquenter de bibliothèques municipales sont nombreuses et variées ; elles ne sont en aucun cas réductibles à la question de l’accueil. En effet, en règle générale, l’accueil dans les établissements ne constitue, selon les souvenirs des non-usagers (qui sont très souvent, c’est un autre résultat de cette étude, des ex-usagers), pas un problème, l’accueil étant même en majorité loué comme ayant été très bon (rappelons que les étudiants avaient reçu l’instruction de ne pas mentionner le fait qu’ils allaient eux-mêmes devenir des bibliothécaires). Seule une petite minorité de répondants avait un mauvais souvenir de l’accueil en bibliothèques, le décrivant comme « froid », « peu sympathique », « trop scolaire » ou encore ressemblant à « une corvée ». Pour le reste – et à l’image de cet étudiant guinéen à Genève de 24 ans qui décrit l’accueil dans les établissements comme « génial » –, la grande majorité des personnes interrogées ne critique pas l’accueil de la part des professionnels. Le problème est donc ailleurs.
Les raisons pour ne pas ou plus fréquenter les bibliothèques municipales qui sont le plus souvent invoquées par les non- (ou ex-) usagers sont le manque de temps, la pratique d’autres activités (le sport a plusieurs fois été mentionné), mais aussi le fait d’avoir terminé sa formation et de ne plus avoir besoin de s’y rendre, le manque d’intérêt pour la lecture mais aussi très souvent, on y reviendra, le fait de préférer posséder les livres. A noter que la question du « temps » possède deux dimensions : outre celui qui manque aux personnes, il renvoie aussi au problème, souvent relevé par les répondants, des horaires des bibliothèques, qui peuvent se superposer avec les horaires de travail des personnes, rendant matériellement difficile pour ces dernières le fait de se rendre en bibliothèque.
Un certain nombre de non-usagers font référence plutôt aux bibliothèques elles-mêmes pour justifier leur non fréquentation – on y reviendra quand il s’agira de l’image des établissements : on les trouve trop silencieux, fermés, ou dotés d’une classification des livres trop difficile à comprendre. L’éloignement du domicile est aussi évoqué, de manière intéressante par les extrêmes en termes d’âge: les personnes âgées, souvent à mobilité réduite, et les plus jeunes, qui voudraient pouvoir commander ou, au moins, choisir les ouvrages depuis chez eux, par Internet. L’argument d’un possible manque d’hygiène de livres en circulation permanente n’a été entendu qu’une fois au cours de l’enquête.
Mais en définitive, c’est en général un ensemble de facteurs, lié à un style de vie, aux habitudes de tous les jours, qui fait que l’on arrête de fréquenter les bibliothèques. Comme écrit un des groupes d’étudiants, « la plupart des personnes qui ne vont plus en bibliothèque municipale ont eu un changement dans leur vie qui fait qu’elles n’ont soit plus le temps de s’y rendre, soit qu’elles préfèrent avoir leur propre collection de livres ». Ce « changement » est, souvent, l’entrée dans la vie professionnelle : un certain nombre de répondants ont d’ailleurs explicitement renvoyé au fait qu’ils n’avaient « plus besoin » d’aller en bibliothèque, parce qu’ils ne sont plus en formation et/ou parce qu’à présent, ils disposent de moyens suffisants pour s’acheter des livres.
Un point mérite d’être relevé ici : le manque de livres dans sa langue est également souvent évoqué, par définition principalement par les personnes de nationalité étrangère mais qui représentent, on l’a dit, une proportion importante de la population, jusqu’à être majoritaire dans certains quartiers. Ici, le problème de « Culture » souvent relevé concernant les bibliothèques – au sens de la culture légitime ou classique qu’elles représentent – se cumule avec un problème de « culture », au sens anthropologique du terme cette fois : le fait qu’une partie de la population ne parle pas (encore), ou pas assez bien, la langue de la grande majorité du fonds des bibliothèques, constitue sans nul doute l’un des grands défis qui se pose aux bibliothèques, à une époque où les migrations et le brassage des populations ne cessent d’augmenter.
