Histoire de la lecture populaire dans le canton de Vaud : l’exemple de la bibliothèque paroissiale de Dommartin

Histoire de la lecture populaire dans le canton de Vaud : l’exemple de la bibliothèque paroissiale de Dommartin

La bibliothèque paroissiale de Dommartin 

Dommartin est un village du Gros-de-Vaud, voisin d’Echallens et dont la cure a abrité une bibliothèque de paroisse protestante pendant près d’un siècle, entre 1865 et 1960. Le fonds de cette bibliothèque(1), à savoir la grande majorité des livres, trois catalogues et un registre de prêt, a été donné en 1991 aux Archives cantonales vaudoises, et a servi de base à mon travail de Bachelor de la Haute Ecole de Gestion de Genève en 2010.

La période d’existence de la bibliothèque de Dommartin s’inscrit dans un moment charnière de l’évolution des bibliothèques : le passage du mouvement de lecture populaire initié au début du XIXe siècle, à celui de la lecture publique, qui commencerait aux environs de la fin de la première Guerre mondiale en Europe. Cette étude avait pour but principal de définir d’une part comment la bibliothèque de Dommartin s’inscrit dans ce contexte historique au sens large, et d’autre part, plus localement, de déterminer de quelle manière elle se situe dans le contexte de la paroisse qui l’abrite, et l’usage qu’en faisaient les habitants des villages qui en faisaient alors partie.

Pour tenter de répondre à ces deux interrogations, l’on s’est donc posé cinq questions principales :

  • Qu’est-ce qu’une bibliothèque populaire ou publique aux époques concernées ?
  • Comment est composée et fonctionne la bibliothèque de Dommartin ?
  • Dans la mesure du possible, qui sont ses lecteurs ?
  • De quelle manière utilisent-ils le fonds de la bibliothèque ?
  • Comment la bibliothèque a-t-elle évolué durant son existence, et pourquoi a-t-elle finalement fermé ses portes ?

L’étude s’est articulée en trois parties principales : une revue de la littérature pour répondre à la première question et tenter de définir ce qu’on entendait au milieu du XIXe siècle par le terme « populaire » quand il était mis en rapport avec la lecture et les bibliothèques ; l’analyse du fonds proprement dite ainsi que des documents conservés par les archives de la commune de Dommartin, pour pouvoir juger du fonctionnement et de la constitution de la bibliothèque, ainsi que sa perception par ses usagers (qui soit dit en passant peut parfois être très éloignée de l’image que veulent en donner les responsables !) ; et enfin une comparaison entre la bibliothèque de Dommartin et d’autres bibliothèques vaudoises de la même époque, catholiques ou protestantes. Ce dernier point, associé à la comparaison avec ce que la revue de la littérature nous aura appris sur les bibliothèques populaires, permet de définir le niveau de « représentativité » de la bibliothèque de Dommartin par rapport aux mouvements de lecture populaire et publique.

La paroisse de Dommartin

Le village de Dommartin est devenu le centre de la paroisse protestante qui porte son nom avec la Réforme. A l’époque qui nous intéresse, cette paroisse est composée, en plus du village de Dommartin, de ceux de Montaubion-Chardonney, Naz, Peyres-Possens et Sugnens, totalisant à eux tous une population d’environ 668 habitants (donc usagers potentiels de la bibliothèque) vers 1950(2). Durant le siècle d’existence de la bibliothèque, une dizaine de pasteurs se sont succédés dans la paroisse et par conséquent à la gestion de la bibliothèque. Dans le même temps, la population de Dommartin a globalement subi une diminution, passant de 250 en 1850 à 140 en 1970 (Morerod, 2006).

Les sources à disposition

Comme sources, on dispose de trois catalogues, de la majorité des ouvrages ayant fait partie du fonds, d’un registre de prêt, ainsi que des procès-verbaux du Conseil de paroisse, des comptes communaux et paroissiaux et du journal de la paroisse.

Les catalogues datent de la fin du XIXe siècle, de 1915 et de 1922. Si les deux derniers, qui sont d’ailleurs les seuls à être datés, présentent un classement semblable, mais pas forcément aisé d’utilisation pour les usagers, puisqu’il s’agit d’un classement uniquement basé sur la date d’acquisition, le catalogue du XIXe siècle est encore plus déroutant. Il présente en effet plusieurs classements successifs : mêlant classement par matière (on peut relever une différence faite entre les ouvrages de théologie, les « mélanges » - des romans pour la plupart -  et les ouvrages de sciences) et par date d’acquisition. Un classement par auteurs a été tenté dans les « mélanges », sans doute avec la volonté louable de faciliter la recherche aux lecteurs (puisqu’il rend le catalogue difficilement exploitable pour un inventaire) : dans la première partie du catalogue, quand un auteur apparaît, toutes ses œuvres possédées par la bibliothèque au moment où le catalogue a été rédigé ont été mises à la suite, quelle que soit leur cote. Malheureusement cela ne fonctionne bien sûr plus dès lors que la bibliothèque acquiert une nouvelle œuvre d’un auteur déjà présent sans avoir laissé de place sur la page consacrée, et la seconde partie, classée par ordre d’acquisition, montre que les limites du système ont vite été atteintes à mesure que les ouvrages d’un même auteur recommençaient désespérément à s’éparpiller sur les pages, d’où peut-être son abandon manifeste dans les catalogues suivants (il n’y a vraisemblablement pas eu de passage à un catalogue sur fiches).

Les ouvrages sont au nombre de 1322, sur les 1617 que recense le catalogue de 1922. La plupart sont des livres de petit format, type livre de poche, à la base brochés mais que la bibliothèque a fait relier ou a fourrés (selon l’époque) de manières similaires, et portent cote, titre et auteur écrits à la main sur leur dos ou celui de leur fourre.

Le registre de prêt a pour défaut de ne couvrir que les années 1934 à 1960, ce qui, nous le verrons, limite les possibilités d’analyser le profil des lecteurs et leurs activités. Les prêts se présentent sous forme de tableau, les noms des lecteurs en colonne et la date du prêt (un jour par semaine, à la base le dimanche mais le jour semble mouvant dans les dernières années de l’existence de la bibliothèque) et les cotes sont tracées une fois l’ouvrage rendu.

Le journal de paroisse enfin, rédigé par le pasteur, fait aussi mention quelquefois de la bibliothèque, en publiant notamment des listes d’ouvrages disponibles pour inciter les paroissiens à s’y rendre.

Les Archives communales de Dommartin ont également permis d’avoir accès à d’autres sources d’information que le fonds lui-même. Les comptes communaux et paroissiaux renseignent difficilement sur les finances de la bibliothèque puisque celle-ci avait son propre compte, malheureusement perdu aujourd’hui, et qu’elle ne figure qu’exceptionnellement dans ceux de la commune et de la paroisse. Les procès-verbaux du Conseil de paroisse, qui couvrent les années 1901 à 1960 et sont rédigés la plupart du temps par le pasteur, ont par contre apporté un peu plus d’informations, car les mentions sur les difficultés ou la bonne santé financières de la bibliothèque y sont relativement nombreuses.

Lecture populaire, lecture publique

Pour savoir si la bibliothèque que nous traitons en est représentative, il est nécessaire de s’arrêter un moment sur ce qu’on comprenait exactement au XIXe siècle quand on parlait de lecture populaire, et plus tard, de lecture publique.