Autre élément important, le degré de notoriété des bibliothèques municipales genevoises et de leur emplacement. En règle générale, environ la moitié des non-usagers interrogés par les différents groupes ne savent pas qu’il y a une bibliothèque municipale dans leur quartier ; l’autre moitié en connaît le nom, mais pas toujours l’emplacement. De fait, passé la Bibliothèque de la Cité, la plus grande et la plus centrale, assez largement connue, les bibliothèques municipales genevoises ne sont pas très familières de la population et/ou ne sont pas identifiées comme telles (on peut citer le cas, étonnant, de cet écrivain et député local interrogé qui, habitant la Jonction, ne savait vraisemblablement pas que s’y trouvait une bibliothèque, et ne peut que citer l’« établissement de la Madeleine » comme bibliothèque municipale). C’est davantage le cas dans certains quartiers : ainsi, à Vieusseux, sur les vingt personnes interrogées, aucune ne connaissait la discothèque du quartier, sauf une qui en avait entendu parler mais qui n’en connaissait pas l’emplacement. Cela dépend aussi du type d’établissement : une bibliothèque spécialisée comme celle des sports, qui est de plus excentrée, est quasi inconnue: seule une personne sur les dix interrogées dans ce secteur en avait entendu parler ! Cette dernière est d’ailleurs quasi introuvable aussi : le chemin pour atteindre cet établissement, situé au milieu d’un parc somptueux, n’est, semblerait-il, signalé par aucun panneau (si bien que l’une des personnes croisées par les étudiants dans le parc cherchait la Bibliothèque des sports depuis plus d’une heure, en vain !). Le problème semble toutefois général : les étudiants ont eux-mêmes souvent constaté la situation cachée et/ou mal signalée de certains établissements (comme à la Servette, où la bibliothèque est, selon leurs témoignages, un peu en retrait, dans un bâtiment discret et à peine signalé ; la Discothèque de Vieusseux, non signalée et avec une entrée peu claire, serait presque introuvable ; la Bibliothèque des Pâquis est difficile à identifier car proche d’un bâtiment scolaire, avec lequel elle se confond ; de fait, même la Bibliothèque de la Cité, invisible depuis les rues commerçantes, est difficile à trouver pour un néophyte). D’autres bâtiments sont visibles mais souffrent d’un entretien négligé (c’est le cas de la Bibliothèque des Minoteries, dont l’extérieur défraîchi ne semble correspondre en rien à l’intérieur). Quant au bibliobus, il semblerait qu’il soit – peut-être aussi par sa localisation et ses horaires variables – très peu connu: par exemple, à Champel, seule une personne sur quinze savait que le quartier est desservi par ce bus. Bref, en termes de signalisation et de visibilité – au sens tout à fait premier du terme – des bibliothèques municipales, il y aurait sans doute, déjà, des choses à faire ; ou, comme conclu un groupe d’étudiants : « il est temps que les bibliothèques municipales se fassent connaître ! ».
Notons enfin aussi dans ce contexte que l’offre des bibliothèques est souvent mal connue des non-usagers de ces établissements. Si certains non-usagers pensent que les bibliothèques ne renferment que des ouvrages documentaires, pour ce qui est des livres, la multiplicité des titres disponibles et des domaines représentés semble grosso modo connue (comme de cette étudiante en ostéopathie, qui décrit le contenu d’une bibliothèque comme suit : « encyclopédies, romans, autobiographies, médecine, histoire, biologie, manuels, philosophie, poésie, etc. »). Mais souvent, on en reste aux livres, les services plus récents – disques, DVD, Internet – étant souvent mal, voire pas du tout connus (notamment dans certains quartiers ; ainsi, sur la vingtaine de personnes interrogées à Vieusseux, seules quatre connaissaient l’offre audiovisuelle des bibliothèques municipales). A noter aussi que le concept même de « discothèque » était inconnu d’une partie des répondants. Pourtant, les personnes interrogées utilisent la plupart de ces supports à domicile, certes moins pour les plus âgéees ; comme le dit ce groupe d’étudiants, « on remarque que les gens utilisent beaucoup les moyens de culture mis à leur disposition mais ne savent pas forcément que tous ces documents sont dorénavant disponibles dans la plupart des bibliothèques ».
Parmi les grandes tendances qui se dégagent des résultats, il y a la question des représentations des non-usagers en matière de bibliothèques. Tout d’abord la fonction des bibliothèques en général ; elle est le plus souvent décrite comme fondamentale, centrale : les bibliothèques sont là pour rendre la culture ou le savoir accessibles à tous (on parle également d’instruire ; quelqu’un a même dit « cultiver les gens »), et ce gratuitement ou à moindre frais, et donc indépendamment du niveau social des individus. Avec quelques belles images ou slogans à la clé : la bibliothèque a pu être appelée une « fontaine de connaissances » ; quelqu’un d’autre la décrit tout entière comme « un ouvrage de référence » ; de manière plus ambivalente, un répondant a parlé d’un « musée du livre », renvoyant certes à quelque chose de précieux, mais aussi de figé, de passé, voire d’inaccessible. L’aspect « historique » ou de conservation est par ailleurs également mentionné par certains. Une fonction élargie est évoquée quand il est question pour la bibliothèque d’« offrir des loisirs » voire du « divertissement ». Parfois, c’est à un rôle civilisateur plus général que l’on pense : la bibliothèque est alors décrite comme un lieu sans violence, qui vient en aide aux personnes.
La fonction sociale ou de sociabilité de ces établissements est également perçue par certains non-usagers : quand il s’agit de décrire les avantages des bibliothèques, elles sont décrites comme « espace de rencontres ». Le calme, propice au travail et à l’étude, voire simplement le fait d’avoir un moment pour soi, sont également relevés comme positifs ; comme aussi le fait de trouver les livres qui ne sont plus dans le commerce, de pouvoir feuilleter un livre avant de l’acheter en magasin, ou encore tout simplement de « trouver tous les livres qu’on veut » (quelqu’un a dit : « livres pour chacun, culture pour tous »). Un endroit plein d’avantages en somme : un répondant pense même qu’« il n’y a pas de désavantages, et c’est ça l’avantage ». A noter que parmi les personnes interrogées, les personnes de nationalité étrangère avaient souvent une meilleure image, une plus haute estime des bibliothèques que les Suisses.