Au début du XIXe siècle apparaît pour les classes aisées la nécessité d’instruire les classes moins favorisées. Cela a pour premier effet de mener à des réformes scolaires, rendant par exemple l’école primaire obligatoire comme le fait la loi Guizot en France en 1833 (Loi sur l’Instruction primaire, 28 juin 1833), instaurant un nombre maximal d’élèves par classe ou une formation pour les maîtres d’école (en 1864 dans le Canton de Vaud (Volet, 1982 : p. 114)). On cherche également à instruire les adultes, et nombre d’associations d’éducation populaire voient le jour (Richter, 1987 : pp. 141-143). Mais la volonté cachée derrière cette idée d’instruire les classes laborieuse n’est pas toujours humaniste. Noé Richter la nomme « sociale » : elle consiste en effet avant tout à inculquer à ces nouveaux lecteurs une morale inébranlable et le respect de l’ordre établi. Il ne faudrait en effet pas que « la corruption portée par le savoir ne se substitue à celle portée par l’ignorance » (Chartier, 1986, cité dans Pitteloud, 1998 : p. 20) !

Les almanachs ou la presse et ses feuilletons que l’on s’arrache sont d’emblée considérés comme les exemples types de cette « mauvaise littérature » qu’il faut éradiquer. Pour cela, on se met donc à écrire puis à diffuser ce qu’on appelle alors des « bons livres ». Ils suivent souvent des thèmes prédéfinis pour que les personnages puissent servir de modèle de vertu à imiter pour les lecteurs : la Société pour l’instruction élémentaire en édicte ainsi onze, parmi lesquels on trouve « le bon instituteur et les enfants heureux » ou « le bon riche et le mauvais riche » (Richter, 1999 : p. 31). Les bibliothèques populaires créées dans cet esprit sont également vues comme un moyen privilégié de diffuser cette bonne littérature parmi la population.

Dans les premières années du mouvement, jusqu’aux années 1860, il s’agit simplement d’instruire, sans distraire. Une littérature populaire se développe également à cette époque, dans ce sens moralisant (le Simon de Nantua de Laurent-Pierre de Jussieux en est peut-être l’exemple le plus connu (Richter, 2003 : p. 26)) mais, surtout dès la seconde moitié du XIXe siècle, également dans un sens plus actuel et peut-être moins connoté, « qui touche une partie large de la population » : les romans d’aventure de Jules Verne, Fenimore Cooper ou Gaston Leroux et les romans sentimentaux de Delly et E. Marlitt sont de ceux-ci.

En Suisse romande, on lit bien sûr les auteurs français et étranger, mais une littérature populaire « du terroir » se développe – ce que Daniel Maggetti et Dieter Müller nomment d’ailleurs les « Bonnes lectures de la Suisse romande », du nom d’une collection neuchâteloise de l’époque. On y trouve notamment des auteurs comme Urbain Olivier, Benjamin Vallotton, Louis Favre ou encore Virgile Rossel, qui font tout à fait honneur au but de la lecture populaire selon un instituteur normand de 1862 : « attacher l’homme à la campagne, lui faire oublier la fiévreuse existence des villes, lui faire perdre le souvenir du lucre qui l’y attire si souvent  (Catherine, cité dans Morière, 1862) ». En effet, ils présentent souvent une vision idéalisée du monde rural, de la bonté de la Providence divine et mettent l’accent sur la piété, l’amour de la patrie ou encore le respect des valeurs familiales (Maggetti & Müller, 1992 : pp. 5-7).

Cette littérature moralisante ou morale se diffuse par plusieurs canaux : les sociétés de promotion des bonnes lectures, telles que la Société Franklin ou la Société genevoise des publications religieuses, se mettent à éditer des catalogues de bons livres. La Société Franklin va même jusqu’à proposer des caisses de livres destinées à se déplacer dans les bibliothèques des villages et à permettre des lectures plus variées aux lecteurs.

Un autre canal, sans doute en partie lié au précédent puisque ces sociétés se veulent des intermédiaires entre les auteurs et les lecteurs potentiels (Pitteloud, 1998 : p. 116), sont les bibliothèques populaires, souvent  confondues avec la bibliothèque scolaire à la campagne, d’une part par manque de place, et d’autre part de par son contenu : les livres, autres que pour les enfants, écrits spécifiquement pour un public peu alphabétisé n’existent en effet pas encore au début du mouvement. Quant aux bibliothèques paroissiales, on sait en tout cas peu de choses de celles de Genève selon Jean-François Pitteloud, sinon qu’elles ont été pour la plupart fondées avant 1860. Elles ont cependant une différence notable d’avec les bibliothèques purement populaires et laïques, dans le sens qu’elles sont plus directement liées à la vie de la paroisse en elle-même : « Il paraît que les bibliothèques paroissiales et religieuses n’ont pas été créées dans le seul but de diffuser le livre, le ‘bon’ livre s’entend et dans le ‘troupeau’ surtout, mais que chaque pasteur avait développé sa bibliothèque religieuse pour appuyer sur l’écrit des séances de catéchisme et de méditation organisées dans toutes les paroisses. »       (Pitteloud, 1998 : p. 94). Relevons également que les sociétés religieuses, qu’elles soient catholiques ou protestantes, ont joué un rôle considérable dans le mouvement de la lecture populaire et ont été, surtout avant que l’Etat ne se mette à soutenir les bibliothèques (vers le milieu du XIXe siècle en France, par exemple), plus visibles que les actions de laïcs.

Pourtant, cette volonté d’imposer une éducation à un public dont on ignore la teneur réelle et les envies (une « population indistincte et dominée » (Richter, 1999 : p. 7)) va vite trouver ses limites : hier comme aujourd’hui, il est en effet inutile de chercher à forcer les lecteurs à lire un livre s’il ne répond pas à leurs attentes (en l’occurrence, notamment compte tenu des conditions de travail d’alors, un grand besoin de distraction), et les bibliothèques populaires vont devoir s’adapter, sous peine de voir leurs lecteurs leur préférer d’autres offres plus adaptées à leurs désirs.

Vers 1860, on commence donc à constater un fait qui n’est probablement pas récent : le détournement des fonds par les lecteurs. Ainsi, les classifications thématiques visant à fournir à chacun le livre qui serait le plus propre à le rendre vertueux, en fonction de son caractère et de ce qu’il faut y corriger ou y encourager[i] se révèlent vite un moyen de contrôle dérisoire, les lecteurs prêtant facilement à leur entourage un livre qu’ils avaient apprécié, quand bien même le règlement de la bibliothèque l’aurait interdit. E. Grob en vient donc à affirmer, en 1867 : « un bon écrit populaire doit toujours poursuivre cette double ambition de divertir et de donner des leçons » (Pitteloud, 1998 : p.37). L’instruction reste toujours le but final, mais on se met à chercher des moyens détournés d’y faire parvenir les lecteurs, espérant que la lecture de romans, même si on les considère comme peu sérieux, puisse amener ensuite le lecteur à des ouvrages plus utilitaires, qui restent les seuls réellement bien considérés. Dès lors, les bibliothèques qui admettent le roman dans leur fonds connaissent alors ce que Noé Richter n’hésite pas à appeler un âge d’or : le nombre de bibliothèques populaires, paroissiales et scolaires augmente encore durant cette période.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle donc, beaucoup de bibliothèques populaires qui se voulaient uniquement éducatives revoient leur politique d’acquisition, et admettent enfin la distraction, pas encore pour elle-même pourtant. Au début du XXe siècle, Eugène Morel, le futur théoricien de la lecture publique, fait cette remarque : « On y (dans les bibliothèques populaires) chercherait en vain les livres capables d’instruire un ouvrier dans sa profession ; ce qu’on a voulu, c’est distraire avant tout… si vraiment le grand mouvement d’éducation populaire aboutit à ce piètre résultat, de prêter dans chaque bibliothèque quelques romans, on doit dire qu’il a échoué dans sa glorieuse tâche. » (Morel, 1908, cité dans Richter, 1978 : p. 145). Si Morel prend cette adaptation que nous venons de mentionner pour la volonté de base des responsables de bibliothèque, ce qui n’est pas le cas nous l’avons vu, il a néanmoins raison lorsqu’il affirme qu’en un sens, le mouvement de lecture populaire a échoué : l’admission du roman dans les bibliothèques est en effet une preuve de ce que Jean-François Pitteloud appelle l’« échec d’une gigantesque entreprise d’assujettissement » (Pitteloud, 1998 : p. 25), et c’est cet échec qui va finalement conduire à la lecture non plus populaire, mais publique.

On peut en effet dire que la lecture publique naît en quelque sorte du rejet de la lecture populaire, qui a montré ses dernières limites à l’aube du XXe siècle : ayant pour l’un de ses buts principaux de familiariser la population à la lecture par des œuvres faciles d’accès, elle devient caduque dès lors que son but est atteint, et que ces nouveaux lecteurs cherchent d’autres lectures. De plus, les changements de la société opérés durant la dernière moitié du XIXe siècle ont fait qu’il n’est plus possible d’apprendre aux gens uniquement ce dont ils ont besoin pour faire leur métier : ils ont dorénavant également besoin d’instruction politique, civique et de culture générale, et les buts de la lecture populaire deviennent dès lors par trop réducteurs pour suffire.

D’autres visions se font alors jour : les bibliothèques, publiques, devraient désormais avoir un rôle éducatif et non d’endoctrinement, et être plus accessibles notamment par une refonte des classements, des collections et de la gestion de la bibliothèque en général[ii]. La professionnalisation des bibliothécaires joue également un rôle : les premières associations et formations de bibliothécaire se créent en Europe dès le début du XXe siècle (une des plus anciennes à avoir exercé son activité sans interruption en Europe est d’ailleurs l’Association des Bibliothécaires Suisses, dont la création remonte à 1897 (Barth, 1997 : p.199)). A la fin de la Première Guerre mondiale, l’American Library Association contribue à l’implantation de bibliothèques de lecture publique, qui, employant du personnel local et formé, conduisent à la création de filières de formation pour les bibliothécaires. Ainsi une école de bibliothécaires est créée à l’Institut d’Etudes sociales de Genève en 1918.

La lecture publique continue ensuite son évolution jusqu’à prendre les sens qu’on lui connaît aujourd’hui, et qu’il  n’est pas du propos de cet article de détailler. Mais cette nouvelle vision de la bibliothèque, plus ouverte, institutionnalisée et se débarrassant (parfois lentement(3) !) des tendances à l’endoctrinement que la lecture populaire avait pu avoir, sonne définitivement la fin de cette dernière. Les bibliothèques populaires qui avaient résisté au passage du siècle disparaissent graduellement : Noé Richter considère que si les toutes dernières disparaissent dans les années 1970, elles ne sont déjà plus que des reliques dès 1945 (Richter, 1978 : p.159).

Le fonctionnement de la bibliothèque

La bibliothèque de Dommartin se définit elle-même comme une bibliothèque paroissiale, et est gérée par les pasteurs successifs de la paroisse, ainsi que par leur épouse dans certains cas. La bibliothèque est dotée d’un règlement depuis le XIXe siècle, qui se trouve dans le premier catalogue et qui prend la forme suivante :

Règlement de la Bibliothèque de la paroisse de Dommartin

Article 1

La bibliothèque est placée sous la direction du conseil de paroisse. Celui-ci reçoit les dons, choisit et achète les livres, et fait exécuter le présent règlement.

Art. 2

La bibliothèque est ouverte chaque Dimanche à l’issue du service divin.

Art. 3

Pour pouvoir jouir de la bibliothèque il faut prendre un abonnement. Cet abonnement est payable d’avance. Il est fixé à 1 fr. pour une année et 60 centimes pour 6 mois.

Art. 4

Il est interdit à chaque abonné de prêter les livres de la bibliothèque à toute autre personne.

Art. 5

On ne peut prendre qu’un volume à la fois. Toutefois les abonnés à l’année peuvent prendre deux volumes pourvu qu’ils paient 2 francs.

Art. 6

Chaque abonné est responsable du livre qui lui a été remis. Il paiera la valeur de tout ouvrage endommagé ou perdu.

Art. 7

Tout abonné qui refuse de se soumettre au présent règlement perd son droit de prendre des livres.

Art. 8

Tout abonné qui ne rend pas son livre à l’expiration de son abonnement déclare par là le continuer. Il paie pour tout le temps pendant lequel il garde le livre.

(PP 348/01)

L’accès à la bibliothèque nécessite donc un abonnement, dont le prix, s’il est fixé par ce règlement à 1 franc par année et 60 centimes pour six mois, évoluera au fil du temps : ainsi par exemple en 1918, le Conseil de paroisse décida de porter le prix à 1 franc pour six mois et 2 francs pour une année. Le registre de prêt nous montre également qu’il semble être devenu aussi courant de payer par volume emprunté plutôt que par année, et dans ce cas le prix varie de 10 (années 1940) à 30 centimes (vers 1935). Cela peut probablement s’expliquer par le fait que, nous le verrons dans le chapitre concernant l’utilisation du fonds, la bibliothèque n’est presque pas utilisée en été, la population (rurale rappelons-le) étant alors essentiellement occupée aux travaux des champs : un abonnement à l’année ne semble de fait pas très avantageux de ce point de vue.

En ce qui concerne les heures d’ouverture, si le règlement mentionne le dimanche après le culte, les dates du registre de prêt ne sont pas toutes des dimanches, ce qui laisse penser que la bibliothèque a pu élargir ses horaires d’ouverture au moins dès les années 1930, même si en 1924 le pasteur relève dans le journal de paroisse : « Bibliothèque. - Beaucoup semblent l'oublier et cependant elle continue à être ouverte tous les dimanches après le culte. » (Journal de la paroisse de Dommartin, novembre 1924).

Les ressources financières de la bibliothèque quant à elles, semblent souffrir d’un certain déficit chronique. Aucune dépense superflue n’apparaît : les reliures des livres sont simples, les collections choisies peu coûteuses et les « appels au secours » en faveur de la bibliothèque, adressés aux communes de la paroisse, se répètent dans les procès-verbaux du Conseil de paroisse : ainsi en 1902 le Conseil demande un « cadeau en souvenir du Centenaire [de 1903], de façon à nous remettre à flot et à nous permettre l’achat de quelques ouvrages nouveaux » (NB 10.1, 30 novembre 1902). Des subsides sont également demandés régulièrement (100 francs en 1905, 50 en 1920), et la bibliothèque bénéficie parfois de dons d’argent ou d’ouvrages.