Car un certain nombre de désavantages des bibliothèques sont également relevés par les répondants, qui ne sont souvent d’ailleurs que le pendant des avantages cités – ce qui rend bien sûr la tâche difficile pour toute personne qui voudrait les éliminer ! Outre les délais, les contraintes, l’attente à l’accueil ou le fait de devoir se déplacer, on critique – alors que le côté historique est relevé comme important – le fait que les nouveautés et/ou les best-sellers ne soient pas disponibles, ainsi que le choix restreint ou alors parfois à l’inverse le manque de livres dans un domaine très pointu. L’ambiance studieuse, silencieuse dérange certains – par exemple cet employé de commerce, qui dit : « les bibliothèques, c’est ‘mort’ pour moi » (quelqu’un d’autre parle d’une « ambiance de vieux ») ; on estime qu’il y a trop peu de monde, un manque d’animation, ou à l’inverse qu’il y aurait parfois foule. On se réjouit de la gratuité mais quelqu’un a fustigé les coûts des bibliothèques pour la collectivité. Si l’offre abondante a été louée, la classification et la difficulté à la comprendre sont plusieurs fois évoquées comme désavantages. Très souvent, on y reviendra, c’est l’impossibilité de garder les livres qui est regrettée.
Le premier mot qui vient à l’esprit des non-usagers en pensant aux bibliothèques reflète les aspects – ceux positifs comme ceux négatifs – évoqués : la grande majorité des personnes pense, bien sûr, à « livre » (mais nous interrogerons ce lien qui semble naturel dans la suite de cette contribution), parfois aussi à « lire », « lecture », ou encore à « bouquin » (une personne a pensé à « journaux »). Mais les répondants renvoient aussi à « silence », « renfermement », « institution », voire « vieillot », « pénible », « obligation », « chercher », « rapporter » ; un retraité, ancien gestionnaire de banques, pense d’emblée aux quatre mots suivants en songeant aux bibliothèques : « obligations, délais, chercher, rapporter » ! On pense enfin également à des mots tels que « connaissance », « savoir », « recherche », « culture » ou encore « histoire ».
Un autre élément important ici est la question de l’image des bibliothécaires auprès des non-usagers. Cette image s’avère « mitigée », selon le mot de l’un des groupes d’étudiants. Assez étonnamment si l’on songe au fait qu’il s’agit de personnes qui ne fréquentent pas, présentement, de bibliothèques, la grande majorité des enquêtés produit sans difficultés une image des bibliothécaires, sans doute un doux mélange de souvenirs d’enfance et de stéréotypes véhiculés par les films (cf. Chaintreau et Lemaître, 1993). L’image de la profession – ou des personnes qui l’exercent – qui se dégage des réponses oscille, comme peut-être le livre lui-même (qualifié par un enquêté de « loisir rigide »), du plus positif au plus négatif. Premier constat : dans la quasi totalité des cas, c’est sous les traits d’une femme qu’on imagine un – ou en l’occurrence une – bibliothécaire ; comme s’étonne ce groupe d’étudiants : « à entendre les gens, on a l’impression qu’il n’y a que des femmes dans le domaine bibliothécaire ». D’une certaine manière, tant la bonne que la mauvaise image dont jouissent les bibliothécaires est alors liée aux ambivalences des caractéristiques associées à la femme en général. Les qualificatifs positifs ne manquent pourtant pas : les bibliothécaires sont sérieuses, cultivées, avides de savoir, intellectuelles, lisent beaucoup et inspirent le respect ; elles sont sympathiques ou, du moins, attentives, serviables, disponibles ; elles ont également été décrites comme « modernes », « jolies filles »... Ne craignant pas les clichés, certains ont aussi parlé de « rats de bibliothèques », voire de « petites souris méticuleuses et méthodiques ». Les bibliothécaires sont « des personnes à la fois passionnantes et passionnées », estime quant à elle une enquêtée.
Mais, parmi les non-usagers interrogés, ce sont bien les qualificatifs négatifs qui prévalent. Dans les portraits, on ne compte pas les adjectifs tels que « sévère », « austère », « stricte », « vieux et poussiéreux », et des expressions telles que « vieilles femmes à lunettes », « femmes âgées, maigres et avec chignon très serré » (le chignon et les lunettes étant des éléments récurrents dans cette imagerie), ou encore « vieilles filles à tendance religieuse » voire « frileuses, cul-serré, enveloppées dans de grosses jaquettes »… A en croire les répondants, les bibliothécaires seraient toutes des « psychotiques du rangement », des « femmes n’ayant rien réussi dans leur vie », « frustrées par la vraie vie » qui « sont trop dans leurs livres » ! Des enquêtés ont raconté leur sentiment d’être en permanence surveillés par les bibliothécaires, certains disent même pour toute réponse : « chut ! ». Bref, on ne peut que suivre cette répondante qui, conseillère en image de profession, pense que les bibliothécaires souffrent d’« une image un peu vieillotte qu’il faudrait dynamiser ».