Il semble quoi qu’il en soit que la bibliothèque n’ait pas reçu de subvention régulière ni de la commune ni de la paroisse, ce que déplore d’ailleurs le pasteur en 1905 : « La caisse ne contient que 2.15 fr. et depuis longtemps, il n’est pas question de rien acheter, le produit des abonnements payant à peine les reliures les plus pressantes. Il faudrait absolument un fond [sic] de roulement. » (NB 10.1, 10 septembre 1905). Il faut enfin remarquer que dès les années 1930, les appels aux subsides des conseillers de paroisse disparaissent des procès-verbaux et la bibliothèque y est de moins en moins mentionnée (le plus souvent, pour parler de ses comptes en déficit. On trouve cependant une seule fois la remarque que ses comptes sont « heureusement en équilibre » (NB 10.2, Rapport sur la marche de la paroisse 1939 – 1940)), ce qui semble montrer un certain désintérêt vis-à-vis de la bibliothèque, qui se fera encore plus marqué dès les années 1950 : dès 1956, on ne trouve plus aucune mention de la bibliothèque dans les procès-verbaux du Conseil de paroisse.

Urbain, Fenimore et les autres : le fonds

Le classement du fonds est globalement fait par ordre d’entrée des ouvrages dans la bibliothèque, et les cotes consistent en une simple numérotation, de 1 à 1629. On devine néanmoins des classements antérieurs au début du fonds : ainsi les 31 premiers ouvrages sont religieux, puis un classement par auteurs de ce que le catalogue du XIXe siècle nomme les « mélanges » (pour la plupart, des romans) apparaît pour les cotes 66 à 159. Après cette cote, il semble que le classement par auteur ait été abandonné (il est en effet difficile de le conserver lorsqu’on n’a pas laissé de cotes vides ni de place dans le cahier pour rajouter un nouvel ouvrage d’un auteur déjà cité, et les responsables de la bibliothèque n’ont pas utilisé de catalogue sur fiches, seul système qui aurait rendu ce classement possible à long terme) pour un classement par ordre d’acquisition qui se poursuit ensuite tout au long de l’existence de la bibliothèque. On trouve également entre les cotes 170 à 320 des ouvrages essentiellement d’histoire ou de géographie, ce qui semble là aussi être un vestige d’un classement thématique qui n’a pas été perpétué.

D’une manière générale, la bibliothèque ne pratique pas de désherbage, et les ouvrages achetés dès 1865 ont été conservés jusqu’à sa fermeture. Ce qui facilite notre tâche mais a dû, en plus de l’absence de classement logique, rendre plutôt malaisée celle des usagers de la bibliothèque au XXe siècle !

D’un point de vue matériel, les ouvrages sont presque tous fourrés ou reliés (bien qu’on trouve quelques ouvrages simplement brochés, certains en assez mauvais état d’ailleurs), la plupart du temps par la bibliothèque elle-même vu l’homogénéité des reliures. On distingue ainsi plusieurs grandes périodes dans les reliures, comme le montre l’image suivante, où elles sont classées par ordre chronologique :

Les ouvrages sont pour la plupart de petits volumes, in-8° ou in-12°, ne dépassant le plus souvent pas les 20 centimètres de haut, donc plus maniables et moins coûteux. Ils sont également souvent illustrés de gravures, surtout pour les ouvrages de la fin du XIXe siècle (les livres de Jules Verne notamment). Certains ouvrages, pas plus d’une centaine, semblent néanmoins plus « luxueux » (tranches dorées, grands formats, reliures en cuir de couleur…) et sont pour la plupart probablement des dons. Ils sont en effet plutôt rares dans le fonds, portent souvent un ex-libris, et nous savons depuis le chapitre précédent que les ressources de la bibliothèque ne lui permettaient sans doute pas l’achat de ces ouvrages moins bon marché que les autres.

Les ouvrages, surtout les plus anciens, semblent enfin avoir été beaucoup lus, à l’image de cette page de Matinées d’Automne d’Urbain Olivier qui se prêterait sans doute particulièrement bien à un relevé d’empreintes digitales :

En ce qui concerne les éditeurs et les éditions, on recense 156 éditeurs différents dans le fonds. 99 ne sont présents que par 1 à 3 livres et il faut relever le nombre relativement considérable d’éditeurs liés à la religion. Si l’on prend les éditeurs cités comme clairement protestants par François Vallotton(4), on compte 220 ouvrages, et si on élargit ce compte aux publications d’éditeurs ouvertement religieux tels que Labor & Fides, Spes, Je Sers, La Librairie des Semailles, diverses sociétés religieuses, le Secrétariat des Missions de Bâle et les Editions de l’Eglise nationale vaudoise, ce nombre monte à 364 ouvrages, soit un peu plus d’1/5 du fonds. Les lectures religieuses sont d’ailleurs une préoccupation prépondérante des pasteurs-bibliothécaires : ainsi en 1926, on lit dans le Journal de la paroisse de Dommartin, une mention du passage d’une « auto-librairie » dans le village : « La Bonne semeuse est une auto-librairie qui parcourt les paroisses en vendant de bons livres. Cette tournée est dirigée par un pasteur et un aide qui organisent, la veille de la vente, une conférence sur les ‘Poisons de l’esprit’, accompagnée d’un film en rapport direct avec ce sujet si important des bonnes et des mauvaises lectures » (Journal de la paroisse de Dommartin, mars 1926). On ne peut également s’empêcher de remarquer l’utilisation de l’expression « bons livres » par le pasteur lui-même, faisant (bien inconsciemment peut-être !) écho aux premières théories de la lecture populaire, et appuyant du moins cette distinction faite entre livres source de vertu et livres vecteurs de corruption.

Les ouvrages sont pour une majorité relative publiés en Suisse (46%, soit 740 ouvrages) et un tiers en France(5) (33%). L’éditeur le plus présent est Georges Bridel, avec 126 publications (10%). La description de cet éditeur par Franco Ardia correspond d’ailleurs assez bien à l’impression que donne le fonds dans son ensemble : son offre se compose en effet selon lui « exclusivement de littérature populaire à tendance moralisante, en particulier l’œuvre abondante d’Urbain Olivier. (…) Plus de la moitié des ouvrages publiés par Bridel ont un caractère didactique ou moralisant et s’adressent aux classes populaires. » (Ardia, 1998 : p. 49)

Vient ensuite la Société romande de lecture populaire, surtout représentée au XXe siècle, et qui propose des romans moins moralisateurs et plus proches de ce qu’on lit encore aujourd’hui : on y trouve par exemple les Lettres de mon Moulin d’Alphonse Daudet, et Derborence de Charles Ferdinand Ramuz (auteur, soit dit en passant, presque totalement absent du fonds).

On trouve ensuite Payot, proposant des ouvrages de genres plus variés, puis des éditeurs français : Hachette, Plon et Calmann-Lévy, qui eux publient essentiellement de la littérature distrayante et non plus moraliste : c’est ici que l’on trouve les œuvres de Jules Verne (et chez Hetzel, qui suit un peu plus loin dans le classement, bien sûr), de Charles Dickens ou encore d’Arthur Conan Doyle.

On trouve également bon nombre de collections, qu’on peut, en plus des collections religieuses, locales et à bon marché, répartir globalement en deux catégories : les collections d’évasion/d’aventure et les collections de « bons livres ». La première catégorie regroupe notamment la collection d’Hetzel, Bibliothèque d’éducation et de récréation, la Bibliothèque des merveilles de Hachette ou encore la Bibliothèque de chasse, voyages et aventures de Blériot. Dans la seconde catégorie, on peut relever la collection de La liseuse qui comprend des « ouvrages à mettre entre toutes les mains », comme d’ailleurs Le livre pour tous (Payot, puis la Société romande de lecture populaire ), la Bibliothèque des mères de famille (Firmin-Didot) ou la Bibliothèque des jeunes filles (Hachette) ; on peut relever en passant que ces collections semblent souvent s’adresser à un public féminin qui d’ailleurs, nous le verrons dans le chapitre concernant les lecteurs, forme la majorité du public de la bibliothèque.

Les matières des ouvrages

Dans l’inventaire du fonds conservé aux Archives cantonales vaudoises, les ouvrages ont été classés (mais pas physiquement néanmoins) par matières, selon le plan suivant :

0. Catalogues et registre du prêt

1. Périodiques

2. Religion/Théologie

3. Droit

4. Philosophie

5. Politique, économie

6. Sciences (Sciences naturelles, physique, médecine, agriculture, vétérinaire, économie domestique…)

7. Beaux-arts

8. Belles-lettres

8.a Littérature classique et populaire (romans, nouvelles, récits, poésie, fables, théâtre)

8.b Linguistique et Histoire littéraire

9. Histoire

9.a Histoire générale

9.b Histoire religieuse

9.c Biographies

10. Géographie (aussi les récits de voyage)

 

Cela donne la répartition suivante :

Répartition par matières des titres du fonds ancien (avant 1900)

1ère colonne : nombre de volumes

2ème colonne : nombre de titres

 

Figure 1 Répartition des matières avant 1900

Source : Inventaire PP 348 (2001 : 8)

Répartition par matières des titres du fonds après 1900


1ère colonne : nombre de volumes

2ème colonne : nombre de titres

Figure 2 Répartition des matières après 1900

Source : Inventaire PP 348 (2001 : 9)

La grande majorité du fonds est, au XIXe et encore plus au XXe siècle, composée d’ouvrages entrant dans la catégorie des belles-lettres. La bibliothèque ayant été créée après 1860, cela appuie l’évolution de la lecture populaire que nous avons relevée plus haut : il s’agit en effet de la période où le roman fait son entrée dans les bibliothèques populaires, et la bibliothèque paroissiale de Dommartin ne dément nullement cette affirmation.

Le type d’ouvrages le plus présent est globalement tous publics (on trouve en passant quelques ouvrages qu’on considérerait plutôt comme destinés à un public enfantin à l’heure actuelle : Heidi de Johanna Spyri ou les œuvres de la Comtesse de Ségur et de Louisa May Alcott) et effectivement populaire, dans les deux sens du terme : on trouve ainsi des ouvrages grand public répondant plutôt à un besoin d’évasion ; des romans d’aventure, d’anticipation ou encore sentimentaux. Parmi ceux-ci apparaissent les œuvres de Jules Verne, Henri Gréville, Arthur Conan Doyle, Delly… D’autre part, on rencontre également des ouvrages plus moralistes peut-être et ancrés dans la réalité des lecteurs concernés : de la littérature villageoise, ou se passant dans le canton de Vaud, et dont les personnages ont des préoccupations qui pourraient se rapprocher de celles d’un public rural du XIXe siècle (ou du moins de celles que leurs prêtent les auteurs !) : le travail, le mariage, la religion, les relations avec son entourage, l’opinion publique… On trouve également des thèmes influencés par l’actualité : lors des deux guerres mondiales apparaissent des ouvrages traitant de l’antimilitarisme ou des récits de soldats ou d’infirmières ayant travaillé dans des hôpitaux militaires.

La morale et la religion sont également assez présentes dans le fonds, pas tant sous forme de traités (selon les graphiques que nous venons de voir, la théologie ne représente en effet qu’1% du fonds) qui sont peut-être jugés inaccessibles ou sans grand intérêt (sans doute avec raison) pour le public visé, mais plutôt dans les romans eux-mêmes. Aucun ne suscite a priori de controverse d’un point de vue moral (on trouve Un cœur simple de Flaubert mais pas Madame Bovary !), mais certains semblent également être ouvertement moralisants, et mettent parfois en scène des personnages dont les comportements considérés comme mauvais sont punis, et les bons récompensés (il en va ainsi des héros du n° 1133, Hors la Loi, publié au début du XXe siècle : des parents vivant sous le même toit sans être mariés voient leur fils mourir après que ses camarades de classe se sont moqués de lui pour cette raison ; perte considérée comme une punition divine pour avoir enfreint une règle religieuse et sociale), et la morale et l’ordre établi servent souvent de décor à des personnages qui s’y opposent mais finissent toujours par rentrer dans le « droit chemin » : ainsi, le n° 402, Une fortune de Lydia Branchu, met en scène une couturière devenue riche par hasard qui, à force d’ennuis causés par ce nouvel état, va finir par devenir plus charitable et résignée qu’elle ne l’était auparavant.

Il est difficile d’apprécier quel versant de la littérature populaire (simplement « grand public » ou clairement moralisante) prédomine dans le fonds, du moins sans lire chaque ouvrage, mais relevons en tout cas que les deux se côtoient sans qu’il semble être fait une distinction particulière entre eux de la part des responsables.

Dans les autres types d’ouvrages rencontrés, l’histoire puis la géographie arrivent respectivement en deuxième et troisième position ; ces deux matières sont d’ailleurs en partie regroupées sous les cotes 170 à 320 dans ce qu’on a supposé plus haut être un vestige de classement par thèmes, preuve que les responsables de la bibliothèque les considéraient probablement comme proches. Il faut noter enfin que les récits de voyage et d’aventure (du type des œuvres de Mayne Reid notamment) prenant place dans des contrées exotiques (Chine (n° 281), Jamaïque (n° 286), Syrie (n° 258), et même Suisse allemande (!) (n° 261)) semblent également avoir été considérés comme relevant de la géographie par les pasteurs responsables de la bibliothèque.

Le domaine des sciences quant à lui subit une grande diminution entre le XIXe et le XXe siècle, passant de 33 à 7 ouvrages, ce qui semble confirmer une tendance, d’ailleurs relevée par l’auteure de l’inventaire du fonds elle-même, à se tourner encore plus vers la distraction avec le temps. La majorité des ouvrages présents dans le fonds, quelle que soit leur époque, sont d’ailleurs plutôt pratiques que théoriques. Si on trouve quelques ouvrages de vulgarisation scientifique (Les merveilles célestes (n° 334) ou Les nouveautés de la Science (n° 894)), la majorité de ce domaine est composée d’ouvrages plus proches du quotidien d’un public rural, et concernant les techniques agricoles, l’économie domestique, l’élevage d’animaux « domestiques » au sens large du terme (les chevaux et les poules, mais également les abeilles !) ou encore de médecine vétérinaire. Il semble de ce point de vue que la bibliothèque se rapproche quelque peu des bibliothèques populaires que nous avons décrites au chapitre précédent, dans sa volonté d’éduquer son lectorat.

Enfin, les deux types d’ouvrages globalement les moins présents restent la théologie « théorique » et les périodiques. On ne rencontre presque pas de traités de théologie, et ceux qui sont présents dans le fonds proviennent manifestement de dons (de la part de l’Académie de Lausanne et du pasteur François Milliquet notamment), mais nous l’avons vu, même les ouvrages distrayants sont souvent teintés de religion d’une manière ou d’une autre. En ce qui concerne les périodiques, ils sont relativement nombreux au XIXe siècle, notamment par les volumes de La Famille, un périodique publié par Georges Bridel dont on a déjà relevé les orientations religieuses et moralistes, de Rayon de Soleil (un périodique religieux adressé aux enfants), de la Ferme suisse ou encore du Magasin pittoresque. Là encore, la volonté éducative des responsables se fait sentir : ces périodiques donnent souvent des conseils pratiques (La Famille propose des patrons de couture par exemple), proposent des récits plus ou moins moralisants et donnent également parfois des informations scientifiques. Il ne semble pas que la bibliothèque était abonnée à ces périodiques : beaucoup d’années manquent, certains titres n’apparaissent que ponctuellement, d’autres (à la vue des dates des ouvrages qui les entourent) semblent avoir été acquis longtemps après leur parution. Il faut finalement noter que les périodiques sont essentiellement présents au XIXe siècle, et on n’en trouve plus aucun après 1910, sans qu’on puisse déterminer avec certitude pour quelle raison.