Un autre grand thème qui se dégage des résultats est le rapport à la lecture. On constate tout d’abord qu’une grande partie des non-usagers lit, même si les livres lus sont souvent peu nombreux et le sont prioritairement pour le travail. De fait, rares sont ceux qui admettent ouvertement ne pas lire, ou ne pas aimer le faire – comme cette jeune étudiante interrogée, qui déclare haut et fort : « lire, ça m’gave ! ». Dans la grande majorité des cas, ne pas aller en bibliothèque ne veut nullement dire ne pas lire : comme l’ont constaté les étudiants, « malgré le fait que les gens lisent beaucoup, cela ne fait pourtant pas d’eux de grands utilisateurs de bibliothèques municipales ». En majorité, les personnes qui lisent achètent leurs livres ; certains pratiquent l’échange en famille, vont au marché aux puces voire, plus rarement, les récupèrent dans la rue. La grande majorité des personnes trouve en effet – même quand elles ne lisent pas – qu’il est important de posséder ses livres. Posséder un livre donne une certaine liberté : on peut le relire, s’y replonger quand on veut (« quand on possède un livre on peut le lire pendant 100 ans et on n’est pas limité dans le temps comme c’est le cas lorsqu’on l’emprunte à la bibliothèque », a dit quelqu’un) ; on peut aussi le prêter, l’user, écrire dedans ; on l’a toujours à disposition : c’est, dans les mots des étudiants, un peu « le savoir à portée de main ».
Un grand nombre de réponses renvoient moins à la lecture qu’au rapport au livre comme objet, qui semble plus important pour les personnes que ce que l’on pouvait imaginer. Certains enquêtés évoquent l’importance des livres comme une sorte de culture accumulée : un répondant a désigné les ouvrages chez soi comme de la « culture indestructible », quelqu’un d’autre parle de « pérennité », on parle de se constituer un « patrimoine » ; les étudiants ont même rencontré quelqu’un qui, affirmant posséder près de 5'000 ouvrages à son domicile, pourrait presque prétendre rivaliser avec une petite bibliothèque publique ! Un groupe d’étudiants a rencontré une personne qu’ils qualifient de « bibliophile » puisqu’elle « aime simplement posséder des livres », d’autres enquêtés évoquant l’importance de pouvoir avoir chez soi les livres que l’on a aimés. Certains parlent de « l’attachement » aux livres (« on s’y attache », dit un retraité) et de la « relation particulière » qu’ils entretiennent à l’objet « livre » – ce qu’un groupe d’étudiants a appelé un « instinct de thésaurisation » (une enquêtée parle d’ailleurs de ses « trésors » en parlant de ses livres ; une autre dit : « j’aime avoir mes livres dans une armoire mais pas les lire »). Nombreux sont par ailleurs les témoignages qui évoquent l’importance de posséder des livres chez soi pour « décorer son appartement », « impressionner ses invités » ou, simplement, pour « faire joli ». Cet attachement au livre comme objet – que l’on aime et/ou que l’on montre – constitue bien sûr un véritable casse-tête pour les bibliothèques, lieu où la possession des ouvrages est par définition impossible, ou seulement éphémère.
Enfin, une dernière question à laquelle on a cherché à répondre est celle de l’offre qu’une bibliothèque devrait proposer aux yeux des non-usagers, et qui pourrait, peut-être, les faire (re-)venir dans ces établissements. Comme le remarquent des étudiants : « les non-usagers, loin de se désintéresser du sort des bibliothèques, expriment de nombreuses suggestions ou propositions » ; seule une minorité des répondants n’a rien su ou voulu répondre à cette question. Les propositions faites – elles sont de fait souvent déjà réalisées dans les établissements – concernaient, en vrac :
- davantage de nouveautés, un fonds plus complet, une offre plus large (presse, nouveautés, supports électroniques, livres d’images ont été cités), ou encore plus de journaux ; certains souhaitaient plus de livres en langue étrangère ;
- la possibilité de livraison à domicile, de commander à distance (« que la bibliothèque vienne à moi »), ou au moins la possibilité d’effectuer des recherches à la maison, sur l’Internet (surtout de la part des jeunes) ;
- des horaires plus flexibles, notamment une ouverture à midi, plus de souplesse concernant les délais de retour, une classification plus facile à comprendre (ces points sont des classiques) ;
- concernant l’accueil : plus de convivialité, donner davantage envie d’y entrer et d’y rester, être moins austère, proposer un lieu plus vivant, une décoration plus joyeuse, plus de disponibilité du personnel pour aider dans les recherches ;
- un coin café, un coin café-lecture, voire un « bistrot-bibliothèque » où l’on pourrait « boire un verre et échanger ses impressions sur les livres » (demandé aussi par des personnes âgées), ou au moins une machine à café, un distributeur, mais aussi un coin canapé, voire un coin fumeur (plusieurs personnes ont évoqué le fait qu’ils aiment fumer en lisant) et un cybercafé (ou encore un tea-room) ont été demandés ;
- certains désirent des salles où l’on peut parler à haute voix, d’autres une « ambiance feutrée » ;
- on souhaite des expositions plus variées, des petites expositions en relation avec le livre ; des débats, des lectures, par exemple par des personnalités ; des invitations d’auteurs ; des journées à thème, ou alors des nocturnes ; voire de la musique, des concerts ou encore des films (notamment des films tirés de romans – le cinéma, dont on a vu qu’il est en partie responsable de l’image stéréotypée dont souffrent les bibliothécaires, pourrait donc s’avérer une passerelle précieuse vers les bibliothèques) ;
- la possibilité d’acheter sur place les livres qui ont plu ;
- une garderie, un « coin où l’on peut parquer les enfants et choisir tranquillement » ;
- des jeux vidéo (notamment pour attirer les jeunes) ;
- une affiliation gratuite ;
- mieux cibler le public ;
- d’une manière générale, prendre plus en compte les besoins des usagers ;
- certains ont parlé de la visibilité, qui est à améliorer ; faire de la publicité, notamment dans les écoles, mais aussi plus largement.
Reste à savoir jusqu’à quel point les bibliothèques municipales seraient d’accord de s’ouvrir, d’intégrer les desiderata des (non-)usagers, sans avoir l’impression de se dénaturer ou de faillir à leurs missions, qui font toutefois sans cesse l’objet de redéfinitions et, partant, d’extensions. A noter aussi qu’une partie de ces propositions (nouveautés, presse, supports électroniques, expositions, invitations d’auteurs, nocturnes...) concerne des éléments qui font, déjà aujourd’hui, partie de l’offre des bibliothèques – ce qui renvoie du même coup à un problème d’information et de communication manifeste. En tous les cas, quelle que soit la solution choisie, les étudiants ont sans doute raison en disant que « les bibliothèques ont un bel avenir devant elles à condition qu’elles sachent s’adapter et rester à l’écoute ».
L’analyse du non-public des bibliothèques s’avère intéressante, et ce à au moins deux égards. Tout d’abord, elle est une manière de mieux comprendre son double étudié d’habitude, à savoir le public des bibliothèques ; ou, comme l’a récemment dit un auteur dans un des rares textes qui porte, précisément, sur les non-usagers de bibliothèques : « la fréquentation ne se comprend que par l’analyse de la non fréquentation » (Poissenot, 2003). Ensuite et surtout, elle seule permet de mieux comprendre les logiques de la non-fréquentation des bibliothèques municipales et, par là, d’esquisser des voies pour que les non- et les ex-usagers (re-)deviennent des usagers de ces établissements.
Sur le plan macrosociologique et statistique, les raisons pour lesquelles certains groupes de la population ont moins de chances de fréquenter des établissements tels que des bibliothèques sont connues. On a déjà évoqué l’importance du profil sociodémographique. Il est également établi que les habitudes de lecture ont une influence sur le fait de se rendre ou non dans ces établissements ; récemment, lors d’une controverse qui a animé la recherche sur les publics des bibliothèques, l’importance également du niveau de diplôme – et, à travers lui, de la ressemblance ou, souvent, dissemblance entre les non-usagers et le personnel des bibliothèques – a été relevée, amenant une touche supplémentaire au tableau (11).
Le but de cette brève étude, menée dans un cadre pédagogique, n’était pas – ne pouvait pas être – de confirmer ou contredire ces résultats, ne serait-ce parce qu’elle s’en distinguait d’emblée de par sa méthode. Celle-ci a été décrite comme à la fois qualitative et compréhensive, attachée à appréhender les pratiques et, surtout, les représentations en matière de bibliothèque du dedans, du point de vue de ses non-usagers. Dans cette cartographie mentale des personnes qui ne fréquentent pas les bibliothèques municipales, ce qui semble avoir été révélé par la démarche entreprise ici, c’est un problème d’image – ou, plutôt, d’images, au pluriel – qu’ont les bibliothèques aujourd’hui pour une grande partie de la population.
Tout d’abord, image au sens premier du terme. Les bibliothèques municipales sont mal connues : leurs noms, leurs emplacements restent obscurs pour une part non négligeable des personnes. L’enquête a montré que la localisation des établissements, la signalétique et, parfois, l’image donnée par les bâtiments eux-mêmes, peut poser problème. Mais c’est aussi plus généralement l’identité des établissements et leur inscription dans un réseau comptant, à Genève, plus d’une dizaine d’unités, qui n’est que peu, voire tout simplement pas perçue pas les non-usagers. Il y aurait là peut-être une réflexion et, partant, un effort à faire pour renforcer, voire créer une identité collective, un « label », une ligne graphique commune. Celle-ci serait, pour les non-usagers comme d’ailleurs pour les usagers, aussi une garantie de trouver un certain standard et un certain nombre de services au sein des établissements ainsi désignés (au delà de la spécificité locale de chaque succursale, qui reste sans doute un atout précieux), voire, à terme, de pouvoir profiter d’une fluidité des supports entre les établissements, une possibilité qui ne pourrait qu’être perçue comme un avantage à l’ère de la mise en réseau généralisée.
Image ensuite au sens des représentations qui structurent l’imaginaire des personnes autour des bibliothèques : il est apparu que ces dernières s’inscrivent, pour les non-usagers, dans ce que l’on pourrait appeler une chaîne de significations qui, trop souvent, éloigne ces établissements de leur pratiques et envies de tous les jours. Les résultats l’ont montré, les bibliothèques municipales ont une série d’« ennemis symboliques » qu’il s’agirait de combattre si l’on veut augmenter le nombre d’usagers de ces établissements (cf. Tableau ci-dessous). Le fait même que les livres soient – selon l’étymologie du mot bibliothèque – réunis en un « coffre », donc en un seul lieu, et les déplacements ainsi que la confrontation avec d’autres personnes (attente, etc.) que cela occasionne, est souvent relevé comme négatif par les non-usagers ; c’est l’une des raisons pour lesquelles on n’a pas le temps – un autre adversaire redoutable des bibliothèques, semblerait-il – de fréquenter ces établissements. Le silence, le côté studieux et (supposément) austère du lieu ont également été mentionnés par les non-usagers, comme aussi les contraintes imposées par le prêt. Un autre de ces ennemis symboliques semblent être les bibliothécaires eux- ou elles-mêmes : généralement représentées sous les traits d’une femme aigrie avec des lunettes et un chignon, la bibliothécaire semble pour beaucoup réunir certains des traits les plus « posés » que les stéréotypes courants attribuent aux femmes (tendance au rangement et à l’ordre, application stricte des règles, circularité et répétitivité, etc.) qui, du coup, entrent en collision avec les composantes plus « débridées » que l’on se plaît à accorder à ces mêmes femmes (imagination, irrationalité, irrégularité, beauté, etc.) et qui feraient tache – aux yeux des non-usagers – dans l’univers des bibliothèques.