On peut ainsi dire que de manière générale, le fonds de la bibliothèque paroissiale de Dommartin peut être qualifié de réellement populaire, dans le type des bibliothèques d’après 1960 : on y ressent cette volonté d’instruire et de distraire à la fois, puisqu’on y trouve des romans, parfois moralisateurs mais en tout cas toujours moraux, écrits par des auteurs qu’on peut souvent rattacher au mouvement de lecture populaire, de même que des ouvrages pratiques. Ainsi, selon Jean-François Pitteloud (Pitteloud, 1998, p.468), Thomas Mayne Reid que nous avons mentionné plus haut relève uniquement de la littérature religieuse et paroissiale, et on recense dans le fonds 22 auteurs mentionnés comme populaires (et suisse-romands, ce qui renforce le caractère local de la « politique d’acquisition », même s’il est quelque peu anachronique de l’appeler ainsi !) par les ouvrages Littérature populaire et identité suisse et Bonnes lectures de Daniel Maggetti.

Les lecteurs et leur utilisation du fonds

Le profil des lecteurs

Une liste de tous les emprunteurs entre 1934 et 1960 a été établie sur la base du registre de prêt ; en tenant compte de certaines approximations (le prénom du lecteur n’était pas toujours précisé, certaines femmes peuvent apparaître à la fois sous leur nom de jeune fille puis sous le nom pris lors de leur mariage…), on dénombre au moins 196 emprunteurs différents à la bibliothèque de Dommartin. C’est plus que la population du village durant la période concernée, mais ceci découle du fait que les emprunteurs viennent des cinq villages de la paroisse et que le nombre est à répartir sur près de trente ans : il y a en effet une moyenne de 15 lecteurs différents chaque année, et le maximum est atteint en 1944 avec (seulement) 37 lecteurs.

Le lectorat est majoritairement féminin, comme le montre le graphique suivant (les « inconnus » sont les lecteurs dont le prénom n’était pas mentionné, ou dans deux cas, était mixte) :

Notons que cela rejoint la remarque faite plus haut, sur le nombre relativement important de collections semblant destinées à un public principalement féminin.

En ce qui concerne l’évolution du nombre de lecteurs, on constate globalement une augmentation dans les années 1940, peut-être à cause de la guerre qui aurait accru le besoin d’évasion des habitants de la paroisse, ou à cause d’autres éléments plus locaux dont il est difficile de préjuger (on ne trouve pas de trace d’une « campagne de promotion » particulière de la bibliothèque à cette époque, mais il n’est pas impossible qu’il y ait eu un mouvement fait en ce sens par un pasteur, par exemple). D’ailleurs durant cette même période, le nombre d’hommes ne chute pas particulièrement à la bibliothèque (il augmente même, puis subit une diminution dès 1945), ce qui laisserait supposer(6) que les lecteurs masculins sont peut-être des enfants ou des personnes âgées, n’ayant donc pas été mobilisés.

Quant au profil du lectorat, il est assez difficile à établir. Il a été possible de déterminer la profession de 41 lecteurs, ce qui est très peu et ne permet pas de tirer de conclusions réellement probantes pour l’ensemble. Voici néanmoins les métiers représentés, et le village d’origine des personnes les exerçant(7) :


 

A l’observation de ce tableau, on peut relever plusieurs choses : les lecteurs viennent de manière assez homogène de toute la paroisse, ce qui s’explique sans doute par le fait que l’église de Dommartin attire des protestants des cinq villages de la paroisse. Relevons également que les membres du Conseil paroissial et les moniteurs de l’école du dimanche, directement liés à la paroisse et par conséquent à la bibliothèque (les membres du Conseil paroissial sont également ceux qui choisissent les livres de la bibliothèque), sont au nombre de 13, ce qui représente tout de même 31 % du total. Sans doute étaient-ils les mieux placés pour savoir quels ouvrages pouvaient les intéresser dans la bibliothèque, mais cela pose la question de la perception qu’en avaient les autres habitants du village (s’y intéressaient-ils, y venaient-ils seulement ?). D’autre part, on trouve également 7 agriculteurs, ce qui dans ce cas est plus représentatif de la population du village, essentiellement agricole à l’époque selon le Dictionnaire historique de la Suisse.

41 lecteurs sur 196 ne permettent néanmoins pas de tirer de conclusions valables sur le profil du lectorat. Cependant, il est possible d’estimer le taux de pénétration de la bibliothèque : en 1950, le nombre d’habitants dans la paroisse était de 668(8), les 37 lecteurs fréquentant la bibliothèque au plus fort de son activité en 1944 ne représentent que 5.5% de cette population, ce qui semble très peu pour une bibliothèque tout public selon la composition de son fonds.

L’utilisation du fonds

En premier lieu, il faut relever qu’il manque beaucoup de mois dans le registre de prêts, surtout entre 1956 et 1960 ; mais les mois de juillet à septembre sont souvent vides ou presque, ce qui peut être lié au fait que la population de la paroisse étant majoritairement agricole, les mois d’été sont réservés aux travaux dans les champs (ou à la rigueur, à d’autres activités en plein air) et ne laissent pas réellement de temps à la fréquentation de la bibliothèque. Les rares lecteurs qui empruntent des livres durant cette période sont notamment un soldat et un épicier, ce qui corrobore cette hypothèse.

On n’observe pas d’évolution cohérente du nombre de prêts au fil des années : il y a une augmentation qu’il est difficile d’expliquer en 1939, les années 1941 et 1942 n’existent pas dans le registre sans qu’on sache pourquoi, puis le nombre se maintient globalement et chute à la fin des années 1950 pour ne plus vraiment remonter jusqu’à la fermeture de la bibliothèque, comme le montre le graphique suivant :

Les taux de rotation de la bibliothèque sont également très bas : le plus haut culmine à 0.163 en 1938(9), et descend à 0.004 en 1956, où seuls 6 ouvrages sont prêtés. Tout cela est très loin du taux de rotation « acceptable » qu’on estime aujourd’hui à 3, et même s’il faut tenir compte de l’époque et que ce que les critères actuels ne sont pas forcément applicables aux années 1930 à 1960, cela tend à prouver que le fonds n’attirait pas réellement les lecteurs. Cela d’autant plus que selon l’enquête sur les bibliothèques suisses d’Ernst Heitz (Heitz, 1872 : p. 53), réalisée en 1872 et dans laquelle figure la bibliothèque de Dommartin, ce taux de 3 était possible à atteindre : la bibliothèque populaire de Goumoëns-la-Ville a ainsi enregistré cette année-là 1288 prêts pour un fonds de 388 volumes (3.3). Notons que le taux de rotation de la bibliothèque paroissiale de Dommartin dans cette enquête est nettement plus haut qu’au XXe siècle, mais loin de l’ « exploit » de Goumoëns : on compte 190 prêts pour 260 volumes (0.7).