Un autre obstacle majeur est, de manière étonnante, le livre lui-même, du moins en tant qu’objet : l’enquête a démontré l’importance pour les personnes – même, voire surtout, quand elles ne lisent pas ou peu – de posséder un livre, de pouvoir le montrer, ou simplement le conserver chez soi. Les bibliothèques en tant que lieu où, par essence, il est impossible de posséder un ouvrage, posent alors problème. Ici, on peut se demander s’il ne vaudrait pas la peine de tenter une redéfinition de la bibliothèque : d’un lieu de livres, elle deviendrait ce qu’elle est avant tout, à savoir un lieu de lecture, qui facilite le fait de lire – bien plus que d’avoir – des livres. L’envie de posséder des livres – sans doute encouragée aussi par des impératifs consuméristes – est répandue à un point que l’on peut d’autre part se demander si une connexion, une collaboration ponctuelle entre ces mondes à la fois si distants et si proches des bibliothèques et des librairies ne devrait pas être tentée. Le fait de pouvoir prendre connaissance d’un livre avant de l’acheter – l’absence de l’obligation d’achat – a été relevé comme avantage de la bibliothèque ; on pourrait imaginer un système de recherche et de renvoi qui permettrait ensuite à chaque personne qui a aimé un ouvrage emprunté en bibliothèque de le retrouver facilement chez un libraire et de l’acheter.
Enfin, c’est plus généralement la « Culture » elle-même, avec un grand « C », qui est apparue comme un ennemi potentiel des bibliothèques : sa force (et, peut-être, son essence) de « distinction » (Bourdieu, 1979) valorise bien sûr ces lieux de savoir et d’histoire que sont les bibliothèques, mais les affaiblit aussi, dans le sens que, « musées du livre » (comme exprimé de manière révélatrice par un répondant), ils paraissent aussi nécessaires que finalement inutiles ou, du moins, inutilisés – voire inutilisables – aux yeux d’une trop grande part de la population. A en croire certaines publications récentes, les bibliothèques ont tout à gagner à déplacer leur centre d’activité de la culture classique et essentiellement livresque à la diffusion et à l’échange de l’information en général : d’un « coffre à livres », la bibliothèque deviendrait alors plus généralement un dispositif de redistribution, voire de transformation, des savoirs inscrits (Bazin, 2000).
En bibliothèque, certaines améliorations peuvent sans doute être entreprises par des mesures spécifiques relativement simples : les horaires, les règles régissant le prêt et les amendes, les formalités d’inscription, les tarifs, la classification et sa présentation ou explication, enfin l’accueil et l’attente en bibliothèque, tous ces aspects doivent probablement faire l’objet d’une réflexion et de quelques ajustements. Mais c’est plus profondément d’une transformation de leur image, au sens fort du terme, qu’ont besoin les bibliothèques. Actuellement, rien n’oblige les non-usagers de fréquenter les bibliothèques et de s’y approvisionner en livres ; du moins le pensent-ils. L’enjeu est donc de les convaincre du contraire, autrement dit : de convertir les « ennemis symboliques » évoqués en « alliés » : autrement dit, de persuader les non-usagers que les désavantages rattachés aux bibliothèques peuvent, précisément, constituer des avantages (cf. Tableau) (12).
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La nécessité de se déplacer et d’être confronté à d’autres usagers deviendrait ainsi une possibilité d’échange, de sociabilité ; le temps que ça prend et que l’on perd, du temps que l’on se prend, que l’on a pour soi, que l’on gagne ; le silence, du calme ; les contraintes de l’institution, des règles claires, prévisibles et, par là, rassurantes ; les bibliothécaires « aigries et renfermées », du personnel accueillant et sympathique ; le fait de ne plus devoir être en formation et d’aller en bibliothèque, la possibilité de pouvoir à nouveau apprendre ; la gratuité et l’impossibilité d’acheter, la possibilité de ne pas acheter, le privilège de ne pas devoir le faire ; enfin, la possession d’un ouvrage, sa lecture et donc l’appropriation de son contenu plutôt que du livre comme objet.