Enfin, concernant les types d’ouvrages prêtés, c’est également la matière la plus présente dans le fonds qui est plébiscitée par les lecteurs : les belles-lettres. Durant tout le temps couvert par le registre de prêts, elles dominent de manière écrasante : 93% en 1935, 85% en 1944 et jusqu’à 97% en 1958-1959 ! De ces trois années, 1944 est la plus diversifiée (si l’on peut dire) : on a également prêté des ouvrages de géographie, de droit (un seul !) et des biographies. Mais la théologie, les périodiques ou encore l’histoire religieuse ne semblent pas faire recette, comme le montre le tableau général suivant :

Cela nous permet néanmoins de constater que contrairement à ce qu’il a pu être fait dans certaines bibliothèques, il semble que le pasteur-bibliothécaire n’obligeait pas les lecteurs à emprunter également un ouvrage documentaire lorsqu’ils choisissaient un roman. Il est de manière générale plutôt difficile en l’état d’interpréter ces informations sur le prêt, qui fluctuent sans qu’on puisse toujours déterminer une cause à leur augmentation ou diminution (excepté vers la fin de l’existence de la bibliothèque, où tout concourt à faire preuve d’un désintérêt manifeste des lecteurs comme des responsables, mais nous y reviendrons au chapitre suivant). Il semble quoi qu’il en soit que la bibliothèque de Dommartin était réellement une bibliothèque de distraction plutôt que d’éducation, au XXe siècle en tout cas, d’une part par la composition de son fonds, mais surtout par les choix de ses lecteurs, qui l’utilisent comme telle en dépit de la volonté supposée des responsables de la rendre également éducative.

La fermeture de la bibliothèque

Les procès-verbaux du Conseil de paroisse semblent suivre la fréquentation de la bibliothèque, qui diminue inexorablement dès le milieu des années 1950 : en effet, les mentions de la bibliothèque dans ces procès-verbaux vont aussi en diminuant, et disparaissent tout à fait après 1956. En ce qui concerne la fréquentation de la bibliothèque, les pasteurs font souvent des remarques à son sujet, comme en 1939 : « Dans un même ordre d’idées, nous possédons une Bibliothèque paroissiale qui ne manque certainement pas de livres fort intéressants. Or, la T.S.F. a fait chez nous un grand tort à la lecture qu’elle ne pourra pourtant jamais remplacer. La Bibliothèque a été un temps quasi-abandonnée ; elle retrouve maintenant des faveurs, surtout auprès des jeunes, et nous en sommes heureux » (NB 10.2 : 1939)

Et en 1956 : « Nous croyons que nos jeunes lisent peu (…). Nos jeunes sont-ils trop accaparés par le travail de la campagne, à l’heure où la main-d’œuvre manque ? et serait-ce la raison pour laquelle la lecture n’est plus possible ? Nous le pensons. La fatigue du corps n’appelle pas précisément la lecture. En tout état de cause, la bibliothèque paroissiale est pratiquement désertée par les jeunes. » (NB 10.2 : 1956)

La constatation est toujours la même, la bibliothèque n’est pas aussi fréquentée qu’on l’aimerait (sauf en 1939, ce que confirment les statistiques des prêts, sans pour autant que l’on en connaisse la cause), quelle qu’en soit la raison – raison que les pasteurs semblent d’ailleurs toujours considérer comme extérieure, ne remettant jamais en question l’intérêt intrinsèque du fonds ! Et pourtant, la question aurait probablement été pertinente : l’absence de désherbage fait que des ouvrages pour certains quasiment centenaires en 1950 se trouvaient encore dans le fonds, leur état de conservation n’était pas toujours bon comme on a pu l’observer plus haut, et les romans moralisants qu’on trouve en quantité plaisaient probablement peu à un public du milieu du XXe siècle. Ajoutons à cela l’absence de classement autre que par ordre d’entrée et peut-être, les horaires d’ouverture par trop réduits (après le culte, ou en tout cas un seul jour par semaine), le peu de renouvellement du fonds vers la fin de son existence, et la bibliothèque avait tout pour décourager les lecteurs, ce qu’a résumé de manière assez parlante une habitante de Dommartin lors de ma visite pour consulter les procès verbaux : « c’étaient de vieux livres… » ! Il aurait été néanmoins difficile, malgré toute la bonne volonté des responsables – et on ne doute pas qu’ils en avaient – de moderniser la bibliothèque compte tenu du peu de moyens dont elle disposait, comment nous l’avons vu.

L’amélioration des moyens de transports a peut-être également joué un rôle : la ligne Lausanne-Echallens-Bercher a été inaugurée en 1873, et dès lors il était moins problématique pour les lecteurs insatisfaits d’aller chercher une bibliothèque plus à leur goût.

Enfin, il semble qu’une raison non moins importante de la fermeture de la bibliothèque réside dans le Conseil de paroisse lui-même : dès les années 1940, d’autres préoccupations deviennent prépondérantes dans les procès-verbaux. La baisse de la fréquentation des cultes (qui entraine sans doute aussi celle de la bibliothèque, soit dit en passant) est source d’inquiétude, la population du village diminue elle aussi, les finances de la paroisse sont globalement déficitaires… De plus, en 1961, le pasteur de l’époque, Marc Mottier, démissionne de manière soudaine et ne sera pas remplacé avant 1963. Tout cela laisse penser que la bibliothèque, ne suscitant déjà plus que peu d’intérêt de la part des lecteurs, a également été oubliée par le Conseil de paroisse alors dans la tourmente…

Conclusion : bibliothèque populaire, publique, autre ?

On peut dire pour conclure que la bibliothèque paroissiale de Dommartin correspond par plusieurs points à la description que fait la littérature des bibliothèques populaires, et malgré quelques particularités propres, on peut considérer qu’elle s’inscrit assez clairement dans ce mouvement.

Tout d’abord, la volonté des responsables : certains pasteurs affirment eux-mêmes vouloir promouvoir les bons livres et lutter contre les mauvais, comme nous l’avons vu avec la déclaration du pasteur Richard Moreillon concernant l’auto-librairie des éditions Labor & Fides. Le fonds reflète cette volonté, ne proposant pas de livres controversés, mais uniquement des ouvrages grand public, faciles d’accès (tant physiquement que par leur contenu), pratiques, distrayants, instructifs, moraux, et liés à la religion parfois, puisqu’il s’agit d’une bibliothèque paroissiale ; en un mot, inoffensifs. Les auteurs eux aussi comme nous l’avons vu appartiennent souvent au mouvement de lecture populaire. Le fonds évolue passablement avec le temps, la science disparaissant au profit des romans par exemple, mais comme les premiers ouvrages sont conservés, le fonds reste globalement le même au final.

La bibliothèque de Dommartin s’inscrit donc dans cette seconde phase de la lecture populaire, après 1860, du moment où le roman est admis dans les bibliothèques populaires ; elle n’a jamais été une bibliothèque uniquement édifiante, et n’a sans doute jamais eu cette volonté d’ailleurs (le pasteur ne forçant pas les lecteurs à emprunter un ouvrage documentaire avec un roman, par exemple –du moins au XXe siècle). On ne perçoit pas de clivage entre les parties du fonds, et il semble que pour les responsables, les romans sont tout aussi respectables que les ouvrages documentaires ; par contre, les lecteurs semblent préférer les premiers !

Ce désaccord entre les pasteurs, qui ne remettent jamais en question la composition du fonds et cherchent les raisons de l’abandon de la bibliothèque dans des facteurs externes, et les lecteurs qui viennent de moins en moins au fil du temps et préfèrent largement les romans quand ils le font est d’ailleurs à relever : il semble que le fonds et son classement, du moins au XXe siècle, n’étaient décidément plus adaptés au public qu’ils tentaient de viser, ce qui est probablement, avec les autres problèmes qu’a connu la paroisse et les nouvelles possibilités qui s’offraient au public, une des raisons de la fermeture de la bibliothèque. Il est en effet impossible de demander au public de s’adapter à un fonds et non le contraire, hier comme aujourd’hui !