Au final, c’est toute la relation à la culture qui est mis en branle dans l’usage et le non-usage des bibliothèques municipales. De par la multiplicité à la fois des supports qu’elle recèle et des domaines qu’elle recouvre, la bibliothèque pourrait être le lieu d’une redéfinition de ce rapport à la « culture », non plus seulement au sens étroit de culture légitime (Grignon et Passeron, 1989), mais plus large de loisirs et de pratiques culturelles, voire au sens plus anthropologique d’identité sociale et d’appartenance à un groupe. De « musées du livre », les bibliothèques deviendraient alors en quelque sorte des laboratoires où s’expérimentent des nouveaux liens au savoir et, partant, à la société. Les propositions d’amélioration faites par les non-usagers de bibliothèques à Genève, qui peuvent parfois sembler naïves ou farfelues, sont probablement à prendre dans ce sens : comme des incitations à (re-)mettre les bibliothèques au centre de la Cité et de la vie de ses habitants. Si cette étude peut contribuer un tant soit peu à proposer des pistes dans cette direction, elle aura atteint l’un de ses buts les plus chers.
Notes
(1) Informations tirées de la brochure Bibliothèques et discothèques municipales de la Ville de Genève (Cellule étude et projets, 2006). Dans cet article, les mots se référant à des personnes ne sont pas féminisés mais se réfèrent aux hommes et aux femmes.
(2) Enquête sur les pratiques culturelles dans le canton de Genève, sondage mené par MIS Trend, Lausanne, en juin-juillet 2004, sur 800 personnes de 15 à 74 ans dans le Canton de Genève. Selon le graphique 6, 47% de l’échantillon n’a jamais fréquenté une « bibliothèque » (au sens général n.b.) dans les douze mois.
(3) Une Charte d’accueil, qui a d’abord été diffusée d’abord à l’interne (fin 2006), et qui le sera auprès du large public (en 2008), en constitue l’aboutissement le plus visible.
(4) A noter que, portant sur l’ensemble du pays avec les zones rurales, le chiffre de fréquentation français est logiquement moins élevé que celui de l’agglomération genevoise. Pour Paris intra-muros, la part de public récent des bibliothèques se monte par contre à 49%.
(5) La même remarque peut être faite pour le cas de Genève : en recoupant les chiffres cités en introduction, avec un public récent des bibliothèques (certes toutes catégories confondues) de 47% et seulement 50'000 effectivement individus inscrits sur une population de plus de 300'000 habitants, la part d’usagers non-inscrits doit être importante.
(6) Les quartiers et établissements genevois couverts par l’enquête de terrain étaient les suivants : autour des bibliothèques de la Cité, des Eaux-Vives, de la Jonction, du Pâquis, de la Servette, de Saint-Jean, de la bibliothèque et discothèque des Minoteries, de la discothèque Vieusseux, de la Bibliothèque des Sports, du Bibliobus (Plan-les-Ouates et Grand-Saconnex), enfin à Champel-Florissant (quartier sans bibliothèque).
(7) Afin d’éviter l’« effet de l’enquêteur » bien connu des sociologues, les étudiants avaient reçu l’indication de ne pas préciser au départ la nature exacte de leur formation (le fait qu’ils sont de futurs bibliothécaires, ce qui aurait sans aucun doute dirigé les réponses dans un sens non voulu).
(8) Pour des questions juridiques et pratiques, il a été décidé de ne pas interroger de personnes de moins de 15 ans et notamment des enfants ; on a préféré thématiser la question des enfants dans le questionnaire adressé aux adultes ou jeunes adultes.
(9) Si les touristes et autres personnes de passage en Suisse ont été exclues pour des raisons évidentes, les frontaliers ont par contre été inclus, puisque la possibilité existe pour ces derniers d’emprunter – via une démarche à effectuer auprès de la bibliothèque de leur lieu d’habitation – des livres à Genève.
(10) Les portraits contenus dans un ouvrage récent de Bernard Lahire sur les pratiques culturelles, quoique bien plus longs, nous ont servi de modèle (Lahire 2004).
(11) Voir Poissenot, 2001, ainsi que les réactions et la réponse de Poissenot in BFF, 2002, t. 47, n. 1.
(12) L’idée d’explorer les « alliances » - en l’occurrence symboliques – des bibliothèques est inspirée de la « sociologie de la traduction » développée par Bruno Latour ou Michel Callon (voir de manière emblématique dans Callon, 1986).
Bibliographie
Ancel, P. et Pessin A. (2004). Les non-publics. Les arts en réceptions. Paris, L’Harmattan.
Bazin P. (2000). « Bibliothèque publique et savoir partagé ». In BBF, t. 45, n. 5, pp. 48-52.
Bertrand A.-M., Burgos M., Poissenot Cl. et Privat J.-M. (2001). Les bibliothèques municipales et leurs publics. Pratiques ordinaires de la culture. Paris, Bpi / Centre Pompidou.
Bourdieu P. (1979). La Distinction. Critique sociale du jugement. Paris, Ed. de Minuit.
Callon M. (1986). « Eléments pour une sociologie de la traduction. La domestication des coquilles Saint-Jacques et des marins pêcheurs de la baie de Saint-Brieux ». In L’Année sociologique, n. 36, pp. 170-208.
Cellule étude et projets (2006). Bibliothèques et discothèques municipales de la Ville de Genève. Genève, Département des affaires culturelles, Ville de Genève.
Chaintreau A.-M. et Lemaître R. (1993). Drôles de bibliothèques. Le thème de la bibliothèque dans la littérature et le cinéma. Paris, Ed. du cercle de la librairie.
Donnat O. (1994). Les Français face à la culture. De l'exclusion à l'éclectisme. Paris, La Découverte.
Donnat O. (1998). Les pratiques culturelles des Français. Enquête 1997. Paris, La Documentation française.
Grignon Cl. et Passeron J.-Cl. (1989). Le savant et le populaire. Misérabilisme et populisme en sociologie et en littérature. Paris, Gallimard / Le Seuil.
Lahire B. (2004). La culture des individus. Dissonances culturelles et distinction de soi. Paris, La Découverte.
Maresca B. (2006). « La fréquentation des bibliothèques publiques a doublé depuis 1989 ». In CREDOC Consommation et modes de vie, n. 193, mai.
MIS Trend (2004). Enquête sur les pratiques culturelles dans le canton de Genève. Lausanne.
Poissenot Cl. (2001). « Penser le public des bibliothèques sans la lecture ? ». In BFF, t. 46, n. 5, pp. 4-12.
Poissenot Cl. (2002). « Le réel et ses analyses ». In BBF, t. 47, n. 1, pp. 19-20.
Poissenot Cl. (2003). « Non-publics des bibliothèques et missions des BDP : réflexions à partir du cas de la Meuse ». Journées d’étude de l’ADBDP Association des directeurs de bibliothèques départementales de prêt (www.adbdp.asso.fr/association/je2003/poissenot.htm).
Nom de l'étudiant-e : | Date : | Quartier : |
QUESTIONNAIRE NON USAGERS BIBLIOTHEQUES MUNICIPALES A GENEVE
Bonjour, je suis un-e étudiant-e de la Haute école de gestion, à Genève. Nous menons actuellement une enquête auprès de la population genevoise. Une question : avez-vous fréquenté, ces 12 derniers mois, une BM à Genève ? Si OUI, alors REMERCIER, PAS D’ENQUETE ! Si NON : Auriez-vous une dizaine de minutes à me consacrer ?
Etes-vous inscrit-e dans une BM à Genève ? Non Oui :
Quel est le 1er mot qui vous vient à l’esprit en pensant à une bibliothèque ?
Avez-vous fréquenté une des BM genevoises par le passé ?
Si oui : Pour quelle(s) raison(s) ne fréquentez-vous plus de BM ? (depuis quand ; événement précis ?)
Comment était l’accueil de la part des bibliothécaires ? Si non : Vous n’avez jamais fréquenté de BM à Genève. Pour quelle(s) raison(s), qu’est-ce qui vous en empêche ? |
Fréquentez-vous une bibliothèque publique dans une autre ville ? Non Oui
Quelle(s) fonction(s) remplit d’après vous une bibliothèque dans une ville ?
D’une manière générale, quels sont les avantages et les désavantages d’une bibliothèque, pour vous ?
Av. :
Désav. :
A votre avis, que peut-on se procurer ou consulter dans une BM ?
Quelle image avez-vous des bibliothécaires ?
Et pourquoi ?
Saviez-vous que dans ce quartier, il y a une BM (ou discothèque) : (dire le nom) ?
Oui, connaît nom et localisation Connaît nom mais pas localisation Non, ni l'un ni l'autre
Pouvez-vous citer d’autres BM à Genève ?
A propos de vos habitudes de lecture. Lisez-vous des livres, quel que soit le genre et quelle que soit la raison pour laquelle vous les lisez ?
0 1-4 / an 5-9 / an 10-19 / an 20+ / an
Quelle proportion de ces livres lisez-vous dans le cadre de votre travail ?
tous la majorité moitié moitié une minorité aucun
Comment vous procurez-vous des livres (achat, échange…) ?
Le fait de posséder un livre est-il important pour vous ?
Et pourquoi ?
Que devrait proposer une bibliothèque, qu’est-ce qui pourrait faire que vous y alliez ?
Avez-vous des enfants de moins de 10 ans ?
Non Oui :
Vos enfants lisent-ils ou regardent-ils des livres ?
Non Oui :
Pourriez-vous vous imaginer leur chercher des livres en bibliothèque (si non, pourquoi) ?
Quelques questions sur vos loisirs.
Lisez-vous des journaux ou des magazines ? Non Oui
Regardez-vous chez vous des films sur k7 ou DVD ? Non Oui
Ecoutez-vous chez vous de la musique sur k7 ou CD ? Non Oui
Utilisez-vous chez vous des CD-ROMs (sur l’ordinateur) ? Non Oui
Avez-vous chez vous la possibilité de surfer sur Internet ? Non Oui
Pour terminer, quelques informations générales.
Age. Quelle est votre année de naissance ? Sexe (noter) : Non Oui
Formation. Quel est votre niveau de formation le plus élevé terminé ou en cours (év. équivalent) :
école oblig. CFC, maturité prof. gymnase école prof. sup. université, EPF, HES
Profession. Quelle est votre profession actuelle ?
Langue. Dans quelle(s) langue(s) lisez-vous d’habitude ?
Nationalité. Quelle est votre nationalité ?
Domicile. Dans quel quartier de Genève (ou : ville) habitez-vous ?
Présence dans quartier. Pour quelle(s) raison(s) venez-vous en général dans ce quartier ?
MERCI d’avoir participé à l’enquête ! Elle permettra d’améliorer l’offre des BM de Genève !
(Remarques)
La revue Ressi
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