La bibliothèque de Dommartin illustre par conséquent assez bien le rejet qu’a subi la lecture populaire dans le courant du XXe siècle, à l’avantage de la lecture publique : la bibliothèque est restée jusqu’à sa fermeture une bibliothèque populaire, sans jamais devenir une bibliothèque publique, et c’est ce qui a sans doute en partie causé sa perte. De par son fonds obsolescent d’une part, mais également de par ses horaires d’ouverture restreints, sa gestion non professionnelle, son manque de ressources qui lui interdisait toute adaptation ou encore son absence de classement thématique, ses lecteurs se sont désintéressés d’elle, puisqu’elle ne répondait plus à leurs besoins. Toutes ces choses étaient probablement déjà offertes par d’autres bibliothèques des alentours, plus faciles à atteindre avec l’amélioration des moyens de communication, et la bibliothèque paroissiale de Dommartin semblent n’avoir pas pu s’adapter à ce changement.

Ce qui est un mal pour un bien (toutes proportions gardées…) cependant : le fait d’avoir conservé presque l’entier du fonds ainsi que les registres de prêts (que l’on possède rarement pour les bibliothèques de cette époque), de même que le classement par ordre d’acquisition qui permet de préjuger de l’évolution du fonds facilite grandement l’étude de cette bibliothèque, et la rend d’autant plus intéressante d’un point de vue historique. L’entier de la bibliothèque, plutôt que les documents qui la composent, devient dès lors un document d’archive en soi, et prend un sens particulier. De même que l’étude de la bibliothèque n’a pas tant d’intérêt en elle-même que comparée à d’autres, dans le but peut-être d’avoir un jour une vision d’ensemble de la lecture dans le canton de Vaud aux siècles précédents…

Bibliographie

Fonds d’archives

Archives cantonales vaudoises

Les inventaires des fonds suivants et les documents d’archives en faisant partie ont été consultés :

PP 348 Bibliothèque paroissiale de Dommartin (1865-1960)

PP 405 Paroisse de Dommartin (1773-1990)

Archives communales de Dommartin

FA 1 -23 : comptes communaux. (1695-1960)

NB 3 : affaires de paroisse. Comptes. (1920-1935)

NB 10.1-3 : procès-verbaux du Conseil de paroisse de Dommartin

Ouvrages

Société de l’annuaire vaudois S.A. Annuaire et indicateur vaudois réunis. Lausanne : Société de l’annuaire vaudois s.a, 1875 ->

Archives cantonales vaudoises. Inventaire de la bibliothèque paroissiale de Dommartin (PP348). Chavannes : ACV, 2001. 17 p.

Ardia, Franco et al. Figures du livre et de l’édition en Suisse romande (1750-1950), Lausanne : Fondation Mémoire Éditoriale, 1998. 121 p.

Barth, Robert, Bibliothèques et bibliothécaires en Suisse : cent ans d’association professionnelle 1897-1997. [Vevey] : Éd. de l’Aire, 1997. 371 p.

Heitz, Ernst. Die Öffentlichen Bibliotheken der Schweiz im Jahre 1868 = Les bibliothèques publiques de la Suisse en 1868. Bâle, Schweighauserische Buchdruckerei, 1872.

Maggetti, Daniel, Müller, Dieter (réunion et présentation). Bonnes lectures : textes populaires de Suisse romande, 1880-1990. Carouge-Genève : Zoé, 1992. 139 p.

Maggetti, Daniel, … [et al.]. Littérature populaire et identité suisse : récits populaires et romans littéraires : évolution des mentalités en Suisse romande au cours des cent dernières années. Lausanne : L'Age d'homme, 1991. 183 p.

Pitteloud, Jean-François. « Bons » livres et mauvais lecteurs : politiques de promotion de la lecture populaire à Genève, au XIXe siècle. Genève : Société d’Histoire et d’Archéologie, 1998. 616 p. (Mémoires et documents, t. 59).

Richter, Noë. Du conditionnement à la culture : l'offre de lecture des Lumières à la Troisième République. Bernay : Société d'histoire de la lecture, 2003. 58 p. (Matériaux pour une histoire de la lecture et de ses institutions, n° 13).

Richter, Noë. Les voies d’accès aux livres : La problématique des fondateurs de la lecture populaire 1760-1862. Bernay : Société d’Histoire de la lecture, 1999. 68 p. (Matériaux pour une histoire de la lecture et de ses institutions, n° 8).

Richter, Noë. Introduction à l’histoire de la lecture publique & à la bibliothéconomie populaire. Bernay : La Queue du Chat, 1995. 252 p.

Richter, Noë. La lecture et ses institutions : la lecture populaire 1700-1918. Bassac : Plein chant, 1987. 301 p.

Richter, Noë. Les bibliothèques populaires. Paris : Cercle de la Librairie, 1978. 227 p.

Vallotton, François. L’édition romande et ses acteurs (1850-1920). Genève : Slatkine, 2001. 477 p.

Volet, Simone. École, communes, canton : le cas du pays de Vaud. Mémoire de licence, faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, Université de Genève, 1982. 197 p.

Sites internet

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http://www.bmlisieux.com/normandie/bib/biblio03.htm (Consulté le 2 mars 2010).

La ligne : hier. La ligne verte [ : site du chemin de fer Lausanne-Echallens-Bercher] [en ligne], juin 2010 http://www.leb.ch/leb_hier.htm (consulté le 11 juin 2010).

Loi sur l’Instruction primaire, 28 juin 1833. In : Psychologie, éducation & enseignement spécialisé : site créé et animé par Daniel Calin [en ligne]. Dernière révision : 4 mars 2009. http://dcalin.fr/textoff/loi_guizot.html (consulté le 25 mars 2010).

Morerod, Jean-Daniel. Dommartin. In : Dictionnaire historique de la Suisse [en ligne]. 24.01.2006. http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F2360.php (consulté le 25 janvier 2011).

Notes

(1) Ainsi les milieux catholiques surtout avaient établi une classification précise en fonction du sexe, de l’âge et du « profil religieux » des lecteurs (Richter, 1999 : pp. 36 et 58.)

(2) Selon le modèle d’Eugène Morel (Richter, 1995 : p. 61.)

(3) Ainsi certaines bibliothèques genevoises ont perpétué jusqu’aux années 1970 une pratique héritée de la lecture populaire : obliger les lecteurs à emprunter également un ouvrage documentaire lorsqu’ils choisissaient un roman (Pitteloud, 1998 : p. 28).

(4) A savoir Benda, Bridel, Imer, Mignot (Lausanne), Beroud, Cherbuliez, Jeheber (Genève), Berthoud et Delachaux (Neuchâtel) (Vallotton, 2001 : p.129.)

(5) Les 21 % restants sont inconnus, soit que le livre ait perdu sa page de titre soit que l’éditeur ou le lieu d’édition ne soit pas mentionné.

(6) Car il n’a pas été possible durant ce travail de Bachelor de déterminer l’âge des lecteurs.

(7) Les professions des lecteurs proviennent de l’annuaire vaudois.

(8) Sur la base des articles des villages de la paroisse dans le Dictionnaire historique de la Suisse.

(9) 236 ouvrages prêtés sur un fonds alors estimé à 1450 ouvrages